Guy Bouchard
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Guy Bouchard

Le dernier coup de sonde de la Fondation de l’entrepreneurship (Novembre 2018) sur l’intention des Québécois de se lancer en affaires démontre, hors de tout doute, que le sujet intéresse de plus en plus nos concitoyens.

Si elle a légèrement fléchi au cours des deux dernières années, la tendance démontre par ailleurs que les Québécois sont encore presque trois fois plus nombreux à passer à l’acte, en comparaison avec ce que laissent paraître les données de 2009. Et c’est une excellente nouvelle, même s’il y a quelques éléments questionnables dans ce rapport, dont le taux de fermeture de ces nouvelles entreprises qui est en hausse.

À mon avis, un des éléments qui a sûrement provoqué cet engouement des nouveaux entrepreneurs pour la jungle des affaires, c’est la diffusion des émissions de télévision mettant en vedette les entrepreneurs en démarrage ou en expansion et des vedettes du milieu des affaires comme « Dans l’œil du dragon » ou « Dragons’ Den » du côté du Canada anglais.

J’ai toujours eu des réserves par rapport aux impacts réels de cette téléréalité sur le développement des promoteurs qui se prêtent au jeu. D’ailleurs, à ma connaissance, parmi les quelques entrepreneurs du Saguenay–Lac-Saint-Jean qui ont participé à l’émission au cours des années, aucun n’a conclu de relations d’affaires durables avec les « dragons ». Soulignons qu’une étude réalisée par le Journal de Montréal en avril 2018 démontrait que seulement un accord entre un promoteur et un dragon avait été conclu dans toute la saison précédente…

Généralement déçus

Pour avoir discuté avec plusieurs participants de chez nous, ces derniers sont généralement déçus de leur expérience qui s’apparente davantage à un spectacle bien orchestré qu’à une véritable négociation propice à un partenariat à long terme. Et même si certains entrepreneurs ont vu leur notoriété gonfler substantiellement après leur passage aux « Dragons », le risque est très grand pour certains d’entre eux, pas suffisamment préparés ou inconscients de l’enjeu, de très mal paraître devant la caméra.

Il faut comprendre que ce que le diffuseur nous présente comme émission, c’est le résultat d’un savant travail de montage. Les discussions réelles et les analyses concrètes entre les parties prenantes qui suivent ces « spectacles » font souvent déchanter les promoteurs, les ramenant cruellement à la réalité du monde des affaires. Il faut être bien clair ici. Un partenariat ou un mentorat d’affaires sérieux et durable, ça ne se trouve pas dans le contexte d’une « date » à la télévision… Lorsqu’on regarde ces émissions ou certaines entrevues avec des entrepreneurs à succès, ça parait très « cool » et tendance de se lancer en affaires. Créer une PME, être son propre patron, être indépendant de fortune sont tous de puissants éléments de motivation pour l’homme ou la femme d’affaires en devenir.

Néanmoins, pour l’avoir vécu et constaté dans ma vie professionnelle, lancer une entreprise et la faire croître constitue souvent le défi d’une vie. Et c’est un travail quotidien, toujours très envahissant. Il faut avoir la couenne dure. Il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus. Même les « dragons », ces modèles à qui tous les projets semblent sourire, peuvent vivre des échecs cuisants. On a qu’à penser aux récents déboires financiers de Caroline Néron (Bijoux Caroline Néron) et d’Alexandre Taillefer (Téo Taxi). Cela démontre encore une fois que l’entrepreneuriat est loin d’être un long fleuve tranquille.

Clé du succès

C’est donc dire, qu’au-delà du « show de boucane », une des clés du succès en affaires repose sur la formation des entrepreneurs potentiels, et de ceux qui sont déjà en activité. Mais surtout par le support, les conseils et le partage d’expertise de ceux qui sont déjà en affaires. Dans ce contexte il faut saluer l’initiative régionale qui a permis la fondation du Centre spécialisé en entrepreneuriat multi-ressources (CSEMR) à Dolbeau-Mistassini l’an dernier. Le CSEMR interviendra auprès de toutes les clientèles d’entrepreneurs notamment par le partage d’expérience et de connaissance.

Ça c’est de la vision !

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