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Karine Boivin Forcier

SAGUENAY – Le Saguenay–Lac-Saint-Jean s’est doté d’un outil original pour maximiser les retombées des projets qui se réalisent sur son territoire. Le Comité de maximisation (CMAX), sous l’égide de Développement économique 02 (DE 02), a pour rôle de faire une vigie des appels d’offres, d’informer les entrepreneurs et travailler avec les donneurs d’ordres pour les aiguiller et les informer sur l’expertise du panier de fournisseurs régionaux.

« Maximiser les retombées, ça veut dire quoi? Ça veut dire rendre les contrats accessibles au potentiel entrepreneurial qu’on a. On veut que les contrats reflètent ce potentiel », indique d’entrée de jeu le coordonnateur du CMAX, Jean-Lin Otis. Par potentiel entrepreneurial, M. Otis entend les entreprises ayant la capacité d’effectuer les contrats dans un contexte donné. Ainsi, par exemple, ce n’est pas parce qu’un contrat de 90 M$ est offert qu’il y aura forcément des entreprises régionales qui ont une activité dans ce domaine et qui ont une capacité (nombre d’employés, moyens financiers et matériels, etc.) suffisante pour le réaliser.

C’est là qu’intervient le CMAX. « Mon rôle auprès des grands donneurs d’ordres, c’est de démontrer le potentiel de la région pour établir les contrats en fonction de ce potentiel. Je ne suis pas là pour obliger les donneurs d’ordres, mais je peux leur montrer le nombre d’entreprises qui peuvent répondre à leur besoin et lui transmettre des informations à ce sujet », précise le coordonnateur.

Il joue notamment un rôle auprès d’Hydro-Québec, des municipalités, de la Base des Forces canadiennes de Bagotville (BFC Bagotville), du ministère des Transports, de même qu’avec des entreprises comme Métaux BlackRock ou Arianne Phosphate. Il surveille également ce qui se fait dans les régions voisines de la Côte-Nord et du Nord-du-Québec, où les entreprises saguenéennes et jeannoises peuvent trouver de belles opportunités. En effet, plusieurs organisations de la région ont développé une expertise dans les grands projets des secteurs industriels, miniers ou de génie civil, qui peut ensuite être exportée.

Base de données

Afin de réaliser efficacement son travail, Jean-Lin Otis compte sur une base de données gérée par DE 02. Celle-ci contient toutes les entreprises de la région, listées selon leur code du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (SCIAN), ce qui lui permet de retrouver facilement toutes les entreprises d’un secteur d’activité donné. Par ailleurs, ce répertoire inclut plusieurs statistiques utiles sur les entreprises, dont leur nombre d’employés. Il est mis à jour de façon continue. « Ça me permet de connaître ce qu’on est capable de faire dans la région. C’est essentiel. C’est un outil qui fait l’envie de beaucoup d’endroits. L’utilisation qu’on en fait, on est pas mal les seuls », affirme le coordonnateur.

M. Otis utilise cette base de données pour créer des listes d’envoi lui permettant d’informer les entrepreneurs d’un secteur d’un appel d’offres qui pourrait les intéresser, mais aussi pour créer des bottins de ressources à l’attention des donneurs d’ordres.

Ententes

Rappelons que le CMAX a signé, en 2018, des ententes de collaboration avec les responsables de deux grands projets qui devraient voir le jour prochainement dans la région : Arianne Phosphate et Métaux BlackRock. Les rencontres avec cette dernière entreprise ont d’ailleurs déjà débuté pour établir des façons de maximiser les retombées de son projet, dont la construction devrait débuter au printemps.

Du côté d’Arianne Phosphate, ces discussions préliminaires débuteront sous peu. « On a une bonne collaboration jusqu’à maintenant avec les deux donneurs d’ordres. […] On travaille en amont, parce que du moment que des projets privés attachent leur financement, ils peuvent débuter rapidement. […] On établit des méthodes ensemble », mentionne Jean-Lin Otis.

Main-d’œuvre

Le CMAX se prépare aussi à jouer un rôle d’informateur en lien avec la main-d’œuvre qui sera nécessaire tant pour la construction que pour l’opération des projets industriels qui s’annoncent. Dans le contexte actuel de pénurie, cela représentera certainement un beau défi pour de nombreuses entreprises. « On essaie d’avoir les besoins de main-d’œuvre des donneurs d’ordres pour véhiculer cette information-là », explique M. Otis.

Le but est d’informer les partenaires du CMAX qui travaillent du côté du marché du travail et des ressources humaines afin qu’ils puissent utiliser ces données pour axer le recrutement et les solutions selon les besoins. « Mon rôle, c’est d’aller chercher les besoins et d’informer tout le monde », ajoute le coordonnateur.

Le CMAX travaille notamment à la réalisation de courbes de main-d’œuvre pour représenter. « On s’active à aller chercher ces informations-là. On devrait terminer sous peu et ensuite partager les informations avec nos partenaires », conclut Jean-Lin Otis.

Survol des grands projets du Saguenay–Lac-Saint-Jean

Informe Affaires vous propose un résumé des principaux grands projets industriels en développement au SLSJ au cours des prochaines années.

Métaux BlackRock – 1,3 G$

Projet de mine à ciel ouvert de minerai de vanadium-titane-magnétite (VTM) près de Chibougamau et d’usine de deuxième transformation dans le secteur Grande-Anse de la Zone industrialo-portuaire (ZIP) Saguenay. La construction devrait débuter au printemps prochain, suivi d’un lancement des opérations à l’automne 2020. Ce projet créera 800 emplois pendant la construction, puis 200 pour l’opération de la mine et 300 pour celle de la fonderie. L’usine de Saguenay produira du ferrovanadium, de la scorie de titane et de la fonte brute à haute pureté.

Arianne Phosphate – 1,2 G$

Le montant des investissements inclut 982,5 M$ pour la construction de la mine et du concentrateur du Lac à Paul et 232,2 M$ pour le développement du système de transport du concentré et les équipements de manutention sur le site du port projeté. L’entreprise vise la production de 55 000 tonnes de minerai par jour, qui seront traitées pour produire trois millions de tonnes de concentré phosphaté (apatite) par année. Près de 1000 emplois directs et indirects seront créés pour les 26 ans d’exploitation de la mine. Ce projet pourrait également prendre son envol cette année, si d’autres ententes significatives sont signées avec des clients et que le financement est complété.

Port de Saguenay – 260 M$

Projet de construction d’un terminal maritime multiusagers en rive nord de la rivière Saguenay, près de Sainte-Rose-du-Nord. Les installations du terminal maritime comprendront les principaux éléments suivants : un quai, un chargeur de navires, des silos et systèmes de manutention de concentré, ainsi qu’un chemin d’accès au quai pour les besoins d’opération et de maintenance. Port de Saguenay croit que ce terminal multiusager permettra d'ouvrir la voie au développement de l'ensemble du territoire se trouvant au nord de la rivière Saguenay, en plus de permettre la réalisation du projet d’Arianne Phosphate. L’opération du site permettra la création d’une douzaine d’emplois. Pour la construction, les chiffres restent à venir, mais on peut s’attendre à qu’environ une centaine de travailleurs soient mobilisés.

Ligne Micoua-Saguenay –

Hydro-Québec projette la construction d’une ligne à 735 kV d’environ 250 km entre le poste Micoua, sur la Côte-Nord, et celui de Saguenay, pour sécuriser l’approvisionnement en énergie du sud du Québec. Il faudra également effectuer des travaux connexes qui consistent à ajouter des équipements dans les deux postes et à agrandir le site du Saguenay. La construction devrait débuter cet automne, si les autorisations environnementales sont obtenues, pour une mise en service en 2022. Le déboisement devrait occuper en moyenne 250 travailleurs (300 lors de la période de pointe) et la construction de la ligne dans la région demandera environ 180 personnes (250 lors des pics).

Énergie Saguenay – 7,2 G$

Projet développé par l’entreprise GNL Québec. Il s’agit d’un complexe industriel de liquéfaction de gaz naturel sur le site de Port de Saguenay dans le but d'exporter 11 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié (GNL) par an, à partir de sources d'approvisionnement situés dans l'Ouest canadien. Pendant la période de construction, qui s'échelonnera sur quatre ans, le projet devrait générer 6 000 emplois directs et indirects, dont 4 000 emplois directs en période de pointe, de même que 1 100 emplois directs et indirects en période d'opération, dont entre 250 et 300 emplois répartis entre l’usine de Grande Anse et les bureaux administratifs à Saguenay. La construction devrait débuter vers 2021 et l’entrée en opération est prévue pour 2025.

Gazoduq – 4,5 G$

Projet de conduite souterraine de gaz naturel de 750 km entre Iroquois en Ontario et Saguenay. Cet équipement se destine principalement à alimenter le projet d’usine de liquéfaction de gaz naturel d’Énergie Saguenay sur le site de Grande-Anse. L’entreprise est actuellement en processus de consultation et d’information avec les communautés touchées. L’étude d’impact environnemental devrait être lancée fin 2019. La construction est prévue pour 2022. Ce projet, combiné à celui d’Énergie Saguenay, pourrait générer des retombées économiques totalisant plus de 800 M$ par année à l’échelle du Québec.

Rio Tinto – Vaudreuil Phase 1 – 250 M$

Le projet Vaudreuil au-delà de 2022 vise à accroître la durée de vie de la raffinerie d’alumine ainsi que l’actuel site d’entreposage des résidus de bauxite d’au moins 10 ans. La phase 1 du projet prévoit la construction d’une usine de filtration pour optimiser la capacité du site actuel de disposition des résidus de bauxite, d’un convoyeur, d’un débarcadère ainsi que des travaux aux installations portuaires de La Baie. Les travaux ont débuté au printemps 2018 et se termineront en 2020. La période de pointe est prévue en 2019 et devrait nécessiter 240 travailleurs sur le chantier. Le projet consolide également les 1000 emplois générés par la raffinerie d’alumine. Une phase deux est prévue pour l'entreposage des résidus de bauxite dans un nouveau site développé de façon progressive ainsi que la réhabilitation du site actuel. Cette phase permettrait de prolonger la durée de vie de l’usine environ jusqu’en 2047. RT continue sa préparation. Cette phase pourrait débuter autour de 2027.

Rio Tinto/Alcoa – Élysis – Environ 243 M$

En mai, Rio Tinto et Alcoa Corporation ont annoncé un nouveau procédé révolutionnaire d'électrolyse de l'aluminium produisant de l'oxygène et éliminant les émissions directes de gaz à effet de serre associées au procédé d'électrolyse traditionnel. Pour faire avancer le développement et la commercialisation à grande échelle de ce nouveau procédé, elles ont créé la coentreprise Elysis. Celle-ci prévoit mettre en vente un ensemble technologique à compter de 2024. Le siège social sera à Montréal, mais le centre de recherche doit être situé au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Mentionnons que les gouvernements québécois et canadiens investissent chacun 60 M$ dans cette coentreprise, alors qu’Apple offrira 13 M$. Quant aux deux géants de l’aluminium, ils investiront ensemble 55 M$ au cours des trois prochaines années.

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