Auteur

Karine Boivin Forcier

N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : Le transport, un service vital publié dans notre édition du mois de septembre.

SAGUENAY – La pénurie de main-d’œuvre touche durement le secteur du transport par camion. Le manque de chauffeurs oblige les entreprises à revoir certaines de leurs opérations et à faire preuve de créativité dans la recherche de solutions.

Plusieurs d’entre elles ont bonifié leurs conditions d’emploi, misé sur le développement d’un sentiment d’appartenance ou implanté des mesures permettant d’alléger l’horaire des chauffeurs. Chez Transcol, par exemple, certains postes auparavant dédiés à une seule personne ont été divisés en deux afin de diminuer les heures pour les travailleurs. La PME a également créé sa propre école de formation.

Chez Déménagements Tremblay Express, le taux de roulement demeure assez faible, mais l’entreprise met tout de même beaucoup d’efforts pour conserver ses employés. « Ça nous amène à être très créatifs. Nous essayons de créer une vie d’entreprise pour nos employeurs, d’ajouter des activités. Nous sommes aussi en train d’aller chercher le Sceau Concilivi en matière de conciliation travail-famille. Très peu de compagnies de transport ont fait cette démarche », illustre Jessica Bergeron Ratté, CRHA et directrice des ressources humaines.

Oeuvrant dans le secteur alimentaire, la firme connaît souvent des périodes de pointe, notamment lors du ramassage des bleuets. « Les besoins de nos clients sont très ponctuels et nous n’avons évidemment pas de chauffeur qui attend chez lui qu’on ait des besoins pour l’appeler. Nos répartiteurs sont vraiment créatifs. Ils vont parfois même recruter leurs connaissances qui travaillent ailleurs et sont en vacances pour venir donner un coup de main. On s’organise aussi beaucoup à l’interne », mentionne Mme Bergeron Ratté.

Délestage

Au-delà des mesures pour faciliter le recrutement et la rétention, de nombreuses entreprises ont pris la décision de réduire leur liste de clients. « L’an passé, nous avons fait un ménage. Nous nous sommes délestés de plusieurs clients, principalement ceux que nous servions à la boîte ou avec très peu de quantité. Des transports à la pièce, plus compliqués ou pour lesquels nous devions régulièrement attendre longtemps ont été éliminés. Cela a permis d’améliorer les conditions pour nos employés », indique Mme Bergeron Ratté.

Même son de cloche chez Transcol, qui a également revu sa liste de clients. « C’est la première chose qu’on a faite. Avec la pénurie de main-d’œuvre, on ne cherche pas forcément à devenir plus gros. Nous voulons garder ce que nous avons et bien le faire », précise Caroline Girard, directrice générale de Transcol.

Élargir les horizons

Les entreprises élargissent également leurs horizons en termes de recrutement. « Au Lac-Saint-Jean, on voit qu’il y a beaucoup de femmes chauffeuses qui sont sorties des formations. Je pense que ça va aller vers ça, surtout dans notre domaine qui est le transport vraiment alimentaire. Il y a aussi des retraités ou des gens en fin de carrière qui veulent changer de métier », affirme Jessica Bergeron Ratté.

L’immigration peut également être une option, mais n’est pas possible dans toutes les situations. « Nos chauffeurs doivent connaître leur géographie et ils doivent parler français. Ça complexifie un peu le dossier du recrutement étranger. Et moi, quand j’ai besoin de quelqu’un pour livrer ou que j’ai un camion de disponible, c’est maintenant. Je ne peux pas attendre huit ou dix mois pour avoir quelqu’un », fait valoir Mme Girard.

Celle-ci considère qu’il faut également miser sur la formation et mieux préparer les étudiants aux réalités du marché du travail. « Au-delà de la conduite de véhicules lourds, c’est important de leur expliquer les contraintes et la complexité du domaine. Il faut que les futurs chauffeurs soient conscients de ce que ça implique », estime-t-elle.

Mme Bergeron Ratté croit pour sa part que les entreprises vont devoir continuer d’innover pour intéresser les jeunes au domaine et les retenir dans leur équipe. « Nous devons trouver des façons d’attirer les jeunes et de les garder chez soi. À date, je constate qu’ils veulent beaucoup aller à l’extérieur : l’Ontario, les États-Unis, etc. C’est important de leur donner assez de défis et de créer des manières de les conserver dans du transport qui est local ou régional », conclut-elle.

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