Auteur

Roger Boivin

Le 14 décembre dernier, Rio Tinto Alcan conviait plus de 250 partenaires stratégiques et décideurs liés à la grappe aluminium régionale à un intéressant symposium visant, entre autre, à faire le point sur le positionnement concurrentiel du Saguenay–Lac-St-Jean au sein de cette industrie mondiale. À titre de conférencier, RTA y avait notamment convié nul autre que M Jorge Vazquez, une sommité internationale, fondateur et PDG de la réputée firme américaine Harbor Aluminium,

Le Québec hautement compétitif

Dans son allocution, M Vazquez a présenté une analyse concurrentielle mondiale de l’aluminium selon quatre grands enjeux cruciaux. D’abord, le coût de l’électricité. Son verdict : le Québec se situe au tout premier rang mondial à ce chapitre, avec en prime une énergie verte, 100 % hydroélectrique. Le deuxième enjeu stratégique : la technologie. Le verdict de l’expert confirme qu’avec sa technologie, notamment l’AP-60, et sa remarquable filière d’équipementiers/fournisseurs, le Québec est aussi à l’avant-garde mondiale.

Le troisième enjeu incontournable : avoir accès à un grand marché en croissance. Là encore, le jugement de M Vazquez est que le Québec, dans le cadre de l’ALENA, est le principal fournisseur d’aluminium d’un des marchés mondiaux qui sera le plus en croissance pour les prochaines décennies. M Vazquez relève qu’à la suite de la politique de l’enfant unique, la population active de la Chine va décroître de … 143 millions de personnes de 2017 à 2040 !!!, alors que celle-ci va continuer de s’accroitre en Amérique du Nord durant la même période.

Et le capex?

Le dernier enjeu stratégique est le coût de construction des usines (capex). À ce chapitre, les tableaux présentés par M Vazquez sont dévastateurs pour nous. En effet, le coût de construction des alumineries est d’environ 6000 $ US/tonne au Moyen-Orient, d’environ 2 500 $ US/tonne en Chine (le plus bas au monde) et de 9 000 $ US /tonne au Canada (le capex le plus élevé du monde, rien de moins). M Vazquez a donc insisté sur le fait qu’avec de pareils coûts de construction, il était fort peu probable que de nouvelles alumineries voient le jour au Québec et qu’il nous faudra rapidement réduire ces coûts de façon importante.

Un coût de construction raisonnable

Avant d’aller plus loin, il est utile de savoir que le chiffre de 9 000 $ US/tonne est le coût de reconstruction, de 2011 à 2015, de l’aluminerie de RTA à Kitimat, un projet de 4,8 G $ canadiens pour une usine de 420 000 tonnes, soit un peu plus de 9000 $ US/tonne. Les initiées du monde de l’aluminium vous diront que, ce n’est certainement pas un projet qu’il faudrait reproduire, celui-ci ayant nécessité, par exemple, 35 % plus de temps que la construction de l’aluminerie Alma, de 1998 à 2001, une usine de taille comparable, qui a coûté 2,5 G $ canadiens, soit environ 4 500 $ US/tonne. La phase 2 d’Alouette à Sept-Îles, réalisée de 2003 à 2005, à quant à elle couté 3 400 $ US/tonne.

En 2016, Alouette déposait une étude de préfaisabilité très détaillée de sa troisième phase d’expansion qui prévoit des coûts variant entre 4 000 et 6 000 $ US/tonne. Ainsi, si Kitimat a effectivement coûté 9 000 $ US/tonne, c’est un cas unique qui est bien loin des coûts de construction observés au Québec.

D’ailleurs, M Gervais Jacques, le directeur général pour les opérations de l’Atlantique de RTA, soulignait récemment que le coût de construction ciblé pour les futurs projets de RTA dans la région est de 6 000 $ US/tonne, une cible que les professionnels du monde de la construction industrielle du Québec peuvent atteindre avec RTA, sans avoir à révolutionner leurs pratiques, d’autant que les très bas tarifs énergétiques du Québec compensent très largement ses coûts d’investissements industriels.

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