Montréal – Alors que le gouvernement du Québec est en réflexion sur les meilleurs moyens d’octroyer ses contrats publics, notamment en réponse aux recommandations de la Commission Charbonneau, l’Association des Architectes en pratique privée du Québec (AAPPQ) et l’Association des firmes de génie-conseil – Québec (AFG) ont dévoilé dans le cadre d’un déjeuner-conférence portant spécifiquement sur cette question, une étude sur les formules qualité-prix actuellement utilisées au Québec et au Canada. Plus de 200 participants ont pris part à l’événement, dont des donneurs d’ouvrage publics des niveaux municipal, provincial et fédéral.
D’entrée de jeu, les deux associations sont d’avis que pour réaliser des ouvrages qui demeureront de qualité pendant tout leur cycle de vie, il faut éviter les formules qui induisent le comportement du plus bas soumissionnaire et privilégier au contraire la sélection basée sur la qualité. Cette approche comporte de nombreux bénéfices, dont plusieurs ont été démontrés dans des études : meilleure planification, optimisation de la conception, incitation à l’innovation, honoraires plus précis, meilleur respect des échéanciers et réduction des litiges et des dépassements de coûts.
Par ailleurs, la Commission Charbonneau avait reconnu que les formules qui donnent une prépondérance au prix sont prévisibles, ouvrant ainsi la porte à des comportements répréhensibles.
Une étude rigoureuse et des conclusions claires
Menée par le chercheur et économiste Martin St-Denis, de la firme MCE Conseils, l’étude visait à comprendre si les formules permettaient de choisir un projet à un juste prix ou si elles favorisaient tout simplement le plus bas soumissionnaire. Les trois formules utilisées dans les contrats publics qui juxtaposent qualité et prix ont été analysées : la formule municipale, la formule provinciale (à paramètre K), et la formule qualité-prix proportionnel utilisée au niveau fédéral.
La recherche a porté sur un échantillon de données couvrant 137 appels d’offres (107 en génie et 30 en architecture) pour lesquels 714 soumissions ont été reçues.
La formule fédérale à « qualité-prix proportionnel », qui attribue 90 % de la note à la qualité et 10 % au prix, s’avère l’approche la mieux équilibrée. Utilisée depuis plusieurs années, cette formule donne à la qualité une importance marquée dans le choix des soumissionnaires et n’avantage pas indûment le prix le plus bas.
La formule « à paramètre K », pour sa part, avait été envisagée par le gouvernement du Québec en 2018 dans son projet de règlement visant à proposer de nouveaux modes d’octroi de contrats publics. Elle favorise dans la très grande majorité des cas le plus bas soumissionnaire.
Enfin, la formule municipale, en place depuis 2002, favorise de façon quasi-systématique le plus bas soumissionnaire, malgré un ajustement effectué par le gouvernement en 2017, avec le projet de loi 122.
Une révision toujours en cours
Cette analyse a été réalisée à la suite du retrait du projet de règlement modifiant le Règlement sur certains contrats de service des organismes publics en 2018 et de la mise en place d’un sous-comité de travail mandaté pour trouver les meilleures règles d’octroi de contrats publics en architecture et en ingénierie.
« Nous croyons que cette étude contribuera aux réflexions des donneurs d’ouvrage publics qui souhaitent s’inscrire dans une approche exemplaire pour favoriser la qualité à toutes les étapes d'un projet », a exprimé André Rainville, président-directeur général de l’AFG.
« La Stratégie québécoise de l’architecture annoncée vendredi dernier par le gouvernement visera l'adoption de pratiques exemplaires dans les projets menés par l'État et la mise en place de mesures incitatives dans les projets qu'il subventionne. Dans cette optique, la recherche d’une formule qui permet de payer le juste prix nous paraît incontournable », a expliqué Lyne Parent, directrice générale de l’AAPPQ.
Sources : Association des Architectes en pratique privée du Québec (AAPPQ) et Association des firmes de génie-conseil – Québec (AFG)