Le secteur québécois des textiles est à des années-lumière de ce qu’il était au début des années 2000. Bien qu’une part de la production demeure dans les textiles conventionnels, l’industrie est en train de changer et elle se met à l’heure des nouvelles technologies. Pour ce faire, elle s’est alliée avec des chercheurs pour développer de nouvelles clientèles et mettre au point des produits novateurs. Elle a fait le pari audacieux de miser sur les textiles techniques et à valeur ajoutée. Toutefois, la bataille s’annonce ardue, notamment en raison de la rareté de main-d’œuvre. Par ailleurs, la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) pourrait faire perdre des avantages acquis lors de la négociation précédente et elle menace les gains faits par les entreprises québécoises sur le marché américain. L’industrie québécoise est passée en mode offensif et le secteur du textile a un nouveau visage. Il a avantage à être connu.

Le secteur des textiles1 (usines de textiles et usines de produits textiles) a passablement changé depuis le début du millénaire. Plusieurs événements l’ont amené à redéfinir ses activités et à mettre le cap sur la technologie et les produits de niche. Parmi ceux-ci, on note, en 2003, la décision du Canada d’exempter de tous les quotas et tarifs les 48 nations les moins avancées économiquement. Fait à noter, l’industrie textile était une des forces majeures de ces pays. Par ailleurs, au 1er janvier 2005, la période de transition pour la réduction des contingents (quotas) d’importation dans les textiles et les vêtements, selon les accords de l’Organisation mondiale du commerce, est venue à échéance. C’est donc dire que le Canada ne pouvait plus protéger son industrie comme elle l’avait fait dans le passé et que cette dernière se trouvait en position défensive face à ses compétiteurs.

Ces changements dans les règles commerciales ne sont pas venus seuls. En parallèle, l’industrie d’ici a dû composer avec un avivement de la concurrence et l’appréciation rapide du dollar canadien. Cette déferlante de facteurs a considérablement nui aux usines québécoises et a littéralement sapé le marché intérieur ainsi que les marchés d’exportation des producteurs d’ici. Les signes de la débâcle qu’a subie l’industrie textile québécoise sont bien visibles. Le nombre de travailleurs a passablement diminué entre 2001 et le début de la décennie 2010 (graphique 1). Les pertes les plus importantes ont été observées du côté des usines de textiles. On note cependant une stabilité du nombre de salariés depuis les années 2010. Au chapitre du PIB, on constate également une dégringolade qui s’est estompée à compter de 2010 notamment (graphique 2 à la page 2). Il y a même une remontée en 2014 et en 2015. Le secteur des textiles, qui a été un des piliers du secteur manufacturier québécois pendant de nombreuses décennies, a encaissé le coup et a procédé à une mutation. La production textile de masse a été abandonnée au profit de produits spécialisés destinés à des usages précis. L’industrie s’est prise en main. Une grande réflexion a été entamée à l’échelle canadienne pour réorienter la production vers les textiles techniques et à valeur ajoutée. Les détails sur ces développements viendront dans les prochaines sections.

L’état des lieux

Combien d’entreprises œuvrent désormais dans le secteur du textile au Québec? Selon Statistique Canada, on en comptait 297 en décembre 2016 (tableau 1 à la page 3). Il y en avait davantage dans les usines de produits textiles (182). C’est un milieu de PME, dont la très grande majorité embauchait moins de 20 employés (70,4 %). Seulement six emplacements accueillaient plus de 200 travailleurs. On dénombrait un peu plus de 6 500 salariés en 2016, en moyenne (3 548 dans les usines de textiles et 2 974 dans les usines de produits textiles).

Historiquement, trois régions québécoises concentrent une part importante des industries et de la main-d’œuvre de l’industrie du textile : Montréal, Montérégie et Chaudière-Appalaches. Cela ne signifie pas pour autant que l’industrie n’est pas présente ailleurs sur le territoire. C’est ainsi que jusqu’à tout récemment, le Québec comptait trois créneaux d’excellence issus de la démarche ACCORD2 . Ceux-ci étaient répartis dans les régions de la Montérégie (Matériaux souples avancés), Chaudière-Appalaches (Matériaux textiles techniques) et le Centre-du-Québec (Textiles techniques). Ces trois créneaux ont été fusionnés en un seul au cours de l’été 2017 afin de mieux coordonner l’action.

Un plan de match ambitieux

Dans la foulée de la débâcle qui a touché le secteur du textile, au début des années 2000, toute l’industrie canadienne a fait un bilan des forces en place. Elle s’est penchée sur une stratégie pour sauver ce pan de l’économie. Il en a résulté un plan de match audacieux, la « Carte routière technologique de l’industrie canadienne des textiles techniques et autres textiles à valeur ajoutée ». C’est ainsi que l’on a pu canaliser les énergies et identifier les créneaux qui pourraient permettre à l’industrie canadienne de se différencier de ses concurrents afin d’assurer sa pérennité.

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