SAGUENAY - Plusieurs organismes de diverses sphères de l'économie ont réagi de façon plutôt favorable au budget fédéral 2021-2022 présenté par la ministre des Finances, Chrystia Freeland.
Selon le Conseil du patronat du Québec (CPQ), en prévoyant investir dans les infrastructures, le développement des technologies vertes et des incitatifs pour le virage numérique des entreprises, le gouvernement s'assure de jouer sur tous les niveaux. « Avec la crise sanitaire qui pèse toujours sur notre économie, le gouvernement fédéral vise juste avec les programmes d'aide aux entreprises, notamment les prolongements de la Subvention salariale d'urgence et de l'aide d'urgence pour le loyer, de même que la création du Programme d'embauche pour la relance. Quant aux sommes significatives en innovation et en initiatives vertes, elles sont d'excellents signaux en faveur de la relance économique. Avec ce budget, on prépare clairement le terrain pour la reprise que nous souhaitons tous », explique Karl Blackburn, président et chef de direction du CPQ.
La Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) applaudit également plusieurs mesures du budget 2021 du gouvernement du Canada, comme le prolongement des mesures d'urgences pour les entreprises, notamment la Subvention salariale et la Subvention d'urgence pour le loyer. « Le prolongement de trois mois supplémentaires des subventions salariales et au loyer est bienvenu. Il nous semble cependant évident qu'une autre prolongation sera nécessaire. De moins en moins d'entreprises en auront besoin, grâce à la campagne de vaccination qui permettra éventuellement la levée des restrictions sanitaires, mais il est important de garantir ce filet de sûreté à celles qui auront moins de chances. Nous nous attendons à ce qu'un soutien gouvernemental prolongé leur soit offert et annoncé rapidement pour permettre la rétention d'une main-d'œuvre aguerrie », a affirmé Charles Milliard, président-directeur général de la FCCQ.
Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) tient de son côté à féliciter le gouvernement fédéral d'avoir reconnu le secteur manufacturier comme étant un fondement de la nouvelle économie durable.
« Plusieurs initiatives positives annoncées aujourd'hui permettront au secteur manufacturier québécois de tirer son épingle du jeu. Le défi pour le gouvernement fédéral est maintenant de s'assurer que ces programmes soient rapidement accessibles aux entreprises qui sont souvent trop découragées en raison de la complexité de ces derniers. Il faut s'assurer que le gouvernement livre la marchandise et facilite l'accès à ces mesures, afin que les entreprises puissent en bénéficier rapidement », affirme Véronique Proulx, présidente-directrice générale de MEQ
Parmi ces mesures positives, notons notamment :
- des investissements massifs dans le Fonds stratégique de l'innovation, notamment en ce qui concerne l'appui au secteur de l'aérospatial et le renforcement du secteur de la biofabrication et des sciences de la vie du Canada;
- l'extension de la subvention salariale;
- l'aide à la transition des entreprises vers le zéro émission net;
- l'accompagnement vers l'adoption de la technologie pour accélérer la productivité et la croissance.
Innovation
Le CPQ considère que l'innovation sort grande gagnante de ce budget, puisque les sommes qui soutiennent les investissements sont aussi substantielles que diversifiées. Plus de 11 milliards permettront d'aider les petites et moyennes entreprises à entrer dans l'ère numérique et à tirer parti de nouvelles possibilités technologiques; ces montants aident aussi à la recherche et l'innovation et à soutenir l'économie numérique.
Le CPQ note positivement les mesures pour le secteur aérospatial qui totalisent 2 milliards par le biais du Fonds stratégique pour l'innovation et de l'Initiative de relance régionale pour l'aérospatial. Bien que les besoins soient énormes après l'année de profondes turbulences, ces sommes représentent clairement une bouffée d'air pour les entreprises de ce secteur hautement stratégique pour le Québec.
« Le gouvernement a bien compris l'importance de soutenir les PME. L'annonce d'un investissement de 1,4 milliard de dollars destinée à soutenir le virage technologique de nos entreprises vient compléter les sommes annoncées par le gouvernement du Québec. Nous avions par ailleurs insisté sur l'importance d'assurer la prolongation des mesures d'aide pour les entreprises. Nous saluons la décision de la ministre de prolonger jusqu'en septembre la Subvention salariale d'urgence et la Subvention d'urgence du Canada pour le loyer, ainsi que la création d'une nouvelle mesure pour soutenir les embauches jusqu'en novembre prochain. Il est clair que cette aide ciblera inévitablement les PME qui sont encore durement affectées et qui n'ont pas redémarré pleinement leurs activités », a déclaré Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
Tourisme et aéronautique
De nouvelles enveloppes destinées aux secteurs de l'aéronautique et du tourisme totalisant respectivement 2 G$ et 1 G$ sont annoncées. Ces deux secteurs économiques ont été particulièrement affectés par la crise de la COVID-19. « Les investissements annoncés pour notre industrie aéronautique ainsi que pour nos festivals et nos entreprises touristiques constituent un signal important pour les entreprises de ces secteurs. Même si les temps sont durs depuis le printemps 2020, la prospérité reviendra. D'ici le retour de la clientèle, c'est un bon moment pour investir dans la modernisation des installations et le développement de nouveaux produits. Le Québec a une main-d'œuvre d'une qualité exceptionnelle ainsi que de formidables attraits touristiques. L'aide annoncée aujourd'hui devra être versée rapidement et de manière équitable pour tous les joueurs de l'industrie afin de permettre une reprise des activités aussi rapide que possible », a souligné Charles Milliard.
Emploi et formation
En main-d'œuvre, la FCCQ considère que le gouvernement a répondu favorablement à plusieurs demandes du milieu des affaires en annonçant divers incitatifs pour favoriser le retour en emploi de nombreux travailleurs ayant quitté le marché du travail au cours de la dernière année. La bonification de l'Allocation canadienne pour travailleurs et le programme d'embauche pour la relance économique du Canada, la bonification des soutiens pour développer des opportunités d'emplois pour les étudiants et jeunes diplômés viendront aider les entreprises à embaucher de la main-d'œuvre compétente.
« Nuage gris à l'horizon, aucun plan n'est présenté dans le présent budget afin de faire face au déficit important que la présente pandémie a amené au régime d'assurance-emploi. Les entreprises craignent le choc tarifaire important qui surviendra en 2022, lorsque le moratoire sur les taux de cotisations au régime d'assurance-emploi prendra fin. Le directeur parlementaire du budget avait estimé à plus de 50 G$ le déficit à combler en quelques années, avant la prise en compte des diverses bonifications annoncées et envisagées par le gouvernement fédéral », a a toutefois insisté M. Milliard.
MEQ estime que, si le programme d'embauche pour la relance économique du Canada est une bonne idée, il vise tout d'abord la création d'emploi, alors que le bassin de travailleurs n'est actuellement tout simplement assez grand pour répondre aux besoins du secteur. Par ailleurs, le gouvernement fédéral n'a pas apporté de modification au programme des travailleurs étrangers temporaires qui est complexe et fastidieux. Il faut s'assurer de le simplifier et de le rendre plus agile selon les besoins. Il faut également modifier la limite de 10% par usine, qui cause un casse-tête aux manufacturiers.
« Avec ce budget, l'éléphant dans la pièce est certainement le manque de mesures pour pallier la pénurie de main-d'œuvre. Les manufacturiers québécois cumulent déjà un retard important en termes de productivité et avec plus de 17 500 postes vacants dans le secteur, le manque de travailleurs sera certainement un des plus grands freins à une croissance durable. Le gouvernement du Québec et celui du Canada doivent travailler ensemble afin que le secteur manufacturier ait les travailleurs dont il a besoin », déclare Mme Proulx.
Relance verte
Selon le CPQ, le virage proposé en faveur de l'économie verte donne une impulsion considérable aux entreprises. Les montants prévus dépassent les 18 milliards et englobent une vaste série de mesures structurantes, dont 8 milliards de dollars sur sept ans pour appuyer des projets de décarbonisation. Notons également le soutien aux entreprises qui développent des technologies à zéro émission, qui bénéficieront d'une réduction de 50 % de leur taux d'imposition.
L'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec (APCHQ) a tenu à saluer l'annonce du gouvernement fédéral qui mise sur la rénovation écoénergétique des habitations canadiennes comme élément nécessaire de la reprise économique, d'autant plus que l'Association recommande depuis plusieurs années d'investir, entre autres, dans des mesures efficaces visant à soutenir la rénovation écoresponsable pour contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). « Nous accueillons positivement le signal envoyé par le gouvernement voulant que le secteur de l'habitation ait un rôle clé à jouer dans la relance de l'activité économique et de la lutte aux changements climatiques au Canada. Avec l'initiative Maisons plus écologiques, et maintenant avec des prêts sans intérêt pour des rénovations améliorant l'efficacité énergétique pouvant atteindre jusqu'à 40 000 $, le gouvernement fédéral a choisi de stimuler les programmes d'efficacité énergétique qui, comme nous le savons, ont un impact significatif auprès des Québécois et permettent au secteur de l'habitation d'apporter sa contribution aux objectifs de réduction des GES », commente François Bernier, vice-président principal Affaires publiques à l'APCHQ.
Dans le contexte actuel, l'APCHQ croit qu'il est important que tous les secteurs participent à la reprise économique. L'Association note que la mesure fédérale Maisons plus écologiques s'adresse au secteur privé résidentiel, ce qui apporte un complément aux mesures provinciales tournées vers la construction d'immeubles et les grands projets publics. « Les derniers mois ont été marqués par un fort volume de reventes, un élément précurseur de nombreux projets de rénovation pour les prochaines années. Dans ce contexte économique particulier, l'APCHQ considère qu'il était important de ne pas rater l'opportunité écoénergétique alors que les projets de rénovation tendent à se matérialiser. C'est l'occasion d'isoler et de changer les fenêtres au lieu de dépenser l'ensemble du budget sur des éléments utiles, mais sans apport écoénergétique », soutient François Bernier.
Des enjeux à surveiller
Bien qu'une analyse plus approfondie demeure nécessaire, le CPQ apporte certaines nuances à sa première lecture du budget. D'abord, il déplore que la Prestation canadienne de la relance économique (PCRE) prolongée de 12 semaines ne soit pas assortie d'incitatifs à court terme pour la formation et le retour au travail. Toutefois, les nouvelles possibilités de formation et d'emploi pour les jeunes et les travailleurs en 2021 sont intéressantes. Une mise en garde est aussi à faire quant à l'impact de la hausse indirecte de l'impôt des grandes entreprises.
De plus, le gouvernement fédéral devra entamer rapidement une réflexion sur le contrôle des déficits et du poids de la dette publique, avec le prolongement de programmes sociaux assez costauds. « Ce budget envoie le bon message aux entreprises. Un éventail de moyens semble à leur disposition pour faire face à la situation exceptionnelle dans laquelle elles se retrouvent. Il faudra s'assurer que le déploiement de ces outils leur permettra d'innover et de saisir les opportunités ici même tout comme à l'international », ajoute Karl Blackburn.
Malgré les milliards de dollars annoncés dans ce budget, la FCCQ se dit pour sa part déçue des montants prévus au budget 2021 pour le projet de train à grande fréquence de VIA Rail entre Québec et Toronto. Ce projet amènerait non seulement une connexion plus rapide entre les villes, mais des gains de productivité pour les employés qui se déplacent régulièrement entre les principales villes, notamment entre Montréal et Québec.