Dominique Savard
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Dominique Savard

N.D.L.R. : Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : « Agriculture et agroalimentaire : les bénéfices d’une approche collaborative » publié dans notre édition du mois de juillet.

SAGUENAY – « L’autonomie alimentaire, c’est quand on essaie de fournir à notre population locale une nourriture de qualité et en quantité suffisante. Ça ne veut pas dire que l’on va nourrir complètement la population avec nos produits, mais qu’on va essayer de la sécuriser. Je compare cela à la volonté de sécuriser une base de l’alimentation qui provient de chez nous et, évidemment, on souhaite que ça soit des produits de qualité », explique Geneviève Parent, professeure titulaire de la Chaire de recherche en droit sur la diversité et la sécurité alimentaire à l’Université Laval.

Mme Parent prend le soin de faire cette distinction comparativement à l’autosuffisance alimentaire qui, elle, ne dépend pas du tout de produits qui viennent d’ailleurs. « Il y a peu d’endroits à travers le monde qui peuvent viser une autosuffisance complète. Cependant, ces deux termes-là, autonomie et autosuffisance, ne sont pas nécessairement contradictoires. On constate qu’il y a plusieurs gouvernements qui vont vers plus d’autonomie alimentaire et, en France, ils ont annoncé que certaines productions vont être complètement autosuffisantes. Pour le reste, ils vont plutôt avoir un objectif d’autonomie alimentaire. »

Toujours selon Mme Parent, l’équilibre semble être la voie que le gouvernement du Québec désire emprunter. « On voit, avec la COVID-19, que le système mondialisé a ses limites et que c’est avec l’autonomie alimentaire qu’on peut se préparer à y faire face. Bien avant la COVID, les grandes organisations internationales qui s’occupent de l’agriculture et de l’alimentation au sein des Nations Unies nous invitaient déjà à repenser davantage au système alimentaire de manière pré territorialisé pour toutes sortes de raisons comme la protection de l’environnement ainsi que la santé de la population et la vitalité économique des régions.

« À travers les grands mouvements de libéralisation des échanges qu’on a connus depuis le milieu des années 90, on a oublié un peu notre système alimentaire territorialisé et l’idée, c’est d’y revenir, de bien les encadrer, de bien promouvoir les produits de chez nous, de sensibiliser aussi les consommateurs. Il faut savoir que quand ils achètent chez nous, oui ils risquent de manger des produits de plus grande qualité et, en plus, ils encouragent l’économie de la région, ils créent des emplois, etc. Les choix que l’on fait ont un impact bien important en matière d’alimentation et encore plus dans les régions à grand potentiel agricole et alimentaire comme le Saguenay–Lac-Saint-Jean », soutient la professeure titulaire à la Faculté de droit de l’Université Laval.

Geneviève Parent souligne également que l’on prône beaucoup l’autonomie alimentaire, mais il faut trouver comment faire pour que ce soit viable. Elle avoue que l’identification des produits, notamment avec Zone boréale dans la région, ou le Panier Bleu et Aliments du Québec, permet de se différencier des produits d’ailleurs et laisse à croire que le Québec vise une plus grande autonomie alimentaire.

« On peut en faire définitivement plus, notamment à travers des serres, mais aussi quand on demande à nos agriculteurs de produire plus durablement. Toutefois, c’est comme si on oubliait qu’ils sont pris dans une panoplie de contrats, de liens contractuels, d’obligations de produire, d’être concurrentiels. Il n’y a aucun agriculteur qui est contre le fait de produire de façon plus durable pour l’environnement et pour notre santé, mais encore faut-il qu’ils aient les moyens de cette transition. »

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