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Maxime Hébert-Lévesque

SAGUENAY – La vision de la SADC du Haut-Saguenay (SADC HS) est planifiée sur un horizon allant jusqu’en 2035. À titre d’animateurs du territoire, les gestionnaires de l’organisme ont identifié deux grands chantiers à mettre de l’avant : accompagner les entreprises dans la transformation numérique et appuyer les projets en lien avec l’économie circulaire. Deux enjeux bien présents dans le secteur de l’agriculture.

« Planifier notre vision sur le long terme a été payant. Nous avions identifié les enjeux déterminants pour l’avenir avant 2020. Lorsque la pandémie de COVID-19 a frappé, non seulement nous n’avons pas eu à modifier nos plans, mais la situation a accéléré les entreprises à emboîter le pas vers les solutions 4.0 et vers l’optimisation des déchets », remarque André Boily, directeur général de la SADC HS.

Le territoire de la SADC HS couvrant plusieurs municipalités au nord et au sud de la rivière Saguenay, grand nombre de PME s’y trouvant font partie de la filière agroalimentaire et agricole. Un secteur industriel qui a des besoins technologiques pour, entre autres, limiter les dommages causés par les changements climatiques et la rareté de main-d’œuvre. L’organisme fédéral, dans sa stratégie à long terme, a donc placé deux ressources à la tête de départements dédiés à l’implantation 4.0 et à l’économie circulaire.

Une agriculture en temps réel

Simon Gagné est éco-conseiller et responsable à la SADC HS d’accompagner les PME ayant un besoin technologique. « Il ne s’agit pas d’implanter pour implanter. La première étape consiste à évaluer la dette technologique qu’a une entreprise avant de lui proposer une solution. Nous ne recommanderons pas un système de gestion intelligent à des gestionnaires ou des propriétaires n’ayant aucune connaissance informatique », explique M. Gagné. Pour le conseiller en technologie, le 4.0 est synonyme d’efficacité, d’optimisation et de réduction d’action à valeur non ajoutée.

« Il y a plusieurs secteurs où le numérique peut apporter des avantages, comme en gestion, en ventes, etc. Mais à terme, ce sont les outils de suivi qui sont intéressants pour les producteurs : par exemple, de pouvoir suivre son champ en temps réel grâce à des capteurs. À partir d’un poste de commande, l’agriculteur peut voir le taux d’humidité, la croissance et même le pH de son sol. Il peut alors prévenir les maladies, les infections et les pertes. » De plus, ce type de système évite les déplacements fréquents au champ et l’attente de résultats d’un laboratoire. Des gains qui se répercutent sur la valeur finale des produits selon M. Gagné.

La donnée au cœur de l’optimisation

Les outils de suivi couplés à l’automatisation des tâches et à l’implantation de logiciels de gestion intelligente représentent un changement de paradigme au même titre que l’arrivée de l’électricité au début du siècle dernier. « Il y a une grande demande de la part des PME pour implanter des outils de collectes de données efficaces. C’est le nerf de la guerre : plus tu es en mesure de contrôler ton processus de bout en bout, plus tu réalises des économies et plus tu améliores ta qualité », conclut Simon Gagné. Présentement, la SADC du Haut-Saguenay a établi un partenariat avec Colab du Collège d’Alma et espère rejoindre l’ensemble des collèges de la région afin de monter une expertise, un HUB, en lien avec les possibilités qu’offrent les technologies. À l’automne, on compte également réaliser un sondage auprès des PME localisées sur le territoire de la SADC pour connaître leur intérêt sur le 4.0.

Bien plus que des déchets

Parmi les différentes stratégies englobées dans ce qu’on appelle l’économie circulaire, celle de l’écologie industrielle est souvent retenue. Il s’agit d’un partenariat entre deux ou plusieurs producteurs où l’un vend ses rebuts à l’autre qui les réutilise.

« Nous travaillons présentement avec des épiceries, des maraîchers ou encore des restaurateurs pour récupérer les aliments jugés périmés selon les critères du MAPAQ. Cette nourriture classée comme impropre à la consommation humaine est utilisée pour nourrir des animaux. Ainsi, un producteur de cerf rouge de la région nourrit ses bêtes avec des patates. Le producteur de pommes de terre retire un revenu de ses pertes et le déchet n’est pas enfoui », explique Felipe Soto, responsable en économie circulaire à la SADC.

Pour M. Soto, son travail consiste donc à faire des activités de maillages afin de créer des partenariats et de répertorier qui jette quoi et quand. « Il y a un travail d’éducation à faire. Il faut expliquer aux entreprises qu’il y a peut-être de la valeur dans leurs déchets. Le défi est de créer des symbioses industrielles. Des acteurs qui se complètent dans la chaîne de vie d’un matériel. »

Économie de fonctionnalité, l’art de louer

Économie circulaire et implantation de technologies 4.0 sont intimement liées et c’est le cas avec une tendance de plus en plus présente dans les secteurs industriels. L’économie de fonctionnalité consiste à vendre l’utilisation d’un produit plutôt que l’objet en tant que tel.

« Bixi à Montréal est un bon exemple d’économie de fonctionnalité. L’entreprise ne vend pas des vélos, elle vend des déplacements à vélo. Le véhicule ne reste jamais garé très longtemps, son utilisation est optimisée et un besoin est comblé sans qu’un nouveau véhicule soit ajouté dans le réseau », explique Simon Gagné.

Pour les deux conseillers de la SADC, l’économie de fonctionnalité est également une solution pour améliorer la qualité des produits. « En conservant les droits de propriété sur l’objet, l’entreprise peut récolter des données sur son fonctionnement et poursuivre de façon continue son développement. De plus, en observant l’utilisation du client sur son produit, elle peut personnaliser le service rendu ». C’est donc un véritable paradigme de service qui s’installe au détriment de la vente de bien traditionnel. Une nouvelle façon de faire aux multiples avantages. « La location permet souvent d’accéder à des outils dispendieux que les PME ne pourraient pas acquérir. De plus, en n’étant plus propriétaire de certaines pièces ou engins, l’entreprise locatrice peut se concentrer davantage sur ce qu’elle sait faire et ne pas dépenser son temps sur des tâches connexes énergivores », terminent Simon Gagné et Felipe Soto.

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