Journal Décembre 2021-V2

Pa g e 8 | D É C EMB R E 2 0 2 1 I N F ORME A F FA I R E S , L E ME N S U E L É CONOM I QU E D ’ I C I MASHTEUIATSH – Mélanie Paul, co-présidente et directrice géné- rale d’Akua Nature et présidente d’Inukshuk Synergie, a vécu une expérience d’échange et de colla- boration au récent concours Pow Wow Pitch , mettant en lumière des entrepreneurs autochtones. Ces deux notions font d’ailleurs partie intégrante de la vision de la femme d’affaires de Mashteuiatsh, qui souhaite créer des ponts entre les communautés. Le parcours du Pow Wow Pitch, lors duquel Akua Nature a remporté la 1 ere position au Québec et la 8 e en Amérique du Nord, a offert une belle visibilité à l’entreprise. Il a surtout permis à Mme Paul de tisser des liens et de développer des partena- riats avec d’autres entrepreneurs autochtones. « Dans les entreprises autochtones, la mentalité n’est pas axée sur le capitalisme, mais plutôt sur la communauté, les retombées socia- les. Je n’ai pas senti de compétition. Il s’agissait plutôt de créer un levier, un partage, des relations d’affaires. […] Ça m’a permis de voir ce qui se fait ailleurs, de développer des partena- riats. C’est une porte ouverte vers d’autres régions », raconte la femme d’affaires, qui œuvre aussi au sein de l’entreprise familiale, Groupe ADL, depuis une vingtaine d’années. Mélanie Paul explique qu’Akua Nature, qui se spécialise dans la fabrication et le développement de produits cosmétiques et de santé uti- lisant les propriétés médicinales de la pharmacopée traditionnelle des Premières Nations, possède sa pro- pre usine pour la conception de ses produits. Elle aimerait faire bénéficier d’autres entreprises autochtones de ses installations, en fabriquant par exemple leurs produits en sous- traitance. Mocassins et Talons hauts Cette vision de partage et de collabo- ration, qui est derrière le modèle de ses entreprises, habite la dynamique entrepreneure au quotidien. C’est ainsi qu’elle travaille, avec la femme d’affaires bien connue Danièle Henkel, au lancement du cercle Mocassins et Talons hauts. « Nous voulons rassembler des femmes entrepreneures autochtones et allochtones de partout au Québec afin Mélanie Paul: créer des ponts entre les communautés Mélanie Paul, Présidente d’Inukshuk Synergie et coprésidente et directrice générale d’Akua Nature. (Photo : Courtoisie) INSPIRATION par Karine Boivin Forcier kbforcier@informeaffaires.com Roger Boivin est issu d’une famille d’entrepreneurs établie à La Baie depuis sept générations. Sa carrière de plus de trente ans en développement économique l’a amené à oeuvrer aux niveaux municipal, régional, québécois et canadien. Depuis 10 ans, il est président du Groupe Performance Stratégique, une firme spécialisée en développement économique, communications et conseils stratégiques. À ce titre, il a été au coeur de la stratégie «ON Y VA» des travailleurs d’ALCAN ayant conduit à l’établissement au Saguenay de l’usine AP-60, il a contribué significativement à la stratégie ayant conduit au redémarrage de la papeterie de Dolbeau-Mistassini et a recruté la compagnie Américaine Century Aluminium qui a récemment étudié le projet d’implanter une aluminerie dans la MRC Maria-Chapdelaine. QUÉBEC-RAIL ET LE SAGUENAY-LAC-ST-JEAN NOTRE RÉGION À LA CROISÉE DES CHEMINS…DE FER! Le 17 novembre dernier, devant la Chambre de Commerce Saguenay-le-Fjord, le président de la Table Régionale des Élus du Saguenay-Lac-St-Jean, M. Gérald Savard, a interpellé le Ministre de l’Économie du Québec, M. Pierre Fitzgibbon, sur un sujet brûlant de pertinence et d’actualité pour notre région : Pourquoi le gouvernement du Québec finance-t-il, avec celui du Canada, la réalisation d’une étude de 15 millions $ pour valider la faisabilité technico- économique du projet Québec-Rail? LE PROJET QUÉBEC-RAIL Initié au début de 2018 par la communauté de Baie- Comeau, Québec-Rail vise à relier le port de Baie-Comeau au réseau de chemin de fer de l’Amérique du Nord, via la construction de 370 km de nouveaux rails entre Baie-Comeau et Dolbeau-Mistassini. La réhabilitation et l’amélioration des capacités de divers autres tronçons ferroviaires entre l’Abitibi-Témiscamingue et Dolbeau- Mistassini seront également nécessaires. Le coût du projet est estimé à 2 milliards $. L’étude de faisabilité sera complétée en juin 2023. Québec-Rail se donne ensuite un an et demi pour compléter son financement et compte débuter les travaux dès 2025. Pour le promoteur, ce projet présente plusieurs avantages importants pour le Québec et le Canada. Premièrement, il crée un nouvel accès maritime via un port en eau profonde ouvert à l’année, libre des aires protégées des mammifères marins du Saguenay/St-Laurent et hors des contraintes de navigation de la voie maritime du St-Laurent (ce qui entre directement en concurrence avec les ports du Saguenay-Lac-St-Jean). Deuxièmement, il diminue le temps de transport en train et libère du trafic ferroviaire qui transite actuellement via l’axe Windsor-Québec. Troisièmement, il contribue à structurer un réseau de transport efficace sur le territoire du plan Nord, dont les ports du Saguenay-Lac-St-Jean sont bizarrement exclus… Quatrièmement, il vise à accroître la sécurité du transport ferroviaire des produits dangereux (pétrole?), par la construction d’un nouvel axe éloigné des milieux densément habités et loin des zones environnementales sensibles. QUÉBEC-RAIL ET LE SAGUENAY-LAC-ST-JEAN La réalisation de Québec-Rail fournira une alternative de transport, notamment à deux importants projets cruciaux pour la relance et la diversification économique du Saguenay-Lac-St-Jean : Arianne Phosphate et Black Rock. En effet, le nouveau chemin de fer passera à proximité de la future mine d’Arianne au Lac-à-Paul. Son utilisation, couplée à des installations portuaires localisées à Baie- Comeau, réduirait considérablement les coûts d’opérations d’Arianne. En effet, dans l’état actuel du projet, Arianne prévoit opérer elle-même une flotte de camions lourds nécessitant l’embauche dans notre région de 125 camionneurs. À partir du moment où le transport par train devient disponible, une réévaluation de ce système d’expédition par route deviendra inévitable. Quant à Black Rock (277 nouveaux emplois directs à 85 000 $ par an au Saguenay-Lac-St-Jean), la même réévaluation sera certainement réalisée. En plus de ces deux projets connus, la réalisation de combien d’autres, actuellement en évaluation ou qui pourraient voir le jour au Saguenay-Lac-Jean, sera compromise par la concrétisation de Québec-Rail? La situation économique régionale est déjà préoccupante. Depuis 1986, nous avons perdu 23 500 habitants et d’ici 20 ans nous en perdrons encore 15 500 autres. Plus de 40 % de nos emplois manufacturiers ont disparus depuis 20 ans (une diminution deux fois plus rapide que celle observée ailleurs au Québec). Le revenu moyen d’emploi dans la région est passé de 108,7 % de la moyenne du Québec en 1986, à 91,8 % en 2020 (un recul de près de 20 %). Mais nous avons réagi vigoureusement pour relancer et diversifier notre économie, avec des projets porteurs comme Arianne, Black Rock ou GNL Québec. Pourtant, le gouvernement du Québec a refusé GNL Québec, un projet de transition énergétique de plus de 12 milliards $, dont l’Europe aurait pourtant bien besoin selon l’actualité récente ! Et maintenant, nos deux gouvernements financent l’étude de mise en place d’un nouveau chemin de fer destiné à nous concurrencer directement comme région d’accueil d’Arianne ou de Black Rock! Quant à notre industrie de l’aluminium, les gouvernements ont aussi décidé de financer son auto- matisation et la nouvelle technologie Elysis, qui conduisent, comme l’a confirmé sans appel M. Jean Simard de l’Association Canadienne de l’Aluminium, à plus de profits, mais à moins d’emplois pour nous. Prudent, M. Fitzgibbon a répondu à M. Savard que le gouvernement voulait d’abord connaitre toutes les données avant d’autoriser le projet Québec-Rail. Il reste cependant à espérer que, cette fois-ci, nos gouvernements tiendront enfin compte des impacts de leurs décisions sur notre région et son avenir…

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