Journal Août 2021

I N F ORME A F FA I R E S , L E ME N S U E L É CONOM I QU E D ’ I C I AOÛ T 2 0 2 1 | Pa g e 3 5 l’avance, c’est très difficile. […] On a fait les démarches. C’est pratique- ment impossible actuellement », déplore-t-il. Les accords commerciaux, un défi Cette pénurie de main-d’œuvre vient se cumuler à un autre défi, soit celui des accords de libre-échanges signés au cours des cinq dernières années, soit l’Accord de Partenariat transpaci- fique global et progressiste (PTPGP), l’Accord économique et commercial global Canada–Union Européenne (AECG) et l’Accord Canada–États- Unis–Mexique (ACEUM). Ces accords, qui représentent 10 % du marché lai- tier, viennent accaparer une part importante de la croissance anticipée de ce marché, notamment dans les fromages fins. Ils s’ajoutent aux 8 % du marché déjà accordés à l’importa- tion. « On a doublé l’accès au marché canadien en l’espace de quelques années », précise Mathieu Frigon, président et chef de la direction de l’Association des transformateurs lai- tiers du Canada. Il mentionne que l’industrie de la transformation laitière totalise 25 000 emplois directs au Canada. « Les parts de marché accordées, c’est l’équivalent de la production de 15 à 20 fromageries de taille moyenne. […] On parle de 300 M$ par an en pertes pour les transformateurs lai- tiers annuellement, quand les accords seront pleinement mis en œuvre », ajoute-t-il. « L’Europe, ce sont 16 millions de kilos, c’est 15 entreprises comme la fromagerie Saint-Fidèle. C’est l’équivalent de toute la production de lait du Saguenay–Lac-Saint-Jean qui rentre », renchérit Luc Boivin. Ils ont également un effet sur les prix, puisqu’ils sont souvent importés à un prix bien en deçà de ceux des froma- ges canadiens. « Par exemple, il y a des fromages importés d’autres pays dont le prix correspond au prix auquel les transformateurs de fromage au Canada achètent le lait. Ça a déstruc- turé les prix sur les marchés domesti- ques de gros », illustre M. Frigon, précisant que le prix de base du lait au Canada est déterminé par le sys- tème de la gestion de l’offre. Peu propice aux investissements M. Frigon explique que cette situation crée un environnement défavorable à l’investissement. « Souvent, si tu as un grave problème de main-d’œuvre, tu vas regarder pour faire des inves- tissements pour automatiser pour maintenir la cadence de production avec les travailleurs qui sont disponi- bles. Le problème, c’est que ça prend des capitaux, ce ne sont pas des petits investissements et l’environne- ment d’affaires, ces dernières années, est peu propice aux investissements. Il y a donc un lien entre les accords de libre-échange et la pénurie de main-d’œuvre », estime-t-il. Luc Boivin considère pour sa part que la pénurie de main-d’œuvre diminue la productivité des entreprises de transformation laitière québécoises, nuisant à leur positionnement par rap- port aux entreprises étrangères qui exportent leurs produits sur le marché canadien grâce aux accord commer- ciaux. « Les États-Unis sont très com- pétitifs et productifs en raison de leurs travailleurs immigrants. […] Ça crée beaucoup de pression sur les trans- formateurs laitiers et ça a un impact sur les marges dans ce secteur », estime-t-il. L’entrepreneur de Saguenay croit que les compensations offertes aux entre- prises par le gouvernement fédéral en compensation pour ces accords sont beaucoup trop faibles pour véritable- ment avoir un impact positif. De son côté, Mathieu Frigon admet que ces annonces ont compensé une très faible partie des pertes occasionnées par ces accords. Consolidation et repositionnement En raison de ces différents défis, on assiste à un repositionnement de l’industrie. Selon Luc Boivin, le sec- teur vit une période de consolidation, notamment avec l’achat d’entreprises par d’autres ou le délaissement de catégories de produits. Les entrepre- neurs misent sur les produits offrant une valeur ajoutée. Plusieurs entreprises du secteur s’inté- ressent également de plus en plus aux produits non laitiers, comme les laits, fromages et yogourts végétaux. « C’est un secteur en croissance. Le secteur de la transformation laitière regarde pour des investissements stratégiques dans ces domaines-là », souligne M. Boivin. Selon Mathieu Frigon, il s’agit d’un sec- teur de niche, mais qui connaît une très forte croissance, ce qui peut intéresser les propriétaires d’entreprises de trans- formation laitière, qui sont avant tout des entrepreneurs et peuvent voir des opportunités dans ce créneau connexe qui attire les capitaux. Inf. : atlc-dpac.ca Profitez d’accompagnement, de mentorat et d’aide financière pour le démarrage ou la consolidation de votre nouvelle entreprise. desjardins.com/creavenir CRÉ AVENIR , un programme pour les entrepreneurs de 18 à 35 ans Concrétisez votre projet d’entreprise

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