Journal Février 2020

I N FORME A F FA I RE S , L E MENSUE L ÉCONOM I QUE D ’ I C I F É VR I ER 2 0 2 0 | P a g e 3 3 L’ALUMINIUM OUBLIÉ DANS L’ACEUM Le nouvel accord de libre-échange, appelé ACEUM (Accord Canada/États-Unis/Mexique), prévoit une augmentation du contenu nord-américain de 62,5 % à 70 % pour l’industrie de l’automobile. Un amendement de dernière minute est venu définir la définition de contenu «nord-américain» pour l’acier, en introduisant la notion de production dite «régionale», qui exige que tous les procédés de fabrication de l’acier aient lieu sur le territoire de l’une ou l’autre des parties signataires. L’aluminium a malheureusement été exclu de cet amendement. Le Mexique ne produit pas d’aluminium, mais rien ne l’empêche de transformer de l’aluminium primaire, acheté à bas prix en Chine ou ailleurs, de le transformer et de l’exporter aux États-Unis, comme de l’aluminium dit « nord-américain ». De plus, l’inclusion éventuelle du métal gris à cet amendement ne pourra être revue avant dix ans, ce qui à mon avis, compromet gravement la réalisation de plusieurs projets majeurs dans le secteur de l’aluminium au Québec : la Phase 3 de l’aluminerie Alouette à Sept-Îles, la Phase 2 de l’aluminerie Alma, les 16 autres cuves de l’aluminerie AP-60 à Jonquière en plus de l’expansion du centre de coulée de billettes de l’aluminerie Alma. La position de l’AAC Le président de l’Association de l’Aluminium du Canada (ACC) M. Jean Simard, confirme d’ailleurs l’impact de l’ACEUM sur ces projets, en déclarant dans Le Devoir du 10 décembre dernier : «Pour nous, c’est un rendez-vous dans dix ans». Déjà fin 2019, début 2020, nos alumineries commencent à perdre des clients américains. Au total, de 2020 à 2029, en combinant les impacts économiques de la construction (6,242 milliards) et des opérations (10milliards) des projets qui seront compromis, ce sont des investissements/dépenses de 16,242 milliards qui seront éventuellement perdus pour la région et le Québec. Ceux-ci auraient créé/soutenu 60 419 postes, offrant un salaire moyen de 59 775 $/an (soit une rémunération supérieure de 24,9 % au revenu d’emploi annuel moyen pour tous les types de travailleurs au Québec). Ces projets auraient également permis la pro- duction de 829000 nouvelles tonnes/an de l’aluminium le plus écologique de la planète. En effet, l’aluminium du Québec ne génère que 2 tonnes de gaz à effet de serre par tonne produite, versus 18 pour celui produit en Chine. Les projets en péril sont tous localisés au Saguenay- Lac-Saint-Jean et sur la Côte-Nord, les deux régions où la majorité des impacts économiques se seraient réalisés. Par exemple, la grappe des PME de transformation et des équipementiers spécialisés dans l’aluminium compte 101 entreprises et emploie 4183 personnes au Saguenay-Lac- Saint-Jean. La non-inclusion de l’aluminium à l’amendement de l’ACEUM aura donc des impacts importants sur la viabilité économique de toute cette filière de PME régionales. Ces chiffres sont tirés d’une étude du Groupe Performance Stratégique commandée par le comité «Deux villes/Deux alumineries», qui réunit les villes de Saguenay et d’Alma, Promotion Saguenay, la CIDAL, la Société de la Vallée de l’Aluminium, le Syndicat National des Employées de l’Aluminium d’Arvida (SNEAA-UNIFOR) et le Syndicat des Travailleurs de l’Aluminium d’Alma (STAA-METALLO 9490). L’étude a été déposée à Ottawa en janvier 2020. Pour l’avenir de ces projets, de même que des quelque 7 500 emplois existants dans nos usines d’aluminium actuelles, il est impératif qu’Ottawa agisse rapidement pour trouver une solution au problème qu’il a lui-même créé en oubliant d’inclure l’aluminium à l’amendement de l’ACEUM. Il est cependant décevant que la Vice-Première Ministre, M me Freeland, en réponse aux craintes régionales, déclare : « C’est facile de créer une liste des centaines, voire des milliers de choses qui auraient été bien (sic) d’ajouter dans l’entente». Je ne sais pas combien d’autres oublis deM me Freeland dans l’ACEUM feront perdre l’équivalent des 16,2 milliards du Québec? L’aluminium doit avoir le même traitement que l’acier, sinon, imaginons seulement ce que sera devenue notre filière aluminium après 10 ans de non-investissement. Roger Boivin est issu d’une famille d’entrepreneurs établie à La Baie depuis sept générations. Sa carrière de plus de trente ans en développement économique l’a amené à oeuvrer aux niveaux municipal, régional, québécois et canadien. Depuis 10 ans, il est président du Groupe Performance Stratégique, une firme spécialisée en développement économique, communications et conseils stratégiques. À ce titre, il a été au coeur de la stratégie «ON Y VA» des travailleurs d’ALCAN ayant conduit à l’établissement au Saguenay de l’usine AP-60, il a contribué significativement à la stratégie ayant conduit au redémarrage de la papeterie de Dolbeau-Mistassini et a recruté la compagnie Américaine Century Aluminium qui a récemment étudié le projet d’implanter une aluminerie dans la MRC Maria-Chapdelaine. DES RETOMBÉES ÉCONOMIQUES DE 16 MILLIARDS COMPROMISES Impacts économiques combinés sur l’économie du Québec de la CONSTRUCTION ($ de 2019) et des OPÉRATIONS 2020-2029 ($ de 2024) des projets compromis par l’absence de protection de l’aluminium dans l’ACEUM Investissements de 6,242 milliards 10,018 milliards de nouvelles dépenses de 2020 à 2029 Unité de mesure Impacts directs Impacts indirects Impacts induits Impacts totaux Nombre d’emplois (en personnes/année) 23 013 23 801 13 605 60 419 Masse salariale annuelle totale en milliers de $ 1 673 941 1 393 895 543 699 3 611 536 Salaire annuel par emploi en $ 72 739 58 565 39 963 59 775 Revenus du gouvernement du Québec en milliers de $ 436 425 343 236 109 752 889 413 Revenus du gouvernement du Canada en milliers de $ 160 067 123 402 39 767 324 236

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