Journal septembre 2018

28 • SEPTEMBRE 2018 • INFORME AFFAIRES, Le MENSUEL économique d’ici (Suite de la page 26) C’est d’abord sur le plan stratégique que la PME amorce son passage vers Industrie 4.0. Pour les entreprises in- dustrielles, Industrie 4.0 propose trois grandes stratégies d’entreprise : 1- Du côté des PROCESSUS , l’usine 4.0 s’appuie sur l’évolution des mo- des de production, passant de la production de masse à une produc- tion individualisée (lot unitaire). L’ex- ploitation des données alimente des rétroactions, des décisions pour un processus flexible, qui s’adaptent, voire se reconfigurent pour répondre aux besoins du client. Les décisions de production sont ajustées en temps réel. Il s’agit d’une évolution naturelle des technologies actuelles qui, étant plus abordables, se combi¬nent et pro- posent une offre plus grande et moins contraignante dans leur déploiement. Il existe différents niveaux d’intégra- tion de la technologie dans les entre- prises manufacturières et des gains rapides et payants pour ces dernières sont donc possibles. 2-Les PRODUITS connectés per- mettent la collecte de données en temps réels pour une réutilisation im- médiate, ou ultérieure, des données. Ces dernières peuvent être utilisées dans le développement de nouveaux produits ou bien être analysées pour alimenter l’autonomie du produit dans son environnement. On parle alors de produits intelligents. Par exemple, la voiture autonome peut être considé- rée comme un produit intelligent, ca- pable de s’adapter aux aléas de son environnement extérieur. Les don- nées supportent alors l’ajout de nou- velles fonctionnalités au produit. 3- La disponibilité des données ali- mente aussi le développement de nouveaux SERVICES . On tend ici vers une automatisation du service alimentée par des données captées notamment sur les produits. Cette stratégie d’entreprise permet le dé- veloppement de nouveaux marchés pour les industries. Par exemple, un gant de golf connecté à un téléphone intelligent fournit un service à son utilisateur, à l’aide de l’analyse des données de jeu. L’utilisateur obtient des informations et des conseils tech- niques pour améliorer son jeu, le pro- duit se transforme en service. Bien que nous puissions distinguer trois stratégies pour l’entreprise, la différence entre produits intelligents et services peut parfois s’estomper. Ainsi, une classification dans l’une ou l’autre des catégories peut dépendre essentiellement de la stratégie de chaque entreprise. Cette réflexion stratégique ouvre la porte à un autre constat. D’abord, si le terme Industrie 4.0 est réservé au monde de la production, le CEFRIO croit plutôt qu’il peut s’appliquer à l’ensemble de l’économie. En effet, des secteurs comme le commerce de détail, l’agriculture, mais aussi les services sont touchés par Indus- trie 4.0. Des décisions fondées sur des données captées en temps réel, voilà la quête notamment des détail- lants qui souhaitent personnaliser leur effort marketing. C’est aussi celle des fermes plus connectées où, par exemple, les trajets des véhicules et les quantités de fertilisant qu’ils épandent dans les champs peuvent être entièrement optimisés, voire au- tomatisés, en fonction de diverses données (rendement, analyse des sols, météo, etc.). Enfin, mentionnons aussi les banques qui ont recours à des modèles statistiques pour dé- busquer les fraudes sur les cartes de crédit et automatiser des appels de service auprès des clients. Les délais de réclamation en construction : tolérance zéro! Depuis les dernières années, les réclamations de frais, coûts ou dommages engendrés par des demandes d’extras ou par des changements aux conditions d’exécution de travaux retiennent de plus en plus l’attention de nos tribunaux, et plusieurs jugements d’importance en la matière font maintenant jurisprudence au Québec. Au fil de l’évo- lution du droit, plusieurs donneurs d’ouvrage, particulièrement du domaine public, ont choisi d’encadrer plus strictement les coûts admissibles à telle réclamation dans leurs documents d’appels d’offres. Les documents d’appels d’offres contiennent ainsi habituellement une section réservée aux délais et aux procédures permettant à l’entrepreneur de présenter une réclamation de coûts additionnels. Le non-respect de ces procédures de réclamation peut être fatal. C’est la conséquence drastique qu’a appliquée la Cour d’appel à l’entrepreneur Cegerco inc. (Cegerco) dans un jugement récent 1 . Dans ce dossier, Cegerco agissant comme sous-traitant, réclamait à l’entrepreneur général, Les Équipements J.V.C. inc. (JVC), quelque 1,5 million de dollars pour des coûts supplémentaires engagés afin de respecter les délais contractuels causés par des conditions de sols différentes. JVC a elle-même poursuivi la Société d’énergie de la Baie James(SEBJ) en garantie. Selon la procédure contractuelle des documents d’appels d’offres de SEBJ, JVC devait lui transmettre toute réclamation par demande écrite dans les cinq jours de l’événement y donnant lieu, exposant sommairement ses motifs, et lui transmettre sa réclamation détaillée au plus tard trois mois après la réception provisoire des travaux. Comme la réception provisoire a eu lieu le 12 décembre 2008, SEBJ a plaidé que la réclamation de Cegerco de juillet 2009 était donc hors délai. Parmi les arguments en demande, Cegerco a notamment soutenu que la procédure de réclamation à l’appel d’offres de la SEBJ ne lui était pas opposable comme sous-trai- tant, et que la réception provisoire avait eu lieu plus tard. En première instance, la Cour a conclu que si une lettre transmise par JVC exposant les conditions de terrain différentes était suffisante pour constituer la réclamation som- maire prévue à la procédure contractuelle, elle ne pouvait toutefois constituer la récla- mation détaillée exigée dans le délai de trois mois de la réception provisoire de travaux dont la date originale fut maintenue. La Cour d’appel a confirmé ce jugement, et réitère : «Il est impératif que les procédures contractuelles de réclamation en cas de différend soient respectées afin que le donneur d’ouvrage puisse être informé des problèmes d’exécution du contrat et décider des remèdes appropriés en temps réel, tout en assu- rant un contrôle continu du coût des travaux.» La Cour d’appel indique que l’entrepreneur général devait ainsi colliger toutes les ré- clamations, incluant celles de ses sous-traitants, et les remettre à SEBJ dans les délais contractuels. Elle confirme que le sous-traitant Cegerco ne pouvait ignorer les délais de réclamation et était en principe lié par les documents d’appel d’offres dont il a pris connaissance. La conséquence fut donc le rejet complet de la réclamation de Cegerco. Il y a très peu d’échappatoires au non-respect d’une procédure de réclamation. Il y a quelques décisions rapportées au Québec où la Cour avait considéré des faits démon- trant une renonciation du donneur d’ouvrage aux délais de la procédure de réclamation. Cette preuve est toutefois difficile à faire puisque telle renonciation doit être explicite. Dans le cas en cause, la Cour d’appel précise que ni Cegerco ni JVC n’ont porté à l’at- tention de la Cour quelque information ou preuve selon lesquelles SEBJ aurait consenti à prolonger le délai pour la réception de la réclamation détaillée. Portez donc une attention immédiate aux délais des documents d’appels d’offres et n’hésitez pas à consulter un professionnel en droit de la construction qui saura bien vous guider. 1 Cegerco inc. c. Les Équipements J.V.C. inc. et Société de la Baie James, Cour d’appel, 200-09-009143-154, 12 janvier 2018 (confirmant le jugement de la Cour Supérieure rendu le 13 octobre 2015); Isabelle Simard, avocate Tél.: 418 696-3011 COMPRENDRE... IMAGINER... AGIR... www.sblavocats.com 203G09-18 « Il y a très peu d’échappatoires au non-respect d’une procédure de réclamation. » (Photo: Shutterstock)

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