Le port de Grande-Anse sur le Saguenay est une infrastructure régionale présentant un des plus forts potentiels de développement économique. Il est donc intéressant de se rappeler les raisons initiales qui ont justifié, il y a plus de 30 ans, la construction sur ce site de ces installations portuaires.
Il faut d’abord distinguer Grande-Anse des Installations portuaires privées de Rio Tinto Alcan (RTA). Alors que les installations portuaires de RTA sur la Baie des Ha ! Ha! sont pratiquement dédiées à 100 % à l’usage interne de la compagnie, Grande-Anse est un port public, géré par Port Saguenay, une corporation qui relève des lois fédérales.
L’histoire de Grande-Anse est liée au port public qui était localisé au cœur de Chicoutimi et qui s’était spécialisé au fil des années dans l’importation des produits pétroliers. La zone portuaire de Chicoutimi s’est donc graduellement peuplée d’une véritable forêt de réservoirs de carburants aux formes et couleurs variées, dont l’omniprésence fut de plus en plus questionnée par la population de la ville.
Au tournant des années 1980, les autorités portuaires de Chicoutimi décidèrent de construire un nouveau port de mer sur le Saguenay, destiné à recevoir de grands navires de transport de produits pétroliers et ainsi déplacer définitivement les réservoirs du Centre-Ville de Chicoutimi.
Plusieurs sites potentiels furent alors évalués, dont l’Anse-à-Pelletier à St-Fulgence, qui présentait de bonnes qualités sur le plan maritime, mais avait trop de lacunes quant à l’aménagement près du port d’un parc de réservoirs pétrolier, le site du Quai Albert-Maltais, dans le chemin St-Martin aux limites de Chicoutimi, était performant pour accueillir les réservoirs, mais présentait trop de contraintes maritimes pour être retenu (même si on y érigeait un nouveau quai), le site de l’Anse à Benjamin, sur le côté nord de la Baie des Ha ! Ha ! avait d’excellentes qualités maritimes (il deviendra plus tard le site de la marina de La Baie), mais la nature argileuse des terres environnantes limitait fortement l’aménagement d’un parc de réservoirs pétrolier adjacent au futur quai.
Le site de Grande-Anse, situé directement sur le Saguenay et à l’écart des zones habitées, présentait plusieurs caractéristiques favorables tant au niveau de la navigation maritime qu’au niveau des zones d’accueils des réservoirs. En fait, un des seuls désavantages du site de Grande-Anse était que 450 pieds de hauteur séparent les plateaux rocheux environnants du quai proprement dit.
Cet important dénivelé rendait techniquement complexe et très couteuse la possibilité de faire arriver le chem in de fer directement sur les quais, en plus de limiter très sévèrement les superficies d’entreposage directement accessibles au niveau des quais. Cependant, comme les installations portuaires de Grande-Anse étaient essentiellement destinées au transbordement de produits pétroliers, ce désavantage ne fut pas considéré et le site fut retenu comme meilleur site sur le Saguenay pour un terminal pétrolier de remplacement aux installations du Centre-ville de Chicoutimi.
Le premier quai aménagé sur le site de Grande-Anse fut inauguré en 1985. Par contre, il n’y a pas eu de construction de réservoirs pétroliers sur le site à l’époque, ni après. Plus encore, les installations portuaires de Grande-Anse n’ont jamais reçu de navires pétroliers, malgré qu’elles aient été construites à cet endroit spécifiquement à cette fin. Pourtant, les réservoirs pétroliers du Centre-Ville de Chicoutimi furent tous démolis et la région est toujours parfaitement approvisionnée en produits pétroliers. Comment donc expliquer une pareille contradiction?
Cela s’explique, entre autres, par le fait qu’au cours des années, les gouvernements ont de plus en plus imposé des taxes sur les produits pétroliers entreposés, ce qui a eu pour effet d’encourager fortement la livraison directe de ces produits des raffineries aux utilisateurs (les stations-services notamment). De plus, comme le transport par camion était, et est toujours, moins réglementé, ses coûts économiques d’utilisation sont beaucoup plus bas que ceux du transport maritime ou ferroviaire, pour les distances et les quantités en cause dans le cas des produits pétroliers au Québec
L’annonce récente par le gouvernement du Québec d’une politique maritime dont l’un des axes est justement la revalorisation du transport maritime à l’intérieur du Québec est cependant porteuse d’espoirs pour un retour du transport maritime des produits pétroliers. D’autres projets liés à l’industrie minière et à l’énergie (GNL Québec) assureront éventuellement à Port Saguenay de vivre d’importants développements dans les années qui viennent.