« Nous nous attendons à une année record dans le secteur, donc la demande en matériaux va demeurer élevée. Depuis la crise de la COVID-19, il y a eu une hausse très importante des coûts des matériaux. On prévoit que ça ne va pas se résorber cette année », souligne d'entrée de jeu Félix Rhéaume, directeur des affaires publiques et gouvernementales à l'Association de la construction du Québec (ACQ).
Le deuxième facteur qui pourrait influencer à la hausse les coûts des matériaux est l'imposition potentielle de tarifs douaniers par les États-Unis, ainsi que les représailles que le Canada pourrait lancer.
« Les tarifs vont avoir un impact sur l'économie dans son ensemble. Plus spécifiquement, pour nous dans la construction, ça va être de voir ce que le Canada risque de faire en représailles. Si chaque produit qui arrive des États-Unis est taxé d'un montant équivalent à celui des tarifs américains, ça va avoir des répercussions très significatives sur le prix des matériaux », explique M. Rhéaume.
Pour le président-directeur général de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec (CEGQ), Éric Côté, l'instabilité politique a également un effet à la hausse sur les prix. « Au-delà des tarifs, cette instabilité a un impact sur le dollar canadien. Si vous achetez des matériaux qui ne sont pas faits au Canada, vous devez payer en devises étrangères. Avec la conversion, vous en avez moins pour votre argent, donc vous devez débourser plus », fait-il valoir.
Main-d'œuvre
M. Côté rappelle que la main-d'œuvre et les matériaux constituent la majeure partie de la facture des projets de construction. Ainsi, le renouvellement des conventions collectives du secteur de la construction pourrait également avoir des effets sur le coût des projets. Les augmentations salariales qui y seront associées viendront forcément majorer les prix des chantiers.
« Il y a un accroissement des coûts de main-d'œuvre anticipé avec la demande des syndicats à 18 % de hausse de salaire la première année. Il faut ajouter à ça qu'il y a des revendications qui sont non pécuniaires, mais qui ont un impact financier aussi. [...] De mémoire, historiquement, une augmentation de salaire de 4 %, comme les offres patronales actuelles, ça n'a jamais eu lieu », souligne Éric Côté.
Des impacts pour les entreprises
Ces incertitudes concernant les coûts des matériaux et de la main-d'œuvre amènent leur lot de défis pour les entrepreneurs du domaine. Ils doivent tenter de prévoir ces hausses, tout en conservant des prix compétitifs dans leurs soumissions. C'est sans compter les projets en cours ou les soumissions déjà envoyées, dans lesquels les augmentations possibles n'ont pas toujours été prises en compte.
« Par exemple, si l'entrepreneur met 10 % de hausse dans sa soumission, mais que ce n'est pas 10 % au final, le client va se retrouver à payer trop cher. [...] Si ce n'est pas assez, c'est l'entrepreneur qui va absorber la perte », mentionne le PDG de la CEGQ.
Afin de répartir les risques, Éric Côté suggère de prévoir une clause permettant l'ajustement du prix en fonction de la réelle augmentation liée au renouvellement des conventions collectives. Selon lui, certains donneurs d'ordres le proposent déjà, par exemple dans le génie civil et la voirie, mais c'est peu fréquent dans le secteur du bâtiment.