Auteur

Karine Boivin Forcier

N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : « Agriculture et agroalimentaire : cultiver la nordicité » publié dans notre édition du mois de juillet.

SAGUENAY – Il est impératif de se préoccuper de la relève agricole ou l’on risque de voir la région se dévitaliser, estime Mario Théberge, président de la Fédération de l’Union des producteurs agricoles (UPA) du Saguenay–Lac-Saint-Jean.

« Quand les agriculteurs n’ont pas de relève, ils liquident leur entreprise et ça en fait une de moins sur le territoire. Les voisins achètent les terres, mais ce n’est pas comme ça qu’on dynamise nos rangs. Des fermes de moins, c’est de la dévitalisation dans nos milieux. S’il n’y avait pas d’agriculture, les villages n’existeraient pas », affirme-t-il.

Dans un contexte où l’autonomie alimentaire prend de plus en plus de place dans les discours gouvernementaux et où les superficies cultivables diminuent dans d’autres pays, l’enjeu de la relève devient donc crucial. « C’est l’avenir de notre région. Avec les changements climatiques, le Québec pourrait se trouver en position de devenir le grenier du monde. Nous serons indispensables pour nourrir la population québécoise, mais aussi celle de la planète. À long terme, l’agriculture, il faut y investir, pendant que les terres sont encore à nous, que nos producteurs et nos jeunes sont motivés », indique M. Théberge.

Financement difficile

Des releveurs intéressés, il y en a. Toutefois, l’un des gros problèmes qu’ils rencontrent se situe au niveau du financement. « Ça se joue là. L’intérêt des jeunes, on le voit. Ils sont présents. […] Les inscriptions sont en hausse dans les institutions d’enseignement. Sauf que, quand ils finissent, ils n’ont pas l’argent pour acheter une ferme. Ça va prendre des aides financières, des programmes pour les soutenir », estime Mario Théberge, qui rappelle qu’une exploitation laitière, par exemple, peut valoir plusieurs millions de dollars.

Selon le président de la Fédération de l’UPA régionale, les jeunes qui ont déjà de la famille dans le milieu agricole sont plus à même de s’établir dans le domaine, avec l’appui de leurs parents et leur connaissance des différentes possibilités. Pour les autres, le défi est plus grand. Paradoxalement, un producteur qui vend à son enfant a des impacts fiscaux plus importants que s’il vendait à un étranger, une iniquité décriée par l’UPA.

La question du financement demeure donc un point essentiel en ce qui concerne la relève. « Tout est à faire. Les programmes de la Financière agricole ne sont plus adéquats. Il faut les réévaluer et les mettre à jour », note M. Théberge.

Concertation régionale

La Fédération de l’UPA du Saguenay–Lac-Saint-Jean met beaucoup d’efforts pour développer des solutions dans ce dossier. Toutefois, Mario Théberge estime qu’une concertation à l’échelle régionale est nécessaire afin de poser des actions qui auront un impact tangible.

Selon lui, le projet Arterre, qui vise à effectuer un maillage entre producteurs cédants et aspirants agriculteurs, n’a pas eu le succès escompté en raison du manque de cohésion entre les différentes MRC. Une rencontre organisée en janvier avec une quarantaine d’intervenants concernés par la relève agricole a également permis de conclure que le travail se réalise trop en silo. « C’est notre vœu, à l’UPA, que les acteurs de la région œuvrent ensemble. »

Des projets

Le président souhaite notamment voir la stratégie Agri-relève, qu’il a lancée avec deux autres personnes dans la MRC de Maria-Chapdelaine, prendre de l’expansion pour toucher tout le Saguenay–Lac-Saint-Jean. « Nous avons rassemblé tous les intervenants du milieu, soit des institutions financières, du Groupe multiconseil agricole, du ministère, de la MRC, des producteurs et de l’UPA. Nous les avons réunis pour parler de développement et de transfert d’entreprise, afin que les releveurs n’aient pas besoin de visiter chaque organisation séparément. Ça facilite les démarches. […] En l’établissant de façon régionale, on vient créer une synergie permettant de trouver de la relève dans un bassin plus grand. »

L’équipe de l’UPA Saguenay–Lac-Saint-Jean travaille aussi sur un nouveau projet, à la suite de la journée d’ateliers tenue en janvier avec le COlab. « Nous devrions recevoir le rapport et les conclusions bientôt. Nous espérons implanter, avec le COlab, une stratégie régionale incluant les institutions d’enseignement, le MAPAQ, la Financière agricole, etc. Celle-ci aurait pour but de redynamiser la relève. Nous sommes à préparer le terrain », indique Mario Théberge.

Ce projet devrait se mettre en place l’hiver prochain. « Nous avons de grandes attentes. Cela pourrait faire une bonne différence pour les années à venir. Il y a des intervenants importants qui veulent prendre part à un projet-pilote régional », conclut M. Théberge.

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