SAGUENAY – Depuis l’instauration de la mesure exceptionnelle forçant le télétravail pour tous les salariés par le gouvernement Legault en mars 2020, plusieurs Québécois ont pris goût à ce nouveau mode de travail. Dans un contexte d’un retour graduel à la normale après 17 mois de pandémie, l’avocate Karolyne Gagnon recommande fortement aux employeurs de mettre en place une politique sur le télétravail afin de baliser cette pratique auprès des employés.
Que doivent faire les entreprises pour permettre à leur personnel de poursuivre leur boulot depuis leur résidence ? La vice-présidente Travail et affaires juridiques du Conseil du patronat du Québec, Karolyne Gagnon, précise qu’en contexte de sortie de crise et dans l’optique où un milieu de travail compte autoriser cette pratique, une politique en la matière se veut très utile.
« Maintenant, grâce à la pandémie, plusieurs entreprises ont constaté les bienfaits de ce nouveau moyen de travailler et comptent l’autoriser. C’est là qu’une politique s’avère pertinente puisqu’au moment où le décret gouvernemental prend fin, ce sont les dispositions des précédents contrats de travail qui s’appliquent. Ce cadre réglementaire sur le travail à la maison viendrait notamment préciser quelles sont les catégories d’emplois visées par cette mesure, quels sont les types de comportements admissibles ou non, quels sont les lieux autorisés pour faire du télétravail », explique sommairement l’avocate.
Baliser le lieu du télétravail
Plusieurs contrats de travail prévoient déjà les lieux de travail des salariés. À cet effet, pour régulariser ces dispositions dans leur ensemble, un document-cadre s’avère la solution idéale afin que les ressources humaines soient au courant des éléments autorisés et interdits. « Les droits de gérance de l’employeur permettent à un patron d’exiger, par exemple, que les employés exécutent leurs tâches dans une pièce fermée et de sécuriser les documents. Il pourrait également définir s’il permet le travail à l’extérieur de la résidence comme dans un restaurant rapide ou en déplacement dans une autre région, par exemple », énumère Me Gagnon.
Favoriser la communication
L’avocate encourage également les entrepreneurs à bien communiquer avec leur équipe pour éviter des zones grises. « Si on instaure une [charte] sur le télétravail, au moment où ça devient une mesure globale, on ne peut plus la qualifier de privilège. Soit on le permet ou on le refuse à tout le monde. Toutefois, il serait possible de le refuser dans le cas où un salarié aurait un taux d’absentéisme trop élevé ou un dossier disciplinaire. Il faut toutefois que ce soit précisé dans la politique interne », met-elle en relief.
Qui fournit le matériel ?
Les normes du travail n’obligent pas les entreprises à fournir du mobilier pour accomplir le travail à distance. Karolyne Gagnon explique que le contrat de travail peut être un bon indicateur à cet effet. « Le premier contrat de travail avant le travail à la maison est déterminant. Si l’employeur offrait déjà l’ordinateur, il faut que ce soit fourni. Toutefois, il faut retenir que l’employeur n’a aucune obligation de payer le matériel de ses employés. S’il a une politique de cybersécurité, normalement, c’est lui qui fournit les installations sécuritaires, mais il faut retenir que rien n’oblige les employeurs de le faire », soutient-elle, rappelant que les travailleurs bénéficient de déductions fiscales pour des dépenses reliées à l’exécution de leur emploi.
Recruter de nouveaux talents
Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, l’avocate croit également que le télétravail peut être une mesure incitative pour attirer de nouveaux talents au sein de son organisation. « Ça a démontré qu’on peut retirer les frontières régionales et qu’il serait possible, par exemple, de recruter quelqu’un au Bas-Saint-Laurent pour pourvoir un poste. Ç’a aussi fait réfléchir certains employés à quitter la métropole pour les régions. C’est évident que dans un contexte semblable, une entreprise doit miser sur un cadre réglementaire entourant le travail à distance », conclut la vice-présidente, mentionnant que des documents types devraient être mis en ligne cet automne par la CNESST, l’ordre des CRHA ou la CPQ afin de faciliter la tâche des plus petites entreprises qui ne possèdent pas de département RH.