Auteur

Karine Boivin Forcier

N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : « Le Nord québécois, terre d’opportunités » publié dans notre édition du mois de janvier.

SAGUENAY – L’Incubateur-Accélérateur (IA) nordique, une des actions soutenues dans le Plan d’action nordique 2020-2023, connaît un franc succès avec son accompagnement sur mesure de projets touristiques sur le territoire situé au nord du 49e parallèle. Il lancera d’ailleurs sa deuxième cohorte vers la fin janvier.

Fruit de la collaboration entre Aventure Écotourisme Québec (AEQ), la Fédération des pourvoiries du Québec (FPQ) et Tourisme Autochtone Québec (TAQ), l’IA nordique vient soutenir la concrétisation de projets d’affaires structurants et durables dans l’axe nature-culture-aventure. Il propose ainsi deux parcours d’accompagnement (Démarrage ou Accélération), selon que l’entreprise est en phase de démarrage ou déjà en activité.

« C’est un incubateur-accélérateur nomade. Le nord, par son immensité, par l’éloignement des différents acteurs, on doit se projeter vers le territoire. Il faut mettre l’expertise de nos organisations et réseaux du sud à la portée de ces entrepreneurs du nord pour un avenir touristique rassembleur et inclusif », affirme Marc Plourde, président-directeur général de la FPQ.

Quelque 16 projets, dont neuf d’entreprises autochtones, ont été acceptés dans la première cohorte lancée fin septembre. « On accueille normalement jusqu’à six entreprises par parcours, mais on a eu un franc succès pour la première cohorte. On a donc accepté plus d’entreprises que prévu », souligne Anne Lemieux, gestionnaire-coordonnatrice de l’IA nordique.

Sur mesure

Coaching, financement, mise en relation avec des partenaires ou investisseurs, l’incubateur-accélérateur offre aux participants un accompagnement sur mesure qui répond à leurs besoins particuliers et maximise leurs chances de réussite. « En Démarrage, on leur offre une banque de 150 heures et en Accélération, c’est 200 heures. Elles se déclinent en trois volets : il y a des rencontres mensuelles avec un coach de parcours et des formations de groupe pour les mettre en commun, qu’ils partagent leurs expériences entre eux. Ensuite, on a une banque de 40 experts à la carte disponibles à l’heure pour répondre aux enjeux bien précis des entreprises », explique Mme Lemieux.

Chacune des trois associations touristiques sectorielles qui chapeautent l’IA nordique fournit des experts, mais la majorité provient d’organismes et entreprises externes, spécialisés en entrepreneuriat, comme le plan d’affaires, le modèle d’affaires, les prévisions financières, les ressources humaines, l’aspect légal, le tourisme, etc.

« Ce qui est intéressant avec les experts, c’est que l’entrepreneur est accompagné du début jusqu’à la mise en place de son projet sur le terrain. L’accompagnateur va s’assurer que le projet soit mis sur les rails comme il faut. Il va le suivre au début de ses opérations pour voir si tout est correct et s’il a besoin d’un soutien supplémentaire, nous pourrons intervenir. Nous voulons vraiment que les projets se concrétisent. Le but, c’est de générer des retombées économiques au nord du 49e parallèle », mentionne Pierre Gaudreault, directeur général d’AEQ.

Répondre aux enjeux

Selon Marc Plourde, le développement d’une entreprise en milieu nordique demande du temps et présente plusieurs enjeux. L’IA nordique veut offrir des outils pour améliorer leurs conditions de succès. « On voit la complexité, pour des gens de régions éloignées, de faire cheminer un projet lorsque les principaux acteurs sont en ville, les bailleurs de fonds sont des ministères : on le sait, c’est long. Notre pari, c’est de dire qu’avec un accompagnement approprié, avec des projets mieux structurés, les bailleurs de fonds vont être sécurisés et être en mesure d’accepter plus rapidement d’appuyer un projet », estime Marc Plourde.

« C’est une initiative qui colle bien aux besoins des entrepreneurs des communautés nordiques. Souvent, les idées ne manquent pas, mais il y a un besoin important d’expertise pour faire cheminer les projets et les optimiser de l’idée à la concrétisation du projet », renchérit Dave Laveau, directeur général de TAQ.

Selon M. Laveau, c’est ce genre d’initiative qui était nécessaire pour le développement d’entreprises touristiques autochtones. « Au cours des 10 dernières années, l’offre en tourisme autochtone a explosé. Ce sont 247 entreprises au Québec maintenant. Notre défi actuel, c’est de développer et structurer l’offre pour qu’elle réponde aux standards et aux besoins des visiteurs. Cette expertise individuelle, en continu, adaptée au promoteur, c’est ce dont on avait besoin pour avancer comme industrie. […] Comme autochtone, ce qui me stimule beaucoup, c’est quand on fait un pas de plus sur la connaissance autochtone et non autochtone. Ce genre d’initiative qui ne se fait pas en vase clos, mais ensemble, avec le tourisme comme colonne vertébrale, ça aussi c’est une bonne pratique. »

Réseautage

Le réseautage est également un enjeu sur le territoire nordique. « Pour les gens de régions éloignées, de petits villages nordiques, réseauter avec les experts à Montréal, Québec, un peu partout, ce n’est pas évident », rappelle M. Plourde.

L’incubateur-accélérateur veut pallier cette problématique, tant en ce qui a trait aux experts qu’aux échanges entre entrepreneurs. « C’est une clé du succès de partager nos pratiques d’affaires, nos défis respectifs. Dans un territoire aussi immense que le nord du 49e parallèle, c’est un défi, parce que les gens sont éloignés les uns des autres. L’IA nordique, de façon virtuelle, vient mettre ces gens-là en relation », ajoute M. Laveau.

Mentionnons que les trois organismes responsables de l’IA nordique travaillent en étroite collaboration avec les cinq associations touristiques régionales œuvrant sur le territoire nordique. Cela leur permet de couvrir adéquatement l’ensemble du territoire et de cibler les projets porteurs dans chaque secteur.

Financement disponible

L’une des particularités de l’IA nordique est qu’il possède un volet pour le financement de projets grâce à une enveloppe de 6 M$. Celui-ci commence à se déployer, puisque les entreprises de la première cohorte sont maintenant assez avancées. Le financement a pour but d’appuyer la mise en œuvre du plan d’affaires. « Quand on arrive avec une aide financière non remboursable, qui devient de l’équité, ça solidifie l’entreprise dès la mise en œuvre de son projet et ça vient rassurer les bailleurs de fonds. On peut aller jusqu’à 50 % d’un projet, jusqu’à la hauteur de 300 000 $ par entrepreneur », indique le PDG de la Fédération des pourvoiries du Québec.

Un comité d’évaluation est mis en place pour s’assurer de la qualité des dossiers soumis. « On veut s’assurer que chaque projet financé soit vraiment finalisé et déployé sur le territoire », précise Anne Lemieux.

Plans d’avenir

Une troisième cohorte devrait être lancée en 2022. L’objectif, pour les trois ans du Plan d’action nordique, est d’atteindre de 36 à 40 entreprises. Avec les deux premières cohortes, 28 promoteurs ont déjà été touchés, l’objectif pourrait donc être déjà atteint à la troisième cohorte.

Les trois associations touristiques sectorielles voient l’IA nordique comme un projet-pilote et souhaiteraient le voir se poursuivre au-delà des trois années prévues au Plan d’action nordique. « On est à l’heure du déploiement, pas encore à celle des bilans qui vont nous permettre de faire des projections pour l’avenir. […] Quand on le fera, ça nous permettra de réfléchir à comment on pourrait le financer à plus long terme et quel type de structure ça exigerait. Mais je peux vous dire qu’on a une volonté de perdurer dans le temps », conclut Marc Plourde.

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