Auteur

Maxime Hébert-Lévesque

N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : « La construction : défis et croissance » publié dans notre édition du mois de février.

SAGUENAY – La clause d’ajustement de prix est un dispositif que les entrepreneurs de la construction peuvent utiliser depuis novembre 2021. Cela permet aux entreprises de partager le risque avec la Société québécoise des infrastructures (SQI) en cas de fluctuation importante sur les prix des matériaux lors de projets publics.

« L’Association de la construction du Québec (ACQ) et d’autres associations patronales de la construction réclamaient ce dispositif auprès des instances gouvernementales depuis le début de la pandémie. Il faut rappeler que notre secteur a vu des matériaux comme le bois connaître une augmentation de 300 % sur son prix en quelques mois seulement. Nous nous sommes donc assis autour d’une table avec le ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon, la présidente du Conseil du trésor, Sonia Lebel, ainsi que les gestionnaires de la SQI et en sommes venus à élaborer la clause d’ajustement de prix », explique Guillaume Houle, responsable des Affaires publiques à l’ACQ.

Un dispositif qui n’est toutefois pas nouveau puisqu’il est fréquemment utilisé lors des contrats effectués pour le ministère des Transports du Québec, le bitume et le pétrole étant des matériaux dont les prix fluctuent énormément. « Une clause comme celle-ci est nouvelle pour les infrastructures publiques comme les CHSLD, les écoles et les institutions. C’est une pratique qui risque de gagner en popularité. Des acteurs provenant d’autres industries nous ont interpellés afin de savoir comment faire pour la mettre en pratique », souligne le responsable des Affaires publiques. En effet, des domaines d’activités comme le milieu médical connaissent eux aussi des problématiques reliées à la volatilité des prix.

Un partage du risque

« Nous recevions plusieurs témoignages d’entrepreneurs qui réalisaient des contrats à perte puisque le prix des matériaux avait augmenté entre le moment où la soumission avait été déposée et les travaux débutés. Ce que l’on observe sur le terrain, c’est qu’il est maintenant difficile pour un fournisseur de garantir l’exactitude de ses prix pour une période de plus de sept jours. Nous nous retrouvons donc devant un problème puisque le délai d’obtention d’un contrat public peut se jouer de 60 à 120 jours. »

La situation étant incertaine, les firmes de construction n’ont eu d’autre choix que d’augmenter leurs prix pour se protéger. « À la SQI, les gestionnaires remarquaient des soumissions parfois de 9 à 10 % plus chères qu’à la normale. »

Les acteurs du milieu ont donc dressé une liste composée de plus d’une quarantaine de matériaux et d’équipements pouvant faire l’objet d’une demande d’ajustement de prix. Parmi ceux-ci, on retrouve : le béton, les structures de bois, le gypse, l’acier, la plomberie et les revêtements métalliques.

« Le fonctionnement est le suivant : lors de la rédaction de la soumission, l’entrepreneur identifie chaque matériau à risque de changer de prix. Si son projet comprend 10 000 $ en acier, il peut appliquer une clause dessus. Cela veut dire que toute augmentation de 5 % et moins sera absorbée par lui, mais que dans le cas d’une hausse de 8 %, la SQI va lui dédommager 3 % de 10 000 $. L’inverse est aussi vrai. Si le coût de l’acier chute de 5 % durant les travaux, l’entrepreneur engrangera un profit, mais si le prix fond de 8 %, il devra retourner 3 % à la SQI », précise l’employé de l’ACQ qui rajoute que c’est une manière de partager le risque dans un contexte de pandémie et d’instabilité.

La tempête idéale

Selon Guillaume Houle, cette particularité avec les prix et les difficultés pour les fournisseurs de s’approvisionner sont les conséquences d’une série d’événements survenus durant la même période. « La crise sanitaire a exacerbé les problèmes déjà existants comme la rareté de main-d’œuvre. Les fermetures spontanées et les absences précipitées des travailleurs atteints de la COVID ont simplement amplifié la problématique. »

De plus, M. Houle ajoute que des événements d’ordre climatique sont, en partie, responsables de la situation actuelle. « Au début de l’année dernière, le Texas a connu une vague de froid sans précédent. Une usine de billes de plastique située là-bas a subi d’importants dégâts reliés aux conditions climatiques et a dû mettre sur pause ses activités. Ça peut sembler anodin comme situation, toutefois, les portes et cadres de fenêtres sont fabriqués avec ces billes. Cela nous a donc paralysés ici aussi. Nous sommes comme dans la tempête idéale où un ensemble d’événements se produisent en même temps », conclut-il.

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