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Karine Boivin Forcier

SAGUENAY – La majorité des gens tendent à croire qu’un emploi assis est moins exigeant physiquement ou moins risqué qu’un travail debout. Toutefois, maintenir une posture assise de façon prolongée crée ses propres contraintes musculaires et comporte aussi son lot de risques. Selon deux professionnels du domaine, l’une des meilleures stratégies pour les éviter est de... bouger, tout simplement.

L’ergothérapeute Jean-François Boily et le kinésiologue Jonathan Harvey soulignent que plusieurs blessures peuvent découler du fait d’être sédentaire et d’effectuer plusieurs mouvements répétitifs. « On pense par exemple aux problèmes au cou et aux épaules, au tennis elbow, aux douleurs au coude, au poignet ou au dos. Il y a des gens qui n’auront jamais de souci par rapport à ça, mais ça reste une probabilité. Dans les faits, la plupart des gens vont avoir des problématiques s’ils ne mettent pas en place des stratégies pour les éviter », indique M. Harvey, propriétaire de la plateforme Web Perform+.

L’activité physique est une recette simple pour prévenir ces blessures. « Ça peut toutefois paraître complexe pour les travailleurs. Il y a trois enjeux qui bloquent souvent les gens : le temps, l’énergie et la motivation. L’activité physique en entreprise, ça vient pallier ces enjeux. Bouger à son travail nous donne du temps, de la motivation puisqu’on le fait en groupe et c’est avantageux pour l’énergie par rapport à la soirée où on est plus fatigué », affirme M. Harvey.

Des options peu coûteuses

Pour l’employeur, nul besoin de se lancer dans la construction d’un gym à l’intérieur de ses locaux. « Ce n’est pas obligé d’être une option qui coûte cher. Il peut mettre des minutes actives dans les ordres du jour de réunions, créer un comité des saines habitudes de vie, organiser des rencontres debout, offrir l’accès à des banques d’exercices », ajoute le kinésiologue.

Du côté des employés, il ne faut surtout pas croire que 30 minutes d’activité physique par jour compensent les huit heures assises au bureau. Jonathan Harvey rappelle que la santé est dans le mouvement et qu’il est possible de bouger pendant qu’on travaille. Cela améliore même la productivité. L’ergothérapeute Jean-François Boily recommande de bouger fréquemment et de regarder au loin régulièrement. « Travailler debout, ce n’est pas idéal non plus. L’alternance entre les positions debout et assise peut être intéressante, mais elle ne va pas régler tous les problèmes ! Quand c’est possible, on peut varier les tâches. Il y a des exercices d’étirement au niveau du cou, des épaules, du poignet qu’on peut faire avant le travail pour s’échauffer, mais aussi tout au long de la journée », précise celui qui est aussi propriétaire de la Clinique d’ergothérapie du Saguenay et de Chaises ergonomiques du Saguenay.

M. Boily propose d’intégrer des pauses de 5 à 10 minutes toutes les heures pour bouger, changer de position et se lever. Il est aussi possible d’effectuer des micropauses de courte durée (15 à 20 secondes) toutes les 20 minutes pour accorder un répit à sa musculature à l’aide d’étirements ou d’exercices légers. « Il faut rendre ça accessible. Oui, il y a des exercices précis qui peuvent être utiles, mais même le fait de se lever pour aller toucher le mur le plus loin de soi peut avoir un impact », renchérit Jonathan Harvey. C’est l’occasion, par exemple, d’aller parler à un collègue, ce qui, en plus d’être bon pour la santé physique, contribue également à améliorer la santé mentale.

Ajuster le poste de travail

Une autre stratégie importante, selon les deux professionnels, est l’ajustement du poste de travail afin d’obtenir une position ergonomique pour le travailleur. Attention, toutefois, à ne pas considérer qu’un poste de travail ergonomique nous exempte de bouger fréquemment. « Un poste de travail bien ajusté signifie moins de chance de se blesser, mais c’est important de faire aussi de l’activité physique et de prendre des pauses actives », fait remarquer M. Harvey.

Encore une fois, faire évaluer le poste de travail d’un employé pour l’ergonomie n’est pas toujours synonyme de grandes dépenses pour l’employeur. « On n’a pas systématiquement besoin de sortir l’artillerie lourde. Ça ne vient pas forcément avec une chaise à 1000 $, un clavier spécial, un bureau ajustable, etc. Dans la majorité des cas, on fait des petits ajustements comme la hauteur de l’écran, sa position sur le bureau, la provenance de l’éclairage, utiliser un clavier indépendant plutôt que celui du portable et soulever le portable pour que l’écran soit à la bonne hauteur. Ce sont des éléments comme ça qui font une différence », assure Jean-François Boily.

La chaise : un élément clé

L’ergothérapeute estime que la chaise est un élément clé dans la quête d’une bonne position pour le travail de bureau, puisqu’elle permet d’ajuster la posture assise. Encore là, attention : une chaise mentionnée ergonomique ne sera pas forcément meilleure qu’une autre. « Il y a des gens qui sont très bien positionnés sur une chaise ordinaire. D’abord, la personne doit être à l’aise dedans. Ensuite, elle doit supporter ce qu’il y a à soutenir musculairement dans le cadre du travail. Elle doit aussi être adaptée aux dimensions et à la morphologie du travailleur. Ça se peut qu’on ait une chaise qui est ergonomique pour un, mais pas pour l’autre », explique M. Boily.

Celui-ci ajoute qu’il n’est pas toujours nécessaire d’avoir tous les mécanismes d’ajustement possible sur la chaise si elle permet à l’employé d’avoir une bonne posture. « Souvent, les gens ne savent pas comment faire les ajustements même si leur chaise possède ces mécanismes. Il y a beaucoup d’enseignement à faire sur les bonnes postures au travail, la façon de les varier et la manière d’ajuster une chaise pour augmenter le confort et diminuer les facteurs de risque », croit Jean-François Boily.

Hydratation : à ne pas négliger

Jonathan Harvey apporte un autre point à ne pas négliger pour s’assurer une bonne santé au travail : l’hydratation. « Être 100 % bien hydraté peut faire la différence entre terminer sa journée fatigué avec un mal de tête et bien se sentir. C’est un petit geste avec un bon rapport qualité-prix », affirme-t-il.

Bien que le six à huit verres d’eau par jour souvent recommandé puisse convenir à la majorité, il est difficile de donner une quantité précise puisque cela dépend de plusieurs facteurs. Il faut toutefois se rappeler de ne pas avoir soif avant de boire. Une urine claire et abondante est aussi un signe de bonne hydratation. Conserver de l’eau fraîche ou une boisson qu’on apprécie à portée de soi lorsqu’on travaille peut contribuer à demeurer hydraté. Le café n’est pas à démoniser non plus, tant qu’on le consomme avec modération. Santé Canada recommande ainsi de ne pas dépasser 400 mg de caféine par jour.

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