SAGUENAY – Depuis 2016, la CNESST constate une hausse des accidents de travail partout dans la province. Au Saguenay–Lac-Saint-Jean seulement, 6 194 accidents ont été comptabilisés par l’organisme en 2022. Dans un contexte de pénurie et de grande mobilité de la main-d’œuvre, les défis demeurent en matière de santé et sécurité (SST) dans les entreprises.
« La prise en charge en matière de SST, ce n’est pas nécessairement gagné. Je pense que ces chiffres démontrent qu’il y a encore du chemin à parcourir dans plusieurs milieux de travail. […] Le contexte actuel est marqué par la pénurie de main-d’œuvre, l’arrivée de jeunes salariés et d’employés d’expérience, des milieux de travail qui sont en sous-effectifs. Ce ne sont pas des situations faciles pour la SST », affirme David Blouin, le responsable des communications pour la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean à la CNESST.
Selon lui, cela démontre encore plus l’importance de bien prendre en charge la santé et la sécurité au sein d’une entreprise. « Des employés en sous-effectifs et un rythme de travail élevé augmentent déjà le risque. Si en plus, il n’y a pas une bonne prise en charge de la SST, ça va encore plus accroître le risque d’accident », souligne-t-il.
Prise en charge
David Blouin explique qu’il existe quatre niveaux de prise en charge, dont les deux premiers sont sous le seuil minimum. Le premier degré est centré sur les activités courantes, soit une entreprise axée sur la production qui n’accorde pas vraiment d’importance à la SST. Dans la prise en charge réactive, soit le deuxième niveau, l’employeur va seulement réagir aux accidents.
Le troisième niveau est la prise en charge proactive. L’employeur va alors se doter des moyens pour identifier, corriger et contrôler les risques avant même que les accidents se produisent. Le quatrième niveau, « qui est vraiment le degré supérieur », concerne la prise en charge préventive. L’entreprise met l’accent sur la sécurité et sur la prévention des accidents. La SST devient donc une valeur partagée à tous les échelons.
Cette prise en charge se fait en trois étapes, soit identifier, corriger et contrôler. L’identification des risques peut se faire de façon formelle avec un comité à intervalles réguliers, mais doit également être réalisée en continu si un danger est détecté entre les exercices. La phase suivante est de corriger le risque, soit par son élimination à la source ou par d’autres mesures correctives, comme le contrôle technique, la sensibilisation des travailleurs, les mesures administratives ou les équipements de protection individuelle. « On va évidemment favoriser les solutions les plus efficaces en premier. Si l’on ne peut pas éliminer le risque à la source, on va cibler au moins deux autres moyens de correction dans les catégories mentionnées précédemment », précise M. Blouin. La dernière étape est le contrôle, qui permet de s’assurer que le risque identifié et corrigé ne revient pas.
Conditions gagnantes
Deux conditions gagnantes permettent d’implanter les meilleures pratiques en SST et de tendre vers la prise en charge préventive dans une entreprise. Il s’agit de l’engagement et du soutien de la direction ainsi que de la participation des employés.
Selon le responsable des communications pour la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean à la CNESST, David Blouin, l’employeur doit démontrer de l’intérêt pour la SST et avoir une cohérence entre ses consignes et ses actions. « Il doit donner l’exemple. Si l’employeur demande aux travailleurs de porter un casque en raison d’un risque, mais que lui quand il vient sur le plancher n’en porte pas, ça envoie un message contradictoire », illustre-t-il. Le gestionnaire doit aussi informer et former ses employés, faire la promotion des activités de prévention, etc.
Le travailleur a également un rôle à jouer en matière de SST, mais sa participation doit être encouragée et favorisée par l’employeur. « Celui-ci doit mettre en place des actions permettant au salarié de sentir que son implication est désirée. Le gestionnaire doit le pousser à prendre part à l’identification et à l’analyse de risques, à proposer des modifications. Les employés sont ceux qui sont le plus au courant des risques liés à leur tâche, parce que ce sont eux qui l’effectuent au quotidien. L’employeur doit être à leur écoute et prendre leurs suggestions en considération », indique M. Blouin.
Même si certains milieux de travail comportent moins de risques que d’autres, chaque secteur d’activité et chaque type d’emploi en a. Dans un contexte de travail de bureau, il peut y avoir des problématiques liées à l’ergonomie, par exemple. Un employeur dont le milieu compte des risques moins élevés devrait tout de même être proactif pour les identifier et les prévenir. « Dans les services, on n’y pense pas nécessairement, mais les clients peuvent présenter un risque de violence, par exemple. On encourage les entreprises à mettre en place d’une démarche préventive. Quand la SST devient une valeur dans l’organisation, défendue par les employeurs et à laquelle les salariés adhèrent, on est dans un contexte optimal où le risque d’accidents de travail va être grandement diminué », assure le responsable des communications.
Jeunes travailleurs
Alors que de plus en plus de jeunes intègrent le milieu du travail de plus en plus tôt, la CNESST accorde une grande considération à cette catégorie de travailleurs. À l’échelle québécoise, on note une augmentation des accidents de travail chez les jeunes (24 ans et moins), alors que les lésions comptabilisées par la CNESST sont passées de 11 481 en 2021 à 16 845 en 2022. « Ils sont plus vulnérables en raison d’une plus grande mobilité, de tâches comportant une contrainte physique ou organisationnelle plus importante, etc. », mentionne David Blouin.
Celui-ci rappelle toutefois que peu importe l’âge, le risque d’être victime d’accident du travail est supérieur dans les premières semaines où on occupe un nouveau poste. Dans ce contexte, une bonne pratique pour les entreprises peut être d’implanter un plan d’accueil des nouveaux travailleurs qui prévoit les informations et les formations sur les risques du milieu de travail, les méthodes sécuritaires à utiliser et les équipements de protection. « C’est essentiel que les employeurs portent particulièrement attention à ces employés. De leur côté, les salariés ne doivent pas hésiter à poser des questions et à s’arrêter s’ils ont un doute », conclut M. Blouin.