N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : Économie autochtone : une force à découvrir publié dans notre édition du mois de janvier.

 

SAGUENAY — La Corporation de développement économique montagnaise (CEDM) accompagne les entrepreneurs issus des communautés innues depuis 1988. Il va sans dire que plus de 35 ans plus tard, la volonté entrepreneuriale se fait davantage ressentir au sein des neuf localités innues québécoises. Portrait d’ensemble avec le directeur général de l’institution financière créée pour et par les Innus.

Yves Potier occupe la direction générale de la CEDM depuis le début de 2022. Celui qui dirige désormais  l’organisation explique que la CEDM est le levier de développement économique dont les communautés innues se sont dotées, il y a plus d’une trentaine d’années, afin de favoriser leur autodétermination et réduire le fossé d’avec les allochtones concernant l’accès au crédit.

« Nous avons un modèle d’affaires similaire aux institutions financières courantes, excepté que nous sommes adaptés aux enjeux des autochtones sur réserve. Rappelons que la notion de bien saisissable est différente des allochtones, ce qui crée des contraintes dans l’accès au crédit puisqu’ils ne bénéficient pas de l’opportunité de placer leur maison en garantie pour obtenir des fonds leur permettant de partir en affaires », indique le DG.

En plus de soutenir des entreprises privées, la CEDM peut également faire des prêts ou des contributions non remboursables pour des projets collectifs. « Dans certaines communautés, le réflexe est plus communautaire. C’est-à-dire qu’elles préfèrent mettre en place des projets, des services à plusieurs et bien souvent, c’est supporté par les conseils de bande. Dans d’autres, il y a de l’entrepreneuriat individuel. Pour la CEDM, on fait affaire avec ces deux types de projets. Chaque communauté possède sa propre réalité et nos fonds s’adaptent à eux », affirme monsieur Potier.

À travers les projets entrepreneuriaux, notons que les Innus accordent une importance particulière à leur expression culturelle. Yves Potier rappelle que pour plusieurs, être en affaires est aussi un prétexte pour occuper le territoire et exprimer leurs cultures. « C’est donc dire qu’il y a une certaine volonté sociale lorsque vient le temps pour eux de guider leur avenir professionnel à leur compte. Se faisant, il n’est pas rare pour la CEDM de supporter des projets reliés à l’artisanat ou qui s’y apparentent. Mais évidemment, ça ne se limite pas qu’à ça », rappelle-t-il. En plus du volet privé et collectif, la CEDM est également en mesure d’offrir du financement aux Innus qui se trouvent en communauté urbaine. « Tant qu’ils ont leurs cartes, nous sommes là pour eux », soutient M. Potier.

Défis à venir

S’il n’avait qu’un seul message à transmettre, le directeur général constate quelques défis concernant le financement de projets majeurs. Bien que son organisation se démarque exclusivement dans l’essor de PME, il s’avère que des entrepreneurs innus ont de plus en plus besoin de financement majeur lié à des projets d’envergure. « Il faut dire que de ce côté, il y a un besoin et notre institution financière n’est pas en mesure de répondre favorablement à ces besoins en raison des statuts de notre organisme. Il doit y avoir une volonté d’Ottawa de revoir les façons de faire et d’injecter davantage pour ces projets », conclut-il, en mettant en évidence des projets énergétiques comme BioChar Boréalis de Mashteuiatsh sur leurs besoins financiers élevés pour permettre le démarrage ou les phases exploratoires de ces projets d’envergure.