SAGUENAY – La livraison autonome par drone pourrait bientôt faire ses débuts à Saguenay. L’entrepreneur Martin St-Gelais développe actuellement un projet d’entreprise spécialisée utilisant ce mode de transport pour les petites pièces automobiles.

Martin St-Gelais, ancien propriétaire du garage BOX Mécanique, souhaite offrir l’expédition par drone entre les fournisseurs de pièces et leurs clients, les garages. Il vise spécifiquement les pièces de sept kilogrammes et moins, qui représentent environ 60 % des livraisons dans ce domaine. "Mon but, c’est de contribuer à combler la pénurie de livreurs et à accélérer les temps de livraison", indique-t-il.

Le système qu’il proposera fonctionne de manière complètement autonome. "Le commis place la pièce, appuie sur un bouton, puis le drone décolle, dépose le colis dans la station d’accueil chez le client, repart au centre de distribution et se pose sur sa base sans autre intervention humaine", explique l’entrepreneur. 

Phase d’essai

Puisqu’il s’agit d’une technologie novatrice encore peu utilisée et très réglementée, le projet commencera par une phase d’essai à plus petite échelle. Celle-ci devrait être lancée en octobre, en collaboration avec Pièce d’auto P&L, situé sur le boulevard Saint-François, et BOX Mécanique, implantée dans le parc industriel de Jonquière.

Cette première phase permettra de tester les drones dans des conditions réelles et de démontrer la viabilité et la sécurité du système de livraison à Transport Canada, afin que l’organisme de réglementation autorise d’autres couloirs aériens par la suite. "On se donne environ six à huit mois pour faire les essais", précise Martin St-Gelais. 

Technologie

Le premier drone sélectionné par l’entrepreneur pour les essais vient de la compagnie A2Z Drone Delivery, basée à Los Angeles. Il possède six hélices. Normalement, il devrait être capable de fonctionner dans toutes les conditions, toute l’année, à moins de températures extrêmes. "Une bonne innovation de cette compagnie, c’est que le drone atterrit sur sa base de façon autonome. De plus, lorsqu’il est sur la base, ses batteries se rechargent automatiquement", mentionne M. St-Gelais.

Pour la période d’essai, le drone se déplacera exclusivement dans un couloir d’environ 500 mètres attribué par Transport Canada dans le parc industriel de Jonquière, à une altitude de 35 mètres. "On prend un couloir facile. On sait que la technologie fonctionne, mais on veut faire des heures, effectuer beaucoup de livraisons pour expérimenter", souligne M. St-Gelais.

Un ordinateur installé chez Pièce d’auto P&L permettra de suivre le trajet du drone, mais il réalisera son itinéraire de façon autonome. "Lorsqu’il parvient chez le client, le drone se stabilise pour descendre le colis avec un treuil dans la station de réception. Le responsable du garage reçoit une notification pour lui indiquer que son colis est arrivé. Ensuite, il retourne à sa base et il est prêt pour une autre livraison", ajoute l’entrepreneur.

Étapes suivantes

Une fois la première phase réalisée, le projet devrait prendre de l’expansion, d’abord dans le parc industriel de Jonquière. Il serait en effet possible de rejoindre d’autres clients en utilisant le même corridor, affirme Martin St-Gelais. Si Transport Canada l’autorise, son entreprise pourrait ensuite effectuer les livraisons dans d’autres secteurs. L’acquisition de nouveaux drones pour répondre à la demande est aussi envisagée. "Il y a quand même beaucoup d’opportunités. Ça peut aller vite", conclut M. St-Gelais. 

 

Drones : un fort potentiel pour la livraison B2B

 

SAGUENAY – Martin St-Gelais réfléchit à son projet de livraison par drone depuis deux ans. L’entrepreneur vise spécifiquement le marché du commerce interentreprises (business to business —B2B) et estime qu’il y a un fort potentiel de développement.

M. St-Gelais, qui a été propriétaire du garage BOX Mécanique pendant 15 ans, a constaté une lacune dans le quotidien des garagistes : le temps d’attente pour les pièces, lié à la disponibilité des livreurs du côté des fournisseurs. Il a choisi de s’y attaquer.

Il faut comprendre que ces derniers réalisent de nombreuses livraisons quotidiennement par véhicule, afin d’approvisionner rapidement les garagistes avec les composants dont ils ont besoin pour les réparations. « Nous effectuons la livraison de pièces par véhicule, à la demande. Notre politique, c’est que ce soit acheminé dans un délai de 30 minutes. J’ai plus d’une vingtaine de véhicules sur la route à temps plein », illustre Robin Miousse, directeur des ventes et du développement chez Pièces d’auto P&L, qui participe à la première phase de déploiement de l’entreprise de Martin St-Gelais.

Même si Martin St-Gelais souhaite remplacer 40 % à 50 % de ces livraisons par l’utilisation du drone, il ne pense pas que cela va supprimer des emplois, surtout dans un contexte de rareté de main-d’œuvre. « Le but, c’est d’améliorer ces postes. Les employés pourront faire d’autres tâches, être moins à la course. Il va aussi rester les plus grosses pièces qui continueront à être expédiées par la route », affirme-t-il. 

Du point de vue environnemental, le drone, qui fonctionne à l’électricité, vient diminuer de beaucoup les émissions de gaz à effet de serre liées aux livraisons. Il limite également les coûts d’entretien de la flotte de véhicules. 

Un besoin

Martin St-Gelais souligne qu’il a déjà des clients potentiels intéressés pour le moment où la première phase de tests prendra fin. « En plus de Pièce d’auto P&L, j’ai un client à Trois-Rivières qui a sept magasins et qui serait prêt à m’accueillir. J’ai aussi quelqu’un qui suit le dossier à Mont-Laurier. Il y a vraiment un besoin », indique M. St-Gelais. 

Pièce d’Auto P&L souhaite également poursuivre, si la phase d’essais se révèle concluante. « Si ça va bien et que ça permet d’améliorer le service, nous serions capables d’aller plus loin encore. Nous avons trois magasins, donc nous pourrions déplacer du courrier interne entre les trois, par exemple », mentionne Robin Miousse.

Même si plusieurs clients intéressés sont de l’extérieur de la région, Martin St-Gelais désire conserver le siège social de l’entreprise à Saguenay. « Je veux vraiment développer ici une entreprise qui a l’expertise pour implanter le service chez le client. […] Le modèle est encore à déterminer pour l’expansion à plus grande échelle », relate Martin St-Gelais, qui compte notamment sur le soutien d’Innovation 02 et de Promotion Saguenay pour le développement de son projet. 

Transport Canada

Ayant fait ses débuts dans le monde de l’aviation, l’entrepreneur vient jumeler cette expertise à celle acquise à titre de propriétaire d’un garage. « À la base, il faut communiquer avec les gens de Transport Canada à Ottawa, donc ça demeure un peu plus complexe à développer comme entreprise. » Il y a en effet de nombreux critères et paramètres à respecter pour faire voler un drone, encore plus lorsqu’il s’agit d’une activité commerciale. Par exemple, il est interdit de faire voler un drone en zone résidentielle, sauf autorisation précise, mais il est possible d’emprunter des couloirs au-dessus des voies ferrées, des autoroutes, etc. 

Selon Martin St-Gelais, l’organisme réglementaire fédéral est assez ouvert à collaborer avec des gens sérieux pour développer le secteur des drones. « Ils ont besoin de projets comme le mien pour peaufiner la réglementation actuelle ou même la modifier. Ils sont ouverts, ils sont rendus là, mais c’est très clair qu’ils ne veulent pas commencer à livrer des pizzas dans des résidences, par exemple. Ils désirent y aller graduellement », révèle-t-il. 

M. St-Gelais rappelle que des projets comme le sien permettent de mettre des choses en place, de les tester et de voir quels sont les défis et les embûches. « Il y a toute l’acceptation sociale aussi qu’il faut prendre en compte », ajoute-t-il.