Selon M. Cléroux, une meilleure croissance économique est attendue cette année. La baisse des taux d’intérêt devrait favoriser la consommation. De plus, l’inflation est sous contrôle au Canada, soit à 1,8 %, ce qui est le plus bas taux depuis la pandémie. Les prix ont une plus grande stabilité, ce qui permet de meilleures prévisions pour les entrepreneures et consommateurs.
L’économie canadienne devrait ainsi se redresser en 2025, avec une croissance de 1,5% du PIB. L’économie québécoise avait pour sa part amorcé sa reprise avant même la baisse des taux, notamment en raison de la consommation soutenue et d’une hausse des mises en chantier. On s’attend à une croissance du PIB réel de 1,5 % en 2025.
Les dépenses gouvernementales élevées et les projets majeurs d’investissements, comme ceux d’Hydro-Québec (100 G$) et Norvholt (7 G$), devraient contribuer à cette hausse, selon l’économiste. Celui-ci a également souligné les investissements de 500 M$ prévus par Microsoft pour l’expansion de ses activités en IA, de même que des projets de construction d’usines de véhicules électrique pour 1,2 G$. Les prévisions estiment toutefois que les investissements des entreprises devraient rester modestes au Canada en 2025.
Marché du travail
Pierre Cléroux a précisé qu’au cours des dernières années, les salaires ont augmenté plus vite que l’inflation au Québec et plus rapidement que dans les autres provinces. Le marché du travail est serré, avec un taux de chômage plus bas au Québec (5,7 %) qu’ailleurs au Canada, ce qui génère une plus grande compétitivité salariale. « C’est une bonne nouvelle pour les consommateurs, mais moins pour les entreprises », a-t-il affirmé.
Le revenu disponible demeure pour sa part plus élevé en 2024 qu’en 2019, tant au Québec qu’au Canada, ce qui contribue à la croissance économique. Les consommateurs ont d’ailleurs l’intention de dépenser plus en 2025. L’épargne est toutefois assez élevée chez les Canadiens, avec 60 milliards dans leur compte en banque.
Au Saguenay–Lac-Saint-Jean, il y a eu création de 6 000 emplois depuis un an. L’économie régionale est actuellement dans une meilleure position qu’à pareille date l’an dernier. Le taux de chômage se situe à 3,9 %, ce qui signifie que la main-d’œuvre demeure un enjeu.
Des incertitudes
L’élection de Donald Trump amène son lot d’incertitudes pour les économies canadiennes et québécoises. Il promet d’abord une réduction des impôts, ce qui aiderait l’économie américaine et, possiblement, celle canadienne également. Cependant, les tarifs douaniers peuvent avoir un impact négatif au pays. La récession reste une possibilité, mais le tout va dépendre du nombre de tarifs ainsi que du montant. Selon les industries affectées, l’impact ne sera pas le même. Des taux de 10 % n’auront pas d’impact majeur, alors que ceux 25 % pourraient se faire sentir. Le plus gros danger, c’est l’incertitude, qui freine les entrepreneurs dans leur investissement.
La performance des exportations canadiennes demeure ainsi incertaine en 2025. Il faut toutefois rappeler que la majorité de l’économie canadienne est basée sur la consommation. Pierre Cléroux ne s’inquiète pas outre mesure du cours du dollars. À 69 cents actuellement, celui-ci se trouve à un niveau assez bas, ce qui favorise les exportations, mais rend plus difficile les importations.
Démographie régionale
Concernant la démographie régionale, Emna Braham considère que le vieillissement de la population devrait avoir un effet moindre en 2030. En effet, pour 100 départs à la retraite dans 15 ans, 108 jeunes seront présents pour les remplacer, comparativement à 87 en 2013.
À ce moment, le vieillissement risque de se faire sentir plus dans les domaines de la santé plutôt que du côté du marché du travail. Il va donc falloir prévoir plus de financement public plutôt qu’une pénurie de main-d’œuvre.
Difficultés de recrutement
Les difficultés de recrutement s’estompent tranquillement dans la région. On constate en 2024 une diminution des postes vacants dans la région et une légère hausse du nombre de chômeurs par poste vacant. Il y avait ainsi environ 1,3 candidat par poste vacant l’an dernier. Le ralentissement de l’économie et l’augmentation de l’immigration temporaire ont contribué à cette croissance. Il y a eu 3500 immigrants temporaires au Saguenay, soit quatre fois plus qu’en 2022. C’est dix fois plus que le nombre d’immigrants permanents.
La région a également amélioré son bilan, avec un solde migratoire positif depuis la pandémie. Cela serait principalement dû à la rétention des jeunes, plutôt qu’à l’arrivée d’individus.
Selon Mme Braham, la pénurie de main-d’œuvre est majoritairement derrière nous. Il y a encore une grande disparité entre les secteurs économiques. Certains services restent toujours en difficulté. Le domaine qui demande le plus de candidat dans la région est celui des ventes et services, avec 1 155 postes vacants. Il est suivi des Métiers, transport, machinerie et domaines apparentés avec 830 emplois disponibles. Le secteur des Sciences naturelles et appliquées et domaines apparentés occupe la troisième position avec 355 postes.
La clé du succès
La directrice de l’Institut du Québec estime que les travailleurs seront la clé du succès des projets à venir dans la région. On anticipe en effet une hausse majeure des besoins avec les investissements annoncés, qui auront aussi un effet multiplicateur sur d’autres industries comme les services professionnels, sociaux, de santé, etc.
Emna Braham croit qu’il sera donc nécessaire d’agir sur plusieurs fronts, soit d’augmenter le nombre de travailleurs qualifiés disponibles, mais également de s’assurer d’utiliser de manière optimale les talents disponibles, notamment grâce à un meilleur appariement entre les compétences et les besoins du marché et l’amélioration de la productivité.
« Nous avons encore des emplois de qualité à offrir, les opportunités sont là, nous allons continuer à accueillir les travailleurs », a réagi la ministre Andrée Laforest, présente sur place.
Du côté de l’immigration, les nouveaux objectifs des gouvernements canadien et québécois viennent semer l’incertitude. Une réduction de 500 000 immigrants non permanents cette année et en 2026 risque de limiter la croissance économique un peu partout au pays et la région ne fait pas exception. Cette baisse de l’immigration temporaire signifie moins d’étudiants et moins de travailleurs disponibles sur le marché pour combler les emplois disponibles. L’effet de la baisse des immigrants sera toutefois plus graduel qu’initialement prévu.