SAINTE-JEANNE-D’ARC – Seul abattoir de proximité dans le haut du Lac-Saint-Jean, la ferme familiale Harvey de Sainte-Jeanne-d’Arc a comme projet d’ouvrir au cours de la prochaine année une petite usine d’équarrissage pour les déchets de l’industrie des viandes, selon son propriétaire Dominique Harvey.
Il s’agirait de la seule usine du genre dans la région et c’est ce qui incite M. Harvey à aller de l’avant dans ce projet, étant donné qu’il doit faire appel à une compagnie de Montréal pour récupérer les déchets de son abattoir, une procédure qui représente une dépense d’environ 400 $ par semaine.
« Nos déchets sont récupérés aussi en partie par un éleveur de chiens de traîneau qui a aussi un cheptel de loups à Girardville. On parle de viandes crues pour les gros chiens qui vivent dehors l’hiver. Ils doivent s’approvisionner dans les usines, car nous n’avons pas le droit de vendre directement parce que nous n’avons pas d’installations adaptées à la revente », explique Dominique Harvey.
Ainsi, l’usine d’équarrissage de la ferme à Sainte-Jeanne-d’Arc nécessitera un investissement de l’ordre de 50 à 60 000 $, ce qui permettra d’éliminer presque à 100 % les coûts de récupération des déchets. « Il faut construire une bâtisse attitrée et installer des congélateurs pour geler la viande dans le but de transformer les os, les rebuts et essayer de récupérer les fumiers à l’intérieur de l’estomac pour les étendre aux champs. Il y a plein de choses que l’on peut transformer. Je vais essayer d’avoir de l’aide de nos députés régionaux pour le financement de ce projet », ajoute l’agriculteur.
Abattoir et boucherie
Bon an mal an, la ferme Harvey abat de 250 à 300 bœufs dans son abattoir construit il y a quelques années avec les équipements intérieurs comme la cage de contention, la structure pour amener la bête jusqu’aux chambres froides, le dépouillage, etc. « Ça nous permet d’abattre à forfait pour les producteurs agricoles et puis ça nous donne l’opportunité de pouvoir abattre notre propre bœuf et le commercialiser. On peut le vendre seulement à des particuliers (pas dans des commerces et restaurants). Ça nous permet aussi d’avoir deux points de vente, à la ferme et un autre ailleurs. Pour nous, c’est à Sainte-Jeanne-d’Arc chez Crevier, aux abords de la route 169. Non, il n’existe pas de formation spécifique pour l’abattage. Ça m’a été transmis de père en fils et je fais la même chose avec mes garçons. Évidemment, la MAPAQ et les inspecteurs nous aident au bon fonctionnement de tout cela avec la manière de procéder pour la salubrité, le bien-être animal pour qu’il ne souffre pas et pour que tout soit fait en bonne et due forme », explique l’éleveur du bœuf Highland qui est particulièrement recherché pour son rendement et son goût relevé. La majorité des bœufs abattus proviennent des producteurs locaux comme la ferme Gérard Boulianne et Fils de Saint-Félicien, la Ferme des marécages à Saint-Méthode, ainsi que les fermes Jessie Boulianne et Guy Duchesne à Normandin.
En plus de l’abattage, la période automnale est très active à la ferme Harvey avec la découpe du gibier, plus particulièrement l’orignal et le chevreuil à raison de 100 à 150 bêtes annuellement. « C’est pourquoi on se limite à un bœuf par semaine pendant cette période pour maintenir le comptoir chez Crevier. La découpe est très importante pour nous. D’ailleurs, on ne fait pas l’abattage de bœuf sans la découpe, car il faudrait charger trop cher et on doit rentabiliser l’entreprise. Le tarif pour abattre une bête est d’environ 100 $, alors que le prix de la découpe, selon le poids de la carcasse, varie de 300 à 480 $ approximativement. »
Certification bio ?
Dominique Harvey souligne que sa ferme n’a pas la certification bio, tout en précisant qu’il peut se targuer d’offrir le même type de produit naturel. « Nous ne remplissons pas toutes les exigences, mais nous avons les plus importantes. Nous n’utilisons pas d’hormones de croissance, d’antibiotiques de prévention, nos animaux sont nourris au pâturage et avec cela, nous offrons une viande de qualité à nos clients. Et dans nos champs, on n’étend pas de produits chimiques. On utilise vraiment le fumier des bêtes. Je suis certain qu’il ne manquerait pas grand-chose pour obtenir cette certification bio, mais il faut embarquer dans l’association des producteurs bio et il y a des coûts reliés à cela. Je ne pense pas que ça vaut la peine de payer pour offrir presque le même produit à nos clients. »
Troisième génération
Fondée au début des années 40 par François Harvey, Dominique représente la troisième génération de la famille après avoir pris la relève de son père Bertrand. « La boucherie et l’abattoir sont mes initiatives qui remontent respectivement à 2005 et 2016. Possiblement que l’on pourra passer à la quatrième génération, mais je ne veux pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Actuellement, toute la famille met la main à la pâte, soit ma conjointe Bianca Lizotte, ainsi que nos trois garçons Loïc (17 ans), Ludovic (15 ans) et Thomas (8 ans). Nous n’avons donc pas de problème de main-d’œuvre pour l’instant, du moins », laisse tomber l’agriculteur qui compte sur un cheptel de 45 bêtes.