Auteur

Frédérica Fortin-Foster

SAINT-FÉLIX-D'OTIS — L'inflation est sur toutes les lèvres depuis quelques mois ; essence, alimentation, logement, chauffage et autres. Le coût du panier d'épicerie est surveillé de près par les Québécois qui voient leur facture augmentée considérablement. Les prix sont à la hausse notamment dans le domaine de l'alimentation, mais qui dans la chaîne d'approvisionnement en profite réellement ?

Les agriculteurs de la région dénoncent les multinationales qui s'enrichissent sur le dos de l'inflation. Jérôme Côté-Allard, copropriétaire de la ferme Les Paysans du Fjord à Saint-Félix-d'Otis souligne l'injustice de la redistribution au sein de la chaîne d'approvisionnement.

« Les salaires des PDG augmentent considérablement chaque année alors que ceux des commis d'épicerie, des producteurs, des camionneurs et des petits restaurateurs n'augmentent que très peu. Les épiceries ont tendance à encourager davantage de grosses entreprises québécoises ou internationales au lieu des entreprises locales pour leur capacité de production et leur prix plus bas. Le prix du panier d'épicerie augmente et en tant qu'agriculteurs, nous ne recevons pas plus d'argent, les profits vont aux distributeurs et ça revient aux consommateurs de payer les salaires des patrons de ces dites multinationales », explique-t-il.

Un défi de taille

Selon M. Côté-Allard, une nouvelle tendance marketing serait promue par les multinationales pour générer davantage de profit. Les magasins de grandes surfaces utiliseraient le "Greenwashing ".

C'est-à-dire mettre en avant-plan les produits biologiques et verts qui sont souvent locaux. Les citoyens consomment les produits voulant encourager les PME biologiques d'ici, mais en réalité l'argent ne se rend pratiquement pas.

« Même si nous avons une place dans les épiceries à l'occasion et que les gens souhaitent nous encourager, c'est souvent peu rentable. Sur le montant initial à l'épicerie, c'est 50 % qui vont dans les poches du distributeur et non à l'agriculteur. Tant que le système de distribution au Québec passera à travers des chaînes qui ne sont pas gérées en faveur des producteurs, mais bien pour les distributeurs, les moyens de mise en marché locaux seront beaucoup plus difficiles. »

Les épiceries ont également le gros bout du bâton lorsqu'il s'agit de passer un contrat avec les agriculteurs d'ici.

« Une ferme X avait obtenu un contrat avec une épicerie. Elle avait besoin de trois ou quatre caisses de tomates cerises par semaine. L'agriculteur a besoin de se préparer en conséquence : réserver une serre, planter les plants et les entretenir jusqu'à ce qu'ils soient prêts à être récoltés dans quatre mois. Beaucoup d'heures et d'argent sont dépensés pour que cette épicerie ait finalement besoin d'une seule caisse par semaine. L'agriculteur est donc pris avec trois autres caisses de tomates cerises par semaine qu'il doit jeter parce que son acheteur en a plus besoin », renchérit-il.

Acheter à la source

La ferme biologique et diversifiée est à sa troisième année de production. Elle offre plusieurs volets aux Saguenéens afin de promouvoir l'achat local, mais également biologique. Pour les trois propriétaires : Jérôme Côté-Allard, Alexandre Brunelle et Kevin Lussier c'est important d'encourager les petites entreprises d'ici en achetant à la source sans aucun intermédiaire.

« Nos valeurs principales sont liées avec l'écologie puis à la communauté. On essaie de faire valoir l'agriculture, l'idée c'est que les gens se reconnectent de plus en plus à la terre à travers notre ferme. Suivant cet ordre d'idées, nous faisons beaucoup d'évènements autres que la production soit le brunch champêtre, la visite de la ferme, la pizzeria, un kiosque, un bal de danse annuel et plusieurs autres », mentionne Jérôme Côté-Allard qui s'occupe notamment du volet végétal et animal de l'entreprise.

Les trois volets offerts par la ferme sont le végétal, l'animal et l'évènementiel. La ferme Les Paysans de Fjord n'utilise pas de machinerie, de pesticides ou d'engrais. Dans les valeurs et la mission de leur entreprise, cultiver à la main et offrir des produits biologiques sont une priorité.

« Pour nous, c'est une chose naturelle d'offrir à la population de goûter aux saveurs à la source et d'apprendre une agriculture riche, car sans cette communauté, l'agriculture comme on la vit ne pourrait pas exister et d'un autre côté, les gens ont besoin de l'agriculture pour se nourrir. L'un ne va pas sans l'autre. Nous avons trois volets et un quatrième devrait arriver en 2024. Les Fleurs Ensorcelées, deux filles de la région qui démarrent une ferme florale en collaboration avec nous », précise-t-il.

Récompense inespérée

Jérôme Côté-Allard représentant la ferme Les Paysans du Fjord, a récemment été finaliste de deux concours provinciaux : le concours Tournée vous vers l'excellence ! et celui de Cultiver le changement. Il a remporté une bourse en argent de 3000 $ et plusieurs autres prix.

« Nous sommes contents de la visibilité et de l'opportunité. C'est toujours une petite tape dans le dos quand on voit que les années de travail rapportent en région, mais également au Québec. Notre ferme est valorisée et j'en suis fière », conclut M. Côté-Allard.

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