SAGUENAY – A3 Surfaces s’apprête à franchir de nouvelles étapes dans la commercialisation de ses produits en aluminium anodisé antimicrobien, alors qu’elle commence à obtenir des contrats pour certains projets et qu’un projet pilote devrait bientôt débuter à l’hôpital de Chicoutimi pour tester les produits en contexte hospitalier.
A3 Surfaces a développé elle-même sa technologie, qui permet d’intégrer des substances antimicrobiennes dans l’aluminium anodisé pour fabriquer différents produits, tels que poignées de portes, plaques, comptoirs, revêtement de murs ou de planchers, etc. Les substances intégrées rendent la surface bactéricide, c’est-à-dire qu’elle détruit les bactéries qui se retrouvent en contact avec elle en moins de cinq minutes, avec un début d’action en quelques secondes. Cette technologie pourrait être révolutionnaire pour les milieux hospitaliers ou de l’alimentation, par exemple. « On a une surface autodésinfectante. Ça change les méthodes de désinfection. […] Ça élimine du temps, de l’entretien, avec une meilleure efficacité antimicrobienne », souligne Martin Lambert, vice-président de l’entreprise.
Projet pilote
Le projet pilote à l’hôpital de Chicoutimi permettra de documenter l’efficacité dans un cadre d’utilisation réel. Il s’agit d’un projet de 200 000 $. Deux chambres d’isolement et salles de bain, où se retrouvent en majorité des patients qui sont par exemple positifs au SARM, C. difficile ou ERV, seront analysées. L’une des chambres sera modifiée avec les surfaces antimicrobiennes de l’entreprise saguenéenne, alors que l’autre demeurera telle quelle et servira de point de comparaison (contrôle positif).
L’entreprise espère pouvoir débuter en janvier, puisque plusieurs composantes (notamment murs, lavabos, tuiles de plancher) ont déjà été fabriquées. Elle n’attend plus que la confirmation de certaines subventions pour aller de l’avant. D’autres éléments, ceux que le patient risque de toucher, comme la tête de lit ou les meubles près du lit, seront aussi réalisés pour le début du projet.
Évaluation globale
L’expérience devrait s’étaler sur 12 semaines au minimum, avec possibilité de poursuite sur quelques semaines selon les résultats obtenus. Des prélèvements seront réalisés régulièrement par un laboratoire externe, puis examinés. À terme, un comité d’évaluation se penchera sur la technologie pour en faire un bilan global. « Il va y avoir des critères. Ils vont évaluer, non pas seulement la capacité antimicrobienne, mais aussi la facilité d’installation et d’entretien. Ils vont faire un portrait général pour dire quels sont les bénéfices des matériaux d’A3 Surfaces », explique M. Lambert.
Le ministère de la Santé et des Services sociaux, qui devrait supporter le projet par le biais d’une subvention, a demandé à avoir un rapport à la fin de l’évaluation. « Si notre technologie permet de diminuer la transmission des infections nosocomiales et qu’ils voient des avantages, ça pourrait être élargi à la grandeur du Québec. Ça pourrait avoir un effet de levier pour nous. C’est crucial pour A3 Surfaces. On va se servir de ces résultats pour aller plus loin dans le domaine », précise le vice-président.
Commercialisation
L’entreprise basée à Saguenay poursuit également ses efforts de commercialisation pour ses produits. « On investit près d’un demi-million de dollars dans les deux prochaines années en commercialisation, qui comprend la certification, la normalisation et la participation à des activités commerciales », affirme Martin Lambert. Déjà, les efforts portent leurs fruits, alors qu’A3 Surfaces a commencé à recevoir des commandes pour certains projets, notamment dans des écoles.
Elle mise actuellement sur la signature d’ententes avec des distributeurs. « Notre gros défi, c’est de conclure une entente avec un manufacturier qui distribue au Canada et aux États-Unis. Au Canada, on est en train de se normaliser pour répondre à ses critères. Un autre objectif pour les 6 à 12 prochains mois, c’est de se trouver un distributeur pancanadien. Pour ça, on doit se normaliser sur plusieurs points, ce qu’on est en train de terminer. […] Le distributeur est très intéressé par nos produits », indique M. Lambert, ajoutant que des discussions sont en cours avec d’autres distributeurs.
À la demande d’un distributeur qui touche les marchés canadiens et américains, A3 Surfaces a également entamé un processus de certification EPA, qui lui permettra de vendre ses produits aux États-Unis. Elle travaille également avec Santé Canada, notamment pour obtenir la certification ANO pour le domaine alimentaire.
L’entreprise participe finalement à plusieurs salons réunissant des architectes, des gestionnaires de bâtiment publics et privés et des contracteurs. Elle s’est également inscrite à l’AHSSS, association regroupant des gestionnaires et employés de services d’hygiène et de salubrité d’établissements de santé et d’hébergement québécois. A3 Surfaces a d’ailleurs remporté un prix Coup de cœur pour sa Barre d’appui A3SM dans les salles de bain publiques lors du salon Contech, le 25 octobre.
Vers l’usine d’anodisation
A3 Surfaces vise la construction d’une usine d’anodisation dans la région d’ici un an à un an et demi, si la demande pour ses produits et les revenus sont au rendez-vous.
« Dans notre plan de développement, le but, c’est d’aller en usine. On travaille ça activement. Ça va dépendre de nos efforts de commercialisation qui vont déterminer vers quand on va le faire », affirme Martin Lambert, vice-président de l’entreprise.
Ce déplacement de la production vers une usine d’anodisation industrielle permettra d’augmenter la dimension et la quantité de produits fabriqués. « On a un plan pour une usine avec des bassins plus grands pour les grandes surfaces. Tant qu’à y aller on aimerait y aller dans des bassins de 12 pieds, selon le coût », mentionne M. Lambert.
Les plans de l’usine sont déjà réalisés et deux sites ont été répertoriés, l’un offrant des locaux déjà existants et le deuxième nécessitant une construction neuve. Il reste à obtenir les autorisations du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. « Il faut le planifier maintenant, parce qu’on a les soumissions, on connaît les coûts du projet », précise M. Lambert, qui précise toutefois que l’entreprise n’ira pas de l’avant tant que les rentrées d’argent ne seront pas suffisantes.
A3 Surfaces investit en recherche et développement
En plus de travailler sur la commercialisation de ses produits, A3 Surfaces investit en recherche et développement dans le but de développer de nouvelles avenues ou améliorer sa technologie. Elle prend actuellement part à trois projets en collaboration avec trois centres de recherche universitaires.
L’entreprise saguenéenne contribue financièrement aux projets de recherche de ces centres universitaires, qui bénéficient aussi d’une subvention d’organismes provinciaux ou fédéraux. « Nous, quand on a des questions, on n’a pas nécessairement les moyens de faire ces différentes analyses. Les centres de recherche ont des équipements qu’il n’y a pas au privé. Ça nous permet de comprendre différentes choses, de voir les caractéristiques de nos matériaux, comment ils réagissent avec les microorganismes », explique Martin Lambert, vice-président d’A3 Surfaces.
À l’université McGill, grâce à une subvention du Conseil national de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), la professeure Nathalie Tufenkji et son équipe se penchent sur l’efficacité de la technologie pour différentes applications, notamment des surfaces permettant d’éliminer les biofilms.
Le Fonds de recherche du Québec – Nature et technologie a aussi octroyé une subvention de 300 000 $ à l’Université de Sherbrooke et à l’UQAC pour des recherches liées à A3 Surfaces. Une équipe de l’Université de Sherbrooke, menée par la professeure Nathalie Faucheux, travaille donc à valider la technologie par rapport à la toxicité qu’elle pourrait avoir sur différentes cellules du corps. Du côté de l’UQAC, c’est le développement d’une surface antiadhésive et antimicrobienne qui intéresse les professeurs X. Grant Chen et Dilip Sarkar.
A3 Surfaces s’intéresse aussi au secteur des tours de refroidissement, où sa technologie pourrait empêcher la prolifération de bactéries, telles que celle qui cause la légionellose, par exemple. Après avoir développé des surfaces résistant aux conditions de ces tours et fait des tests concluants sur plusieurs paramètres, l’entreprise envoie actuellement des pièces à des manufacturiers aux États-Unis afin qu’ils les testent et envoient leurs commentaires. « Le but serait de faire un prototype de tour de refroidissement, mais nous n’avons pas encore d’entente finale », conclut M. Lambert.