SAGUENAY – La solitude peut peser en période d’isolement sociale et la présence d’animaux est souvent salvatrice dans les situations comme celle-ci. Placés comme services essentiels, par le gouvernement Legault, les commerces d’aliments et de fournitures pour les animaux de compagnies opèrent toujours. Quels sont leurs défis et leurs enjeux ? Portrait de ce secteur économique.
En entrevue, la directrice des communications, Susan Dankert, chez Pet Industry Joint Advisory Council of Canada (PIJAC), précise l’importance du secteur en soulignant que plus de 52% des ménages canadiens possèdent un animal de compagnie. C’est donc sans grande surprise de voir les animaleries afficher « ouvert » sur leur porte.
« Nous avons eu peur lorsque nous avons écouté la conférence de presse du premier ministre François Legault, explique Doriane Larouche de l’animalerie Dorie & Compagnie de La Baie. Dans certaines épiceries, ils vendent de la nourriture pour les animaux, donc nous ne savions pas trop si nous pourrions rester ouverts et si nous étions considérés comme un service essentiel ».
Un sentiment d’inquiétude qui s’est propagé également dans la communauté comme l’explique Line Tremblay de l’animalerie Jonas sur le boulevard Talbot à Chicoutimi « Le 23 mars, à l’annonce, ç’a été complètement fou. Il y avait une file de personnes jusqu’au commerce voisin. J’ai dû mettre des limites par client sur la nourriture pour chat et chien. Dans cet après-midi, j’ai fait six fois mon chiffre d’affaires. »
Revoir les façons de faire
Une fois les listes des services essentiels rendues publiques par le gouvernement, les ventes de fournitures et de nourritures se sont stabilisées pour revenir à point « normal ». C’est maintenant le secteur de l’adoption qui connait un engouement soudain. « Depuis lundi, sept animaux ont été adoptés et deux autres sont en attendant, mais il est fort à parier qu’ils seront partis d’ici vendredi. Pour la même période l’an passé, on comptait une trentaine d’adoptions contre une quarantaine pour ce mois-ci, souligne Claudia Côté, directrice générale de la SPCA Saguenay ».
Pour Doriane Larouche et Line Tremblay, le même phénomène se produit également où la demande pour les chiots et la vente de rongeurs ont significativement augmenté. « En période de crise, le bienfait qu’un animal peut procurer aux gens est incroyable, explique la propriétaire de l’animalerie Jonas ».
Comme pour les autres types de commerces, des mesures d’hygiène très strictes ont été mises en place et cela inclut la limitation de clients en magasin, ne pas toucher les animaux avant l’achat et la distanciation de 2 mètres. Des procédures qui forcent la créativité et qui imposent de nouveaux modèles d’affaires. « À la SPCA Saguenay, nous avons créé un catalogue en ligne puisque nos locaux sont fermés au public. Les animaux sont donc affichés avec leur fiche technique. Les gens peuvent donc envoyer leur candidature et mentionner l’animal qu’ils désirent et par la suite, nous pouvons organiser une rencontre sécuritaire, explique Claudia Côté ». Dans le commerce de détail, c’est la vente en ligne et les services de livraison qui gagnent en popularité. Les deux animaleries contactées affirment avoir introduit des services de e-commerce et de livraison depuis l’arrivée de la pandémie.
Appréhension
Susan Dankert de PIJAC Canada soulève beaucoup d’appréhension si la situation venait à s’éterniser. Selon elle, « l’animalerie offre une ressource communautaire pour obtenir des conseils sur les animaux de compagnie et pouvoir accéder à un professionnel pour répondre aux questions de soins ». Elle précise qu’actuellement, les voyages à l’animalerie sont très courts, ce qui n’est pas propice à ces conversations importantes.
Sur le plan des affaires, la reprise lente à la vie normale pourrait aussi nuire à l’industrie. « À la longue, on risque d’avoir une baisse des ventes. Avant, les gens entraient dans notre commerce et achetaient par impulsion un nouveau jouet ou encore un nouveau collier. Aujourd’hui, avec les procédures, les personnes qui désirent rentrer doivent nous signaler ce qu’ils viennent chercher. Ça les limite donc dans leur processus d’achat, raconte Line Tremblay ».
Sur le plan de la santé animale, la situation pourrait aussi avoir des effets négatifs. « La coupe de griffes et de toilettage interdite pourrait occasionner des problèmes, selon Doriane Larouche. Si jamais les griffes de l’animal se courbent, ça peut occasionner des coûts d’opération chirurgicale aux propriétaires. De plus, un animal qui n’a pas reçu de toilettage depuis un moment pourrait le rendre plus nerveux et nous exposer à des morsures ».