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Maxime Hébert-Lévesque

SAGUENAY – La Corporation des thanatologues du Québec (CTQ) est l’une des voix les plus fortes pour représenter le secteur funéraire auprès des gouvernements. Comme tous secteurs, le domaine fait face à des enjeux, des défis et un besoin en ressources humaines. Pour la CTQ, la mission est d’outiller ses membres face aux changements et de démystifier le rôle des entreprises funéraires auprès de la population.

Bien qu’il s’agisse d’un secteur d’activité fonctionnant 24 heures sur 24, sept jours par semaine et sans interruption lors des jours fériés, le domaine funéraire est méconnu de la plupart des gens. « Tant au niveau des acteurs gouvernementaux qu’au sein de la population, la mission de la CTQ est de valoriser le professionnalisme de ses membres. Le secteur est mal compris parce qu’il est peu attrayant. Personne ne se réveille un matin avec l’envie d’organiser ses arrangements funéraires. Notre devoir est de rendre l’expérience plus “agréable” et démontrer que notre savoir-faire ne consiste pas seulement en la crémation », souligne Annie St-Pierre, directrice générale de la CTA.

En effet, selon l’organisme Innovation, Sciences et Développement Canada, il y aurait au Québec plus de 250 entreprises identifiées comme étant des salons funéraires. En plus d’employer bon nombre de personnes, ces PME sous-traitent et mandatent plusieurs acteurs externes pour divers contrats, créant ainsi un véritable écosystème économique. Avec 500 membres actifs, la CTA révèle un secteur d’activité bien vivant.

Un ajustement nécessaire

Au Québec, depuis le milieu des années 90, la Régie des Rentes a statué qu’un montant de 2500 $ serait octroyé à toute personne ayant suffisamment cotisé au cours de sa vie. Cette prestation devait couvrir initialement les frais funéraires. « Nous sommes en 2021 et la prestation est toujours de 2500 $. Une problématique importante puisque ça sous-entend qu’au Québec on peut organiser un rite funéraire décent pour cette somme, ce qui est faux. Les familles en deuil arrivent donc aux portes d’un complexe et l’incompréhension est totale. Cela crée beaucoup de frustration tant pour la population que pour les entreprises funéraires. Aujourd’hui, le montant alloué ne couvre que la crémation. La CTQ est en négociation avec l’État pour, au minimum, rattraper l’inflation et offrir 3800 $. Ces argents pourraient couvrir l’incinération, la cérémonie et la disposition. »

Un enjeu de main-d’œuvre

Dépendamment du type d’entreprise, l’enjeu de main-d’œuvre diffère. Pour une PME comme la Maison Marc Leclerc de Saint-Félicien, la relève familiale est présente et assure une continuité pour les prochaines décennies. Toutefois, pour certains le manque éventuel de thanatopracteurs se fait sentir. « L’embaumeur est un métier réglementé qui nécessite d’avoir une formation de niveau collégial et détenir un permis renouvelable pour pratiquer. Pour l’instant, il n’y a qu’au Collège de Rosemont à Montréal que la discipline se donne. » Une particularité qui pose peut-être quelques embuches aux gens en région qui aimeraient accéder à cette formation. « Présentement des institutions travaillent avec le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur pour obtenir l’autorisation de donner la formation. »

Des rites funéraires qui évoluent

Les nouvelles générations qui délaissent la religion ont pour effet de modifier les rites funéraires. « De plus en plus, on aperçoit un désir de personnaliser les rites. On constate un désir d’honorer la mémoire du défunt plutôt que de la pleurer. Des entreprises vont s’adapter à cette réalité et proposer des salles de commémoration ou de réflexion plutôt que la chapelle traditionnelle. Il y a aussi un changement dans l’appellation des lieux funéraires. On parle davantage de complexe de nos jours que de Salon. Les gens veulent faire tout au même endroit et les cérémonies à l’église sont moins nombreuses. »

En 2020, c’était 41 % des cendres qui ont été inhumées dans un cimetière au Québec contre 53 % en 2015, selon les chiffres de la CTQ. Les cimetières appartenant, pour la plupart, à des paroisses, les gens préfèrent disposer des restes de leurs proches autrement. Le columbarium est une option qui gagne en popularité. En 2016, c’était 9 % des cendres qui s’y retrouvaient et aujourd’hui, 12 %. Toutefois, comme pour l’enjeu de main-d’œuvre, on observe une différence entre Montréal et les régions.

Suivre les tendances

La webdiffusion a gagné le domaine funéraire au cœur de la pandémie de COVID. Les restrictions sanitaires s’appliquant sur l’ensemble des activités, les entreprises ont adopté la technologie. « Diffuser une cérémonie était déjà une pratique existante, toutefois la pandémie a accéléré le phénomène et aujourd’hui la majorité des salons l’offrent. » La CTQ, pour accompagner ses membres dans les transformations, met à leur disposition deux certifications ainsi qu’une norme développée avec le Bureau de normalisation du Québec (BNQ). « Ces outils sont mis à jour chaque année et assurent que la qualité des services ne change pas, mais évoluent avec les nouvelles tendances et pratiques », conclut Annie St-Pierre.

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