Auteur

Carol Néron

Saguenay, ville maritime. Cette expression n'apparaît pas souvent dans les médias de la région même si notre développement économique continue de dépendre grandement de notre proximité avec la mer. La raison réside peut-être dans le souvenir de ces affreux réservoirs de pétrole en train de rouiller en plein centre-ville de Chicoutimi pendant la décennie soixante-dix. Notre mémoire collective garde encore les traces de ce désastre environnemental qui s'étendait jusqu'au rang Saint-Martin.

Les installations portuaires d'Alcan à La Baie, devenue Rio Tinto, ont été jusqu'à une période récente la seule référence qui nous rappelait le lien qui nous a toujours relié à l'océan Atlantique et aux Grands-Lacs grâce au fleuve Saint-Laurent. Il aura fallu attendre presque 2006, année de l'accession de La Baie au lucratif marché des croisières internationales, pour que notre ouverture, notamment sur la mer, retrouve la place qui lui revient dans les conversations. La Zone industrialo-portuaire (ZIP) de Grande-Anse, mieux connue sous le nom de Port Saguenay, a bénéficié également, à peu près à partir de cette année-là, du même impact positif.

Payant pour la ville et Port Saguenay

Le 11 septembre dernier, le Village portuaire de La Baie a accueilli son 500 000e croisiériste. Celui-ci a débarqué du Caribean Princess, un paquebot transportant 3120 passagers et 1200 membres d'équipage. D’ici la fin de la saison touristique prévue pour le 3 novembre, le quai des croisières aura accueilli 56 navires supplémentaires, ce qui portera le nombre d’accostages à plus de 80. C'est l'administration portuaire de Grande-Anse qui, au nom de la ville, gère le trafic au quai Algésiras-Lepage, lieu d'accostage des grands paquebots. Chaque capitaine qui y amarre son bateau doit verser à Port Saguenay un montant d'argent en fonction du tonnage de son bâtiment, ainsi que pour chacun de ses passagers qui y débarque. Saguenay trouve largement son compte dans le cadre de cette entente financière car elle bénéfice du même type d'avantages. En ce qui concerne le transport en vrac, Port Saguenay a connu une bonne saison en 2022 après une année 2021 qualifiée d'exceptionnelle. Environ 645 000 tonnes de marchandises ont été manutentionnées l'année dernière en comparaison de 1,2 million en 2021. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter pour cette baisse, mentionnait récemment le PDG Carl Laberge.

Un outil de développement mal-aimé

Grâce à ses installations portuaires rattachées aux réseaux ferroviaire et routier canadien, Port Saguenay est un outil de développement essentiel pour la région. Mais, il faut bien avouer que, lorsqu'il est question de grands projets en provenance du secteur privé, il a souvent mauvaise presse. Sa proximité avec l'aire d'observation des baleines dans le secteur de Tadoussac et celle des bélugas dans la baie Sainte-Catherine est loin de jouer en sa faveur. Ce qui ne l'avantage pas également, il est enclavé dans un parc marin. Le Quai des croisières doit d'ailleurs lui aussi tenir compte de cette réalité dans ses projets de développement et d'accueil des passagers. En 2021, afin d'améliorer la sécurité des travailleurs, Rio Tinto a investi 105 M $ dans la rénovation des quais Powell et Duncan, présents à La Baie depuis bientôt un siècle. La Zone industrialo-portuaire de Grande-Anse et le Quai des croisières se sont intégrées graduellement à ce premier outil de développement régional, consacrant par le fait même le statut de ville maritime responsable de Saguenay.

Environnement et économie

La délocalisation des vieilles installations portuaires du centre-ville de Chicoutimi vers Grande-Anse, au milieu de la décennie 80, avait comme objectif principal la création d'un site industrialo-portuaire éloignée des zones urbaines. Ce type d'approche implique forcément une incursion dans la nature sauvage et de ce qu'elle a de plus beau et qu'il faut protéger.

Saguenay, ville maritime, est confrontée aujourd'hui à cette situation et elle y fait face avec efficacité. Les résultats affichés par Port Saguenay et les croisières internationales, dans le respect de l'environnement, le démontrent clairement. Malheureusement, cette réalité est trop souvent ignorée.

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