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La Rédaction

N.D.L.R. : Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : « Industrie de la forêt : un potentiel responsable et durable », publié dans notre édition du mois d’avril.

Voici l’essentiel de l’allocution de M. Denis Lebel, PDG du Conseil de l’industrie forestière du Québec lors du Forum des communautés forestières du Québec :

« Il ne faut pas que les gens qui ont mis en place le régime forestier se sentent attaqués. Il faut se parler pour le moderniser, pour aider nos entrepreneurs à être plus compétitifs. L’harmonisation avec les autres utilisateurs de la forêt se passait bien avant l’arrivée du régime. Nous faisons face à de nombreux enjeux alors qu’après 10 ans, la compétitivité de l’industrie est mise à mal. Le système d’enchères, où 25% de notre bois est vendu, n’a rien réglé du litige avec le gouvernement américain ».

Denis Lebel rappelle que 50% de la production de bois du Québec est exportée chez nos voisins du sud, un marché qui représente 97 % de nos ventes de bois à l’étranger, ce qui rend notre industrie d’autant plus vulnérable aux soubresauts de ces acheteurs imprévisibles. Il explique aussi pour pallier cette menace constante les producteurs de la Colombie-Britannique notamment ont investi beaucoup d’argent dans la construction d’usines sur le territoire américain.

Le PDG lance cependant que la bonne nouvelle c’est que pour la première fois, le gouvernement québécois a mis en place un comité interministériel de gestion de la forêt, ce qui est de bon augure pour la suite des choses estime-t-il. L’homme souhaite également que les relations s’améliorent entre les représentants de l’industrie et les fonctionnaires de l’état. « Pour les fonctionnaires concernés par notre secteur d’activité nous sommes des clients et il faudrait être traités comme tel ».

Il faut applaudir l’industrie

Sur les industriels et les travailleurs de la forêt, Denis Lebel dit ceci : « On devrait être aussi fiers de notre industrie forestière ainsi que des hommes et des femmes qui en vivent, tout autant qu’on est fiers d’Hydro-Québec et de ses grandes réalisations. On a un important devoir d’information auprès de nos populations. Il faut que notre industrie forestière soit mieux perçue. On devrait applaudir les entreprises forestières qui gèrent la décroissance depuis des années tout en continuant à fabriquer des produits de qualité ».

Il explique également que les producteurs et transformateurs de la forêt réussissent malgré tout à contrôler leurs coûts dans un contexte ou la prévisibilité des dépenses et des revenus sont incertains. Il cite notamment l’enjeu des chemins forestiers alors que les entrepreneurs ont à se déplacer énormément sur les sites de coupes pour récolter les tiges et vivent d’importantes contraintes pour l’entretien des voies d’accès à la ressource.

Denis Lebel a rappelé que l’énorme potentiel de la forêt pour lutter contre les changements climatiques. Toutefois, il faudra que ça se fasse avec de la science et de la connaissance. Mais la plantation de nouvelles tiges est essentielle, jusqu’au point où il faudrait que l’on considère utiliser des terres en friche disponibles pour augmenter le potentiel de récolte. « La forêt est potentiellement le meilleur outil que nous ayons pour contrer les changements climatiques ».

Quelques mots sur le régime forestier en vigueur au Québec

En discussion depuis 2010 et mis en application en avril 2013, le temps que les contrats d’approvisionnement soient terminés, le régime forestier du Québec occupe une place importante dans le contrôle de la gestion et l’aménagement des forêts publiques par la mise en vigueur de la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier (LADTF), Loi qui a remplacé la Loi sur les forêts.

Beaucoup de changements ont été imposés à l’industrie forestière qui emploie annuellement environ 60 000 travailleurs directement au Québec*. Voici un bref récapitulatif de certaines modifications mises en place et des problématiques y étant rattachées.

Responsabilité du ministère

Suivant l’article 52 de LADTF, le ministère est maintenant responsable, au détriment des industriels, de l’aménagement durable des forêts du domaine de l’État et de leur gestion, tels que le mesurage des bois, la planification forestière, la réalisation des interventions en forêt, etc.

Garantie d’approvisionnement

Par l’entrée en vigueur de la LADTF, le contrat d’approvisionnement et d’aménagement forestier (CAAF) a laissé sa place à la garantie d’approvisionnement (GA). La GA donne le droit à son bénéficiaire d’acheter annuellement un volume de bois en provenance du territoire forestier du domaine de l’État en vue d’approvisionner l’usine de transformation du bois pour laquelle la garantie est accordée.

Création du BMMB

Dans la foulée de l’adoption de la nouvelle Loi, le Ministère a réduit les volumes de bois, anciennement les CAAF, afin qu’une quantité soit disponible pour être mise à l’enchère par le Bureau de mise en marché des bois (BMMB) (La LADTF, au sein du ministère, a créé une unité administrative, le BMMB dans une perspective de libre marché pour la vente d’une quantité de bois, dont l’objectif était d’obtenir la juste valeur marchande des bois et l’accessibilité aux volumes de bois pour tous.

La mise aux enchères se fait par appel d’offres par le BMMB. Le bénéficiaire des GA doit annuellement payer au Ministère une redevance, ainsi que divers frais prévus à la Loi. Le soumissionnaire gagnant signera par la suite, avec le BMMB, un contrat de vente de bois.

Autres mesures

La LADTF a permis la mise en place des forêts de proximité et a élaboré des mesures afin de partager les responsabilités découlant du nouveau régime forestier entre l’État, les organismes régionaux et les communautés autochtones.

Problématiques

Déjà que l’industrie forestière était touchée par une sévère crise, elle se plaint maintenant du fait que les objectifs du nouveau régime forestier ne seraient pas atteints.

Des dommages collatéraux découlant directement de la mise en vigueur de la LADTF semblent avoir été constatés, telle une augmentation considérable des coûts pour l’industrie forestière (redevances, droits de coupe, etc.).

Nous sommes en droit de nous poser la question, à savoir si les vœux pieux suivant l’implantation du nouveau régime forestier ont été atteints pour l’industrie forestière.

Entre les objectifs fixés par le législateur dans la LADTF et la réalité d’application par l’État, le fossé semble se creuser. Le Québec devra-t-il s’ajuster et ainsi modifier le déséquilibre causé par la mise en vigueur du nouveau régime forestier afin de permettre au secteur forestier d’être compétitif dans le marché, malgré l’instauration de la Loi, et ce, tout en respectant les droits et intérêts de chacun ?

*Donnée recensée par le MFFP (ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs)

Source : SBL Avocats et notaires

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