SAGUENAY — Gravitant dans une industrie cyclique où il est impératif de diversifier ses sources de revenus, Produits Forestiers Résolu est en bien meilleure position qu’il y a quelques années, où la crise du bois d’œuvre et la saga de la certification FSC lui ont fait très mal. Les mises en chantier et l’engouement de la rénovation depuis la pandémie ont permis à l’entreprise d’augmenter considérablement son chiffre d’affaires et de consolider ses opérations, notamment à l’Usine Kénogami.
« Nous sommes dans une industrie qui est très cyclique et où il est important de bien prévoir le futur en cas de ralentissement. Produits Forestiers Résolu (PFR) est active dans différentes filières : les produits du bois, la pâte kraft, le papier journal, les papiers à usages spéciaux ainsi que dans le tissu. Lorsqu’une des filières se porte bien, nous misons énormément sur celle-ci pour investir en R&D pour permettre de faire avancer notre expertise et assurer la pérennisation de nos différentes installations », explique Louis Bouchard, directeur principal, Affaires publiques et relations gouvernementales au Canada de l’entreprise forestière.
Une situation qui a nettement évolué
En 2017, le PDG de l’époque, Richard Garneau, mentionnait lors d’un cercle de presse qu’il y aurait davantage de ralentissement des activités dans les usines et que ces ralentissements seraient plus longs en raison de la crise du caribou forestier/norme FSC et de la crise du bois d’œuvre. Quatre ans plus tard, la situation a nettement évolué. Questionné sur la place que possède l’usine de Kénogami au sein de l’entreprise, le porte-parole précise que l’organisation fait tout en son pouvoir pour garantir une production continue et pérenniser les emplois. « Notre présence au Saguenay–Lac-Saint-Jean est importante pour nous. Nous avons une relation particulière avec la région puisque nous y sommes enracinés depuis plusieurs décennies et que nous y avons plusieurs usines. […] Dans le cas de l’usine de Kénogami, aucune entreprise sérieuse ne voudrait voir Kénogami fermée. Avec le projet de fibre cellulosique que nous développons avec Promotion Saguenay, l’UQAC et d’autres partenaires, nous visons à investir massivement dans l’usine. PFR a fêté ses 200 ans il y a quelques semaines. Notre objectif est d’être présents dans le paysage jonquiérois pour encore un autre 200 ans », image-t-il.
Papiers à usages spéciaux
Opérant une seule machine à papier depuis la fermeture de la machine numéro 6 en 2019, l’usine jonquiéroise, qui emploie plus de 200 personnes, se porte bien. Elle est affectée à la production de papiers à usages spéciaux, notamment utiles dans l’industrie du livre ou pour les papiers d’imprimante par exemple. « On est en mode croissance. On a eu des directions qui étaient dans le maintien des acquis et la pérennisation des activités. Tout ça, en raison des conjonctures qui ont été favorables ou moins favorables avec le temps. On a investi plusieurs dizaines de millions dans la fibre de cellulose et Kénogami pourrait en être l’un des chefs-lieux de production majeure. C’est un bon gage en termes de ce que Résolu peut faire dans sa présence », indique Louis Bouchard.
Investissements massifs
Rappelons également que PFR est tenu, en vertu de baux avec le gouvernement du Québec, d’investir des sommes dans la région, notamment parce qu’elle utilise la force hydraulique de la rivière Shipshaw. « Nous avons récemment renouvelé nos droits hydrauliques sur la centrale Jim-Gray. Le gouvernement nous octroie des droits pour nourrir nos usines d’Alma et Kénogami. En retour de ces droits hydrauliques, Résolu doit s’engager à faire des investissements structurants de 100 000 000 $ entre 2022 et 2032. La première tranche doit être faite dans des projets qui généreront de la valeur dans la
région », précise-t-il.
Bien qu’elle ait fait couler beaucoup d’encre par les craintes de fermeture définitive depuis le début des années 2000, par les arrêts de production temporaires et la fermeture de la machine numéro 6, la destinée de l’usine de Kénogami semble fixée. « Lorsque la conjoncture est bonne dans des divisions comme le bois d’œuvre, ça nous permet d’investir dans la modernisation des équipements de nos installations. Notre volonté est d’être proactifs dans le domaine et de créer des retombées dans les régions où nous nous trouvons », a mentionné le porte-parole, saluant au passage les contributions gouvernementales de Québec et d’Ottawa, dans le projet de modernisation et de diversification des installations industrielles de la rue Champlain. « En 2020, nous avons annoncé un investissement de 38 M$ visant à mettre en place des installations de production de fibres de cellulose ainsi qu’une optimisation de nos installations actuelles. L’aide des deux paliers gouvernementaux démontre bien la volonté de préserver Kénogami dans notre portefeuille. La fibre de cellulose suscite de l’intérêt pour nous, car elle solidifie notre avenir », ajoute-t-il.
Évoluer selon la demande des clients
Louis Bouchard ne se met pas la tête dans le sable. Il sait que l’industrie du papier est parvenue à maturité, notamment celle du papier journal. Il affirme toutefois que les entreprises qui en produisent encore aujourd’hui sont rentables et performantes. « Le papier, c’est un produit qui est arrivé à maturité, surtout dans le papier journal. On doit gérer un déclin de la demande. C’est un produit qui a vécu une chute de la demande de 12-15 % par année dans la dernière décennie. Le nombre de papetières a nettement diminué ou s’est transformé vers de nouveaux produits. De notre côté, nous analysons énormément les besoins de la clientèle. On sait que les achats en ligne ne sont pas prêts à diminuer. On regarde les possibilités pour les produits d’emballage », détaille le porte-parole.
La diversification est décidément en route chez PFR. La fibre cellulosique faisant partie des plans d’avenir de la multinationale, des synergies entre les usines régionales pourraient paver la voie à un avenir prometteur pour les emplois dans l’industrie forestière de la région. « Kéno est une papetière où on fait des papiers à usages spéciaux. On développe notamment la fibre cellulosique pour nous permettre d’explorer des usages multiples. Nous sommes encore aujourd’hui dans la palette d’usage final possible. On sait qu’il est possible de l’additionner dans les produits de béton. Il y a encore une panoplie d’usages qu’on n’est pas encore au fait ou qu’on ne maîtrise pas encore. On veut voir dans quel secteur on veut s’en aller. Mais tout porte à croire que l’avenir s’annonce positif dans nos installations du Saguenay–Lac-Saint-Jean, qui génèrent plus de 600 M$ en retombées économiques et emploient plus de 2000 personnes », conclut-il.