Consciente de l'impact carbone de ses activités et alignée avec sa vision de réduire de 50 % ses émissions de GES d'ici 2030, la multinationale se penche concrètement sur la façon de transformer certains intrants utilisés par des solutions plus durables, alors que pour d'autres, il s'agit de trouver de nouveaux procédés de production.
" Rio Tinto s'est engagé à réduire de 50 % ses émissions mondiales d'ici 2030. Atteindre ces objectifs exige des projets concrets dans tous les pays où l'entreprise opère. Ce qu'on développe avec Évolys vise directement à réduire de manière importante les émissions dans le processus de transformation du minerai ", rappelle Guillaume Bacconnier, directeur général d'Évolys.
Dans l'industrie métallurgique, le carbone est un élément clé. " Les métaux comme le fer, le titane ou l'aluminium se trouvent dans le sol sous forme d'oxydes. Le carbone permet de retirer l'oxygène de ces oxydes pour valoriser les métaux ", précise M. Bacconnier. Historiquement, des sources comme le charbon ou l'anthracite étaient utilisées, mais ces intrants génèrent des émissions élevées. Évolys, de son côté, propose une alternative renouvelable issue de la pyrolyse avancée de résidus forestiers comme les écorces, les copeaux et la sciure, ou même le bois récupéré en écocentre.
Usine en construction en Outaouais
Évolys construit actuellement une usine pilote en Outaouais. Avec un investissement de 50 millions de dollars canadiens, cette installation produira initialement 50 000 tonnes de biocarbone par année, soit cinq fois plus que la plus grande usine actuellement opérationnelle au Québec. Ce projet repose sur une infrastructure existante de l'ancienne usine de Fortress de Thurso, acquise par le gouvernement québécois à la suite de la faillite de l'entreprise Fortress Paper. " En réutilisant ces actifs, nous accélérons la mise en œuvre tout en valorisant des ressources locales ", ajoute-t-il. La production vise à répondre aux besoins des secteurs du fer, de l'aluminium et du titane de Rio Tinto, notamment.
À terme, si la première phase de production, anticipée dans la deuxième moitié de 2025, se déroule comme prévu, la transformation de matière de bois en biocarbone métallurgique pourrait atteindre 200 000 tonnes, alors que la production actuelle sur le marché canadien atteint 10 000 tonnes. " Cela représente une multiplication par 20 de la capacité actuelle et un tournant pour l'industrie. Cette montée en échelle démontre tout le potentiel de cette technologie ", souligne M. Bacconnier, rappelant au passage tout l'abondante disponibilité de la matière ligneuse au Québec, notamment en raison de la diminution de la demande dans l'industrie du papier.
Des bénéfices écologiques et économiques
Outre la réduction des émissions de CO₂, l'utilisation du biocarbone présente d'autres avantages environnementaux. " Nous utilisons des résidus forestiers souvent enfouis ou sous-exploités. Cela contribue à une meilleure gestion des déchets et soutient l'économie circulaire ", explique Guillaume Bacconnier. L'approvisionnement se fera de manière durable, en partenariat avec des organisations de certification forestière.
Bien que l'utilisation de biocarbone vise à réduire l'empreinte écologique de l'industrie, Évolys ne cherche pas à promouvoir une image irréaliste. " Nous ne prétendons pas que ce projet est 100 % vert. Ce n'est pas notre ambition de faire du greenwashing ou de cacher la réalité. Nous voulons assumer notre rôle de grands émetteurs et travailler à devenir un citoyen corporatif moderne et responsable ", soutient le DG d'Évolys, ayant gravi les échelons chez Rio Tinto avant de faire le saut du côté de l'entreprise cofondée par la multinationale et l'américaine Aymium.
Sur le plan économique, ce projet crée une nouvelle industrie au Québec. " Le biocarbone est un véritable couteau suisse de la décarbonation. Il peut être adapté pour remplacer diverses sources fossiles tout en réduisant les dépendances aux importations d'intrants qui provenaient auparavant des États-Unis ", souligne-t-il. Cette innovation permet également de diminuer la vulnérabilité aux fluctuations des marchés internationaux du charbon. Rio Tinto envisagerait par ailleurs de déployer cette technologie au-delà du Québec. " Le succès de ce projet pourrait servir de modèle pour d'autres opérations Rio Tinto dans le monde, accélérant le cheminement de l'entreprise vers la carboneutralité ", de conclure M. Bacconnier.