Depuis sa création, Hydro-Québec était tenue, par la loi, de garantir l’approvisionnement électrique à toutes les entreprises/projets présentant des demandes de puissance supérieure à 50 MW, pour ce que l’on appelle les grands projets. Coup de théâtre : le 19 janvier 2022, la société d’état a annoncé unilatéralement qu’en considération d’un manque de disponibilité d’énergie anticipé d’ici quelques années, elle ne s’engage dorénavant plus à le faire !
Bien que cette intention d’Hydro-Québec soit en parfaite rupture avec les principes mêmes ayant présidé à la nationalisation de l’électricité, il est plus que probable que l’actionnaire unique de la société d’État, le gouvernement du Québec, ait été prévenu au préalable de cette spectaculaire sortie publique d’Hydro-Québec. Depuis, le gouvernement a refusé d’étudier cette nouvelle approche et ses nombreuses implications dans le cadre d’une commission parlementaire ou du dépôt d’une loi visant à préciser selon quels critères les demandeurs de blocs énergétiques de plus de 50 MW seront approvisionnés ou ne le seront pas…
Un enjeu régional prioritaire
Par rapport à celle du reste du Québec, l’économie du Saguenay-Lac-St-Jean se démarque par ses industries fortes consommatrices d’énergie électrique, notamment la métallurgie (aluminium, niobium, ferro-sillicium) et la transformation du bois (papeteries, usines de pâte, scieries, etc.). Plusieurs projets majeurs de diversification et de transformation des ressources sont sur la table et requerront des blocs énergétiques de 50 MW et plus pour se réaliser. Devant l’incertitude que laisse planner la nouvelle approche proposée par Hydro-Québec, la région est en droit de connaître les impacts qui résulteront de ce virage. Ainsi, si cette nouvelle approche est mise en place sans modification ou sans le concours étroit des régions du Québec, lesquels de nos projets stratégiques régionaux devront être abandonnés ou seront carrément annulés ?
Quels critères d’attribution seront utilisés pour évaluer nos projets, qui en fera l’évaluation ? Il apparaît que, dans sa forme actuelle, cette nouvelle approche donnerait ni plus ni moins à Hydro-Québec ou au gouvernement un droit de véto permanent sur les choix de développement de la région…
Maintenir l’accès à l’énergie électrique grande puissance nécessaire pour assurer le développement et la diversification économique future du Saguenay-Lac-St-Jean est un enjeu stratégique de première importance pour notre avenir. Devant l’importance de la question de l’approvisionnement énergétique futur de nos projets de développement et de diversification économiques, la région doit s’assurer que cette nouvelle approche soit annulée ou tout au moins qu’elle soit encadrée dans le sens des intérêts légitimes de notre région et des autres régions ressources du Québec. L’immense majorité de notre énergie renouvelable est produite dans nos régions, est-ce trop demander que d’avoir un mot à dire sur son utilisation au service de notre développement collectif ? Nous refuser de participer à l’élaboration de la nouvelle approche qui s’annonce serait ni plus ni moins que de trahir l’appel à la base même d’Hydro-Québec et de toute la Révolution tranquille : « Maître chez nous ».