N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : Formation et emploi, une synergie à créer publié dans notre édition du mois d'août.
SAGUENAY – Le propriétaire de l’Auberge des îles et de l’Hôtel Chicoutimi, Éric Larouche, veut révolutionner l’industrie de l’hospitalité. Son nouveau concept, Hyvi, transforme complètement la façon de faire de l’hôtellerie, de l’accueil aux traditionnelles chambres, remplacées par des espaces privés modulables qui répondent à une vaste gamme de besoins.
Le projet sort tellement du cadre traditionnel que M. Larouche ne parle d’ailleurs plus d’hôtel ou de chambre, mais bien d’établissement et d’Hyvi. Chaque unité est ainsi dotée de lits escamotables, d’un divan, d’une table, d’une salle de bain complète et d’une cuisinette avec four, micro-ondes et frigidaire. Le jour, les lits peuvent être redressés, offrant une aire de travail professionnelle. "L’idée, c’est qu’un Hyvi sert à toutes sortes de choses. Ça peut être pour un déplacement professionnel, un voyage en famille, une rencontre de remue-méninges, une fête prénatale, une réunion d’affaires, etc. Soudain, on a des espaces qui répondent aux besoins d’une clientèle de partout, mais aussi de celle locale. Ça étend nos possibilités de marché", souligne Éric Larouche.
Disparue, également, la nécessité de réserver une chambre à la nuitée. Le même espace peut servir de salle de réunion le jour, puis être loué pour un 5 à 7 en soirée ou encore retenu pour la nuit. "Traditionnellement, l’arrivée dans un hôtel se fait à 16 h et le départ à 11 h. Avec Hyvi, c’est possible d’obtenir une unité à l’heure qui convient au client. Il paye en fonction de son usage réel. Par exemple, je peux louer un Hyvi pour l’après-midi à quelqu’un, puis pour la nuit à un invité qui souhaite arriver vers 22 h et quitter tôt le lendemain."
Les espaces communs ont aussi été repensés. Le lobby et la réception ont été remplacés par des zones collaboratives, des salles de rencontre fermées et des stations de travail individuelles. Du café, des rafraîchissements et des options de prêt-à-manger sont mis à disposition de ceux qui décident de s’y installer. "C’est possible de réserver un emplacement pour venir y passer une journée ou une demi-journée. La location de ces stations inclut tous les services. Ça crée une dynamique collaborative intéressante", affirme M. Larouche.
Expérience client réinventée
L’expérience client d’Hyvi se différencie de celle des hôtels traditionnels. "Nous avons profité du fait que nous réinventions les opérations pour transformer le parcours client. Ce n’est plus à lui de venir à nous, c’est nous qui venons à lui. Il peut communiquer avec nous sur toutes les plateformes et nous allons répondre à ses besoins", explique le président de l’Auberge des îles et de l’Hôtel Chicoutimi.
Le client peut ainsi effectuer l’intégralité de son parcours de façon numérique. "Le visiteur peut réserver en ligne, obtenir sa clé numérique et débarrer sa porte avec son téléphone cellulaire. L’invité a accès à l’établissement sans même devoir rencontrer quelqu’un. C’est facilitant et ça élimine les pertes de temps. C’est intéressant aussi pour les arrivées tardives", indique Éric Larouche. Une personne qui serait moins à l’aise avec la technologie pourrait toutefois passer par un agent d’accueil pour s’enregistrer et recevoir une clé physique. "Je pense qu’on répond à l’ensemble des besoins de notre clientèle", ajoute-t-il.
Des bornes sont également proposées à l’entrée pour ceux qui voudraient effectuer une location à leur arrivée ou s’enregistrer. Les réceptionnistes ont quant à eux été remplacés par des agents d’accueil. "Le but, ce n’est pas d’éliminer la richesse humaine, mais plutôt de la positionner aux endroits qui nous permettront de fournir un meilleur service. On se concentre à offrir un séjour exceptionnel."
Autre nouveauté : le client peut, lors de sa réservation, demander qu’une épicerie soit faite en sélectionnant des items sur la liste proposée par Hyvi. Ceux-ci seront alors ajoutés à la facture, à des tarifs d’épicerie, et livrés directement dans le frigidaire de l’unité avant l’arrivée de l’invité.
Hyvi : un investissement de 6 M$
SAGUENAY – L’Hôtel Chicoutimi et l’Auberge des îles, propriété d’Éric Larouche, sont les deux premiers établissements convertis selon le concept Hyvi. La transformation des quelque 120 unités a nécessité des investissements de 6 M$ et des travaux d’une durée d’un peu plus d’un an.
Alors que le concept a été lancé le 12 septembre, l’Hôtel Chicoutimi et l’Auberge des îles de Saint-Gédéon serviront en quelque sorte de carte de visite. L’idée est de convaincre d’autres investisseurs d’adopter Hyvi. "Le concept est totalement exportable. […] L’enjeu dans ce genre de projet, c’est de faire la preuve que ça fonctionne. Pour ça, il n’y a rien de mieux que de le faire soi-même. Je ne voulais pas convertir seulement quelques chambres. À partir de maintenant, ces deux établissements sont Hyvi à 100 %", explique M. Larouche.
L’homme d’affaires et son équipe ont développé un plan de croissance passant par les franchises et les nouveaux projets. En plus de la possibilité de transformer un hôtel existant, des plans ont été prévus pour les futures constructions neuves, d’un minimum de 60 unités. Dans tous les cas, les Hyvi regrouperont également un certain nombre de services ou d’équipements ludiques tels que restaurants, spa, piscine, gym, zones de détente, etc.
Si le but est d’abord de conquérir le Québec, Éric Larouche a des visées encore plus vastes à moyen long terme. "J’ai fait enregistrer Hyvi de façon mondiale. J’ai fait plusieurs projets d’affaires dans ma vie et c’est la première fois que je sens que je tiens un produit qui pourrait grandir de manière internationale. Nous avons aussi reçu des gens du domaine qui m’ont confirmé le potentiel d’exportation", affirme-t-il. Des discussions seraient déjà en cours avec d’autres villes de la province, mais la priorité est donnée à la consolidation des opérations à Chicoutimi et Saint-Gédéon.
Entreprises
Éric Larouche estime qu’Hyvi présente un potentiel important pour diversifier ses marchés. Il souhaite notamment développer le créneau des entreprises locales. "C’est une option de plus entre le bureau conventionnel et le travail à la maison. […] Une organisation qui a besoin d’un lieu pour rencontrer ses clients ou ses partenaires d’affaires pourrait louer un Hyvi. Le jour, ce n’est plus de l’hôtellerie. Les lits peuvent être barrés, donc c’est vraiment un espace professionnel, avec accès à toutes les installations offertes par l’établissement", indique l’entrepreneur. Par ailleurs, il est possible de signer une entente multiétablissements, valide dans tous les emplacements Hyvi.
Selon M. Larouche, Hyvi vient également répondre à l’enjeu d’hébergement actuel que connaissent plusieurs villes et organisations. "Nous pouvons combler un besoin d’hébergement ponctuel dans certains segments, dans le contexte de pénurie de logements", souligne-t-il. Le premier client d’Hyvi est d’ailleurs l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), qui a réservé 45 unités à l’Hôtel Chicoutimi afin de loger des étudiants.
Travail de longue haleine
L’implantation d’Hyvi a constitué un travail de longue haleine. Près de cinq ans de réflexion ont été nécessaires à Éric Larouche afin de réaliser concrètement son idée. "Avant la pandémie, je me questionnais sur comment j’allais faire de l’hospitalité et cette réflexion s’est accentuée dans les deux dernières années. Pendant la pandémie, je me suis retrouvé avec 90 000 pieds carrés d’espace qui étaient presque inutilisé. J’ai fait le constat que, de jour, l’hôtel ne servait pas du tout. Je me suis donc demandé comment venir bonifier cet élément-là pour ne plus dépendre uniquement de la nuitée et répondre aux nouvelles habitudes de consommation", raconte-t-il.
La réalisation du projet a nécessité la création de six emplois, qui s’ajoutent à la centaine de salariés de l’Hôtel Chicoutimi et de l’Auberge des îles. Ces derniers ont aussi été impliqués, puisqu’il s’agit d’un changement radical de mentalité. "Tout le monde est engagé dans la culture Hyvi", précise M. Larouche.
Le parcours a été semé de plusieurs embûches. L’équipe a notamment dû développer elle-même tout l’aspect technologique lié au concept. "L’innovation a été un élément clé. Nous avons bâti tout l’écosystème derrière le concept et nous nous sommes assurés que ça fonctionne. Toute l’équipe s’est mobilisée pour en arriver à ce produit. Nous en sommes vraiment fiers et nous croyons à son potentiel", conclut Éric Larouche.