N.D.L.R. – Nous avons décidé de vous présenter les cas de deux entreprises de Saguenay qui ont profité de l’arrivée de releveurs dans des contextes particuliers. Les experts en transfert d’entreprises sont formels : un processus de relève se réalise sur une période de cinq à 10 ans. Voici deux exemples de relèves qui semblent très bien amorcées et qu’on peut certainement qualifier d’atypiques.
Construction Nivo-Tech | Des releveurs propulsés par le destin
SAGUENAY - Mélissa Lapointe rêvait depuis plusieurs années de rejoindre son père et de participer au développement de Construction Nivo-Tech, l’entreprise que celui-ci a fondée il y a bientôt trente ans. Mais Jocelyn Lapointe était réticent à intégrer ses enfants dans la PME du domaine de la construction. Le père de famille, protecteur, préférait voir ses enfants dans des carrières stables, loin de l’entreprenariat et du milieu des affaires parfois très difficile et incertain. Mais voilà, le 29 décembre dernier, qu’un événement imprévu et dramatique est venu changer profondément le destin de la jeune femme, alors que son père, le fondateur de Construction Nivo.-Tech, perdait la vie subitement.
Une fois le choc initial encaissé, cette comptable en management, qui travaillait encore en 2018 pour Rio Tinto à Saguenay, s’est rapidement mise en mode réflexion pour analyser les options qui s’offrait à la succession en regard de l’avenir de l’entreprise. Mélissa Lapointe a alors pris conscience que ce triste coup du sort lui ouvrait une porte qu’elle avait régulièrement tenté de franchir. Il faut dire qu’elle était supportée et encouragée dans son analyse par son conjoint David Audy, un ingénieur civil de formation. Celui-ci avait d’ailleurs pris quelques semaines de congé après les Fêtes pour aider sa belle-mère à reprendre pied dans l’entreprise, où elle travaillait.
Rassurer les employés… et les clients
Dès le mois de mars 2019, le couple Lapointe-Audy a décidé de présenter à l’entourage un projet de relève familiale pour assurer la pérennité de Construction Nivo.-Tech. Après discussions, il a été convenu que Mélissa Lapointe et David Audy devenaient les nouveaux propriétaires de la PME, qui emploie quelque 15 personnes. Très rapidement, les deux releveurs, qui ont alors pris congé de leurs employeurs respectifs, ont rencontré le personnel pour le rassurer et lui présenter leur plan de match pour l’avenir.
« Il fallait faire vite pour rassurer notre équipe, mais également pour informer les clients et nos sous-traitants de la suite des choses », explique Mélissa Lapointe, qui confirme que les membres du personnel étaient très proches de son père et qu’ils ont été d’un grand support et d’une belle ouverture pour intégrer la relève. Même chose pour les sous-traitants, qui voulaient continuer à travailler avec l’équipe, assure-t-elle. « Je me sens parfois coupable. J’aurais tellement aimé le faire (la relève) avec mon père. Mais je suis ses traces à travers le témoignage des gens de notre équipe », confie la jeune femme d’affaires, qui souligne que l’entreprise, qui fêtera ses trente ans en 2020, est née en même temps qu’elle.
Offrir des services d’ingénierie
De son côté, David Audy considère que, malgré le contexte dramatique de son entrée à la direction de Construction Nivo.-Tech, il s’agit d’une occasion unique de développer son profil entrepreneur. « J’ai souvent eu des idées pour créer des projets d’entreprises. […] Nous ne voulons pas dénaturer Construction Nivo.-Tech, mais nous avons commencé à offrir certains services d’ingénierie, notamment à des entreprises compétitrices », confirme-t-il. Mélissa Lapointe et David Audy, parents de deux enfants de deux et quatre ans, concèdent que prendre la tête d’une entreprise de construction n’est pas de tout repos. « Nous avons dû passer les licences de la Régie du bâtiment du Québec, puisqu’elles étaient au nom de mon père. On n’a pas trouvé ça facile, mais on les a passées tous les deux. On se complète bien », conclut Mélissa Lapointe.
Location d’équipement Chicoutimi | Le comptable Michael Deraspe réalise son rêve
SAGUENAY – Il y a de cela quelques mois, le comptable Michael Deraspe était contrôleur financier auprès d’un important concessionnaire de motos de la région. Aujourd’hui, il est à la tête d’une entreprise en pleine croissance, située dans le sous-arrondissement de Chicoutimi-Nord, sur la rue St-Éphrem. L’homme d’affaires a repris les rênes de Location d’équipement Chicoutimi(LEC) en novembre 2018 avec l’intention ferme de faire de son commerce un des incontournables de Saguenay tant auprès des bricoleurs amateurs que des entrepreneurs de la région.
Depuis la signature de la vente de l’entreprise, l’automne dernier, Michael Deraspe a fait beaucoup de chemin. LEC appartenait depuis plus de 50 ans à la famille de son beau-père, Jean-Pierre Quenneville, qui l’exploitait avec son frère André (les deux sont maintenant à la retraite) et du spécialiste en entretien d’équipement de construction de Saguenay, Gilles Gaudreault. Le commerce, très prisé des consommateurs, mais surtout des entrepreneurs, n’avait profité d’aucune rénovation importante depuis son ouverture en 1968. D’ailleurs les opérations quotidiennes de location, entretien et ventes d’équipements se faisaient encore de façon manuelle, sans support informatique, à la manière des années 1970 et 1980.
« Mes amis m’ont poussé »
De l’avis de Michael Deraspe, le commerce aurait probablement fermé à moyen terme et ses équipements auraient été liquidés faute de repreneur sérieux. L’homme d’affaires avait déjà envisagé le projet en 2016, mais, à l’époque, la transaction ne s’était pas concrétisée, faute de financement. En février 2018, Michael Deraspe analysait la possibilité d’investir dans une franchise de restauration rapide avec des amis. Mais rapidement, ceux-ci l’ont convaincu de s’intéresser plutôt de nouveau à LEC. « Ça me faisait peur, parce que je ne suis pas un gars de mécanique. Mes amis m’ont encouragé, parce qu’ils y croyaient, et m’ont poussé à monter mon projet », confie-t-il. Il explique par ailleurs qu’il a acheté 100 % des actions de l’entreprise, au prix de 700 000 $. L’homme tient à souligner qu’il a profité d’un appui financier, mais également stratégique, de Promotions Saguenay qui l’a supporté dans le développement de son projet
Déjà en mode expansion
Outre l’acquisition des parts de LEC, Michael Deraspe a investi des dizaines de milliers de dollars dans la rénovation des espaces de vente, d’entreposage et d’atelier de Location d’équipement Chicoutimi. L’entreprise a pris également le virage numérique avec l’installation d’équipements et de logiciels spécialisés pour ce type de commerce. Il a également réaménagé les espaces pour offrir une salle de montre pour la vente d’outillage et d’accessoires. Mais surtout, il a investi dans des équipements comme des plateformes élévatrices et une mini-excavatrice pour offrir en location.
Bien entendu, ce comptable de carrière demeure prudent, mais il ne peut s’empêcher de caresser de nombreux projets pour le futur. Il s’agit de l’achat de bien d’autres équipements de construction, mais également d’un agrandissement important des espaces au cours des prochaines années.
En affaires depuis quelques mois seulement, Michael Deraspe souligne avec fierté la collaboration et l’engagement de son équipe de neuf employés, dont le spécialiste en réparation d’équipement de construction bien connu Gilles Gaudreault. Ce dernier, du haut de ses 72 ans, s’applique à transmettre ses connaissances à la relève, même s’il est toujours bien en selle.