SAGUENAY - En matière d'innovation, le milieu de l'aluminium est très mobilisé et dynamique. Le potentiel est énorme, mais comme dans plusieurs industries, il reste encore beaucoup d'efforts à faire pour rattraper le retard qui s'est créé avec d'autres régions du monde, selon l'Innovateur en chef du Québec, Luc Sirois. 

« Si toutes les industries étaient comme celle de l'aluminium, ce serait wow ! Nous avons beaucoup d'industries très dynamiques, mais celle-là, c'est quelque chose », affirme M. Sirois, rappelant que l'aluminium fait l'objet d'une stratégie nationale. 

Celui-ci rappelle que, depuis 30 ans, on observe tout de même un déclin en matière de recherche et développement (R & D) dans tous les secteurs au Québec. « Nous sommes une nation créative, qui a un historique d'entrepreneuriat. Ça va bien. Sauf que les autres nations ont le pied sur l'accélérateur. Ce n'est pas qu'on fait moins d'innovation qu'avant, c'est que les autres nous dépassent tous. C'est assez grave. [...] Les investissements en R & D au Québec sont parmi les plus bas au Canada. Et le Canada est le pire des pays de l'OCDE pour ça », souligne l'Innovateur en chef. 

Un virage

Les données de la plus récente Grande enquête sur l'innovation dans les entreprises au Québec, publiée en mai dernier, démontrent toutefois l'amorce d'un changement en la matière. Globalement, les entreprises ayant entrepris au moins un projet d'innovation sont en hausse de près de 20 points de pourcentage par rapport à 2022, pour s'établir à 69 %. 

Selon Luc Sirois, ce sont très souvent les entreprises manufacturières qui vont faire de la R & D. Or, dans le secteur de l'aluminium, les fournisseurs évoluent majoritairement dans ce domaine. « Les petits fournisseurs, tout cet écosystème-là, ce sont des fabricants, donc ça donne espoir. J'ai eu la chance de visiter plusieurs entreprises qui fournissent les grands producteurs d'aluminium. Ils conçoivent des équipements et déploient les meilleures pratiques de gestion de la R & D, de l'innovation et du développement de nouveaux produits. Il y a aussi tout un effort de développement de nouveaux produits utilisant l'aluminium, mais qui nécessitent la création de nouveaux procédés ou formulations », mentionne-t-il.

Tout comme les différents acteurs du secteur de l'aluminium, l'Innovateur en chef souhaiterait voir plus de transformation secondaire et tertiaire. « Nous voudrions être fabricants de produits plutôt que d'exporter les lingots. Et ça, ça prend toute une autre stratégie de développement industriel pour la filière aluminium. [...] C'est important de mettre le pied sur l'accélérateur pour ça », estime-t-il. 

Recherche collaborative

Luc Sirois considère que le secteur de l'aluminium peut compter sur plusieurs organismes pour propulser l'innovation. Il cite entre autres le Centre québécois de recherche et de développement de l'aluminium (CQRDA), qui soutient le maillage entre les entreprises et les centres d'enseignements et de recherche publics. « Il va connecter des entreprises avec des chercheurs dans les centres collégiaux de transfert technologique (CCTT) ou dans les centres de recherche universitaire. C'est un effort pour mettre en contact les entreprises et les experts universitaires et collégiaux pour qu'ils travaillent ensemble à développer des solutions et de nouvelles technologies en aluminium », explique-t-il, ajoutant que l'organisme propose aussi du financement pour ces projets. 

Selon lui, les projets qui réunissent tant les entreprises que le secteur de l'éducation supérieure permettent de créer une dynamique favorisant l'accélération de l'innovation. « Ils font appel à tous les équipements et à toute l'expertise des chercheurs des milieux universitaires et collégiaux. Ça crée un tremplin de transfert de connaissances vers les entreprises, entre autres par le biais des étudiants qui vont ensuite rejoindre le milieu du travail », fait-il valoir. 

Plus de capitaux

Pour M. Sirois, le transfert de ces connaissances entre les centres de recherche et le milieu des affaires devrait être davantage fluidifié afin de favoriser l'innovation. « Il y a énormément de recherche qui se fait dans les universités. Il faut trouver une façon que ça se transfère plus facilement vers l'industrie et, à l'inverse, que les entreprises expriment leurs enjeux et leurs besoins afin que ça donne une orientation au milieu académique », indique-t-il.

L'Innovateur en chef désire également qu'on puisse trouver des façons d'encourager financièrement les jeunes pousses, sans que ce soit uniquement par le biais de subventions. « Il faut trouver comment on peut investir dans ces jeunes pousses en ayant du capital. Ces jeunes entreprises doivent avoir accès à du capital pour se lancer », note Luc Sirois.