MASHTEUIATSH – Pour Pekuakamiulnuatsh Takuhikan, le projet de Vitrine technologique en biochar et bioproduits (VTBB), souvent appelé projet Biochar Boréalis, s’inscrit parfaitement dans les valeurs de la communauté. En effet, cette vitrine technologique, pilotée par le Centre collégial de transfert de technologie (CCTT) d’Agrinova, vise à utiliser une matière provenant de la nature, à la transformer. Elle sera ensuite retournée à ce que les Ilnu appellent la Terre Mère, pour améliorer grandement la qualité des sols et le rendement des cultures.
Qui plus est, pour les Ilnu de Mashteuiatsh, ce centre de recherche unique au Canada représente définitivement un des fleurons du Parc industriel de la communauté. Rappelons que la VTBB est issue de la volonté de quatre partenaires régionaux (Pekuakamiulnuatsh Takuhikan, Agrinova, Alliance bois et Biochar Boréalis) de trouver des débouchés pour la biomasse forestière et pour les surplus de copeaux issus des scieries de la région. L’objectif était surtout de créer les meilleures conditions possibles en R&D pour développer des produits de biocharbon (charbon d’origine végétale) et de ses dérivés (bio-huiles et syngaz) par un procédé de pyrolyse.
Deux PME potentielles
Bien entendu, l’objectif ultime est d’intéresser des investisseurs à lancer de nouvelles entreprises à partir des recettes éprouvées par la VTBB. Pour ce faire, Biochar Boréalis a débuté ses activités de R&D depuis plusieurs mois déjà, avec le développement d’une quinzaine de projets de recherche en collaboration avec des entreprises ou des organisations à l’échelle du Québec. D’ailleurs, selon André Benoit, vice-président au développement de la VTBB, deux projets de création de PME, qui utiliseraient les produits développés par Biochar Boréalis, seraient en cours de gestation dans le Parc industriel de Mashteuiatsh.
Selon le spécialiste, il y a encore loin de la coupe aux lèvres pour ces entreprises potentielles, mais il confie qu’il y a de plus en plus d’intérêt de la part de promoteurs pour lancer des projets à partir de ces produits de niches.
La Vallée du Biochar
Le travail d’André Benoit consiste à asseoir les gens ensemble pour constituer une chaîne de valeur du biochar, afin de stimuler leur intérêt, mais aussi d’établir un panier de produits dérivés. Il soutient d’ailleurs que ce marché est très important, tant et si bien qu’il estime que la valeur d’une tonne de copeaux, qui se situe actuellement à environ 100 $/t, pourrait atteindre jusqu’à un potentiel de 4 000 $/t à l’étape de la troisième transformation. « La technologie est maîtrisée, le laboratoire est fonctionnel, on travaille actuellement beaucoup sur le panier de produits et leurs applications. […] Tous les ingrédients sont là pour créer la Vallée du Biochar. Nous avons l’abondance de matière première, le centre de recherche, le milieu agricole, Agrinova et l’UQAC. »
Pourquoi pas les bleuets ?
Le rôle d’Agrinova est crucial dans le développement des produits de biochar. Les chercheurs du CCTT du cégep d’Alma travaillent d’arrache-pied depuis 2018 sur la caractérisation et le potentiel des essences boréales. L’objectif est de trouver les meilleures combinaisons de variétés et conditions de traitement pour créer les meilleures recettes. Pour Régis Pilote, agronome et chargé de projet chez Agrinova, le biochar et ses sous-produits n’ont pas fini de surprendre les scientifiques. Celui qui a supervisé une vingtaine de projets de recherche de biochar à partir de la biomasse forestière parle maintenant de pyrolyser les résidus du conditionnement des bleuets et d’utiliser le biochar ainsi produit pour stimuler la croissance de notre petit fruit.