ALMA - À 25 ans, Vincent Lavoie est déjà un entrepreneur qui fait parler de lui. Avec une énergie débordante et une vision sans limites, il a transformé une église en un lieu vibrant : le Saint-Crème, un concept unique alliant hôtel-relais, restaurant et crèmerie. Une idée audacieuse, portée par un homme qui refuse de faire comme les autres.


« J'ai toujours eu ce feu en moi. Depuis tout jeune, j'avais ce besoin de créer, de bâtir quelque chose de mes mains. À l'adolescence, je donnais des cours de musique, puis j'ai monté ma première entreprise en esthétique automobile. Après ça, l'immobilier m'a attiré : j'achetais, je gérais, je revendais. Mais au final, je cherchais un projet qui allait vraiment me passionner, quelque chose de plus grand, de plus créatif », raconte celui qui travaillait à la CIDAL au moment de réfléchir à ce tournant professionnel.

Transformer une église

En quête d'un projet à temps plein, Vincent s'intéresse aux églises. « Elles sont souvent bien situées, elles ont une histoire forte, mais elles restent inexploitées. Pourquoi personne ne profite de ce potentiel? » Lorsqu'il entend que la petite église d'Isle- Maligne pourrait être à vendre, il se lance. « Je ne voulais pas nécessairement ouvrir un restaurant, mais une fois le lieu en main, il fallait réfléchir à la meilleure façon de l'exploiter. »

À 22 ans, il devient propriétaire. « Cinq jours après l'achat, on ouvrait la crèmerie, sans rien changer à l'intérieur. L'idée, c'était de commencer tout de suite à faire rentrer de l'argent et de prouver qu'on était capables de mener ce projet. »

Petit à petit, le Saint-Crème prend forme. « L'église est stratégiquement placée, proche de la Véloroute et des sentiers de motoneige l'hiver, mais il n'y avait rien en restauration dans le coin. On a enchaîné : d'abord la crèmerie, puis l'hôtel-relais, et enfin le restaurant. Aujourd'hui, on a trois divisions bien distinctes. »

Une détermination sans faille

« C'était un projet risqué. Quand j'ai présenté mon plan financier, mon banquier trouvait que ce n'était pas conventionnel. Il m'a mis en garde sur les défis. Mais je savais où je voulais aller. »

Ne trouvant pas immédiatement de soutien bancaire, il approche Jean-Denis Toupin de Proco, un entrepreneur impliqué dans le monde du vélo. « Je ne le connaissais pas personnellement, mais je savais qu'il avait une vision. Il a cru en moi, et grâce à lui, d'autres investisseurs, comme Desjardins, Investissement Québec et le ministère de la Culture ont suivi. Je ne parle pas souvent de ces partenariats, mais ils ont été importants. Quand j'ai besoin d'un coup de main, ils sont là. »

« Ce projet de 2,3 millions de dollars, c'était énorme, mais je n'ai jamais douté. J'ai réfléchi, bien sûr, mais au fond, je savais qu'on allait réussir. Ç'a demandé de la persévérance, une vision claire et beaucoup de travail », admet-il.

Une croissance fulgurante

En trois ans, le Saint-Crème est passé de deux employés à trente. « C'est une ascension fulgurante. Il y a eu des moments d'euphorie et des défis immenses. C'est une vraie montagne russe. Mais aujourd'hui, on est à un tournant. Il faut se poser les bonnes questions : est-ce qu'on continue à optimiser ce qu'on a ou est-ce qu'on va encore plus loin? »

L'idée d'une franchise trotte dans son esprit. « C'est un modèle d'affaires qui pourrait fonctionner ailleurs, mais il faut le bon emplacement, et surtout, la bonne personne pour porter un tel projet. Rien n'est exclu », fait-il savoir, précisant que son téléphone sonne régulièrement puisque des villes veulent lui proposer de redynamiser leur église.

Son attachement à la région reste néanmoins central. « Je suis d'ici, et pour moi, c'est important de développer des projets qui ont un impact positif sur la communauté. »

Un entrepreneur insatiable

Même avec le succès du Saint-Crème, Vincent ne compte pas ralentir. « J'ai toujours eu cette impression que les choses n'allaient pas assez vite. Parfois, je me dis que j'aurais pu commencer plus jeune et sauter ma formation collégiale, mais, en réalité, ma formation en comptabilité et gestion m'aide tous les jours. Gérer une entreprise, c'est avant tout gérer des chiffres. »

Mais après trois ans de travail acharné, il se pose de nouvelles questions. « Repartir un projet de zéro? Peut-être pas. Acheter une entreprise existante et la transformer? Pourquoi pas. Ce que je sais, c'est que j'ai besoin de défis. »

Malgré tout, il prend le temps d'apprécier ce qu'il a accompli. « Je vis dans le presbytère, et ça me plaît. J'ai réussi à créer un modèle d'affaires qui me ressemble, un lieu où on peut s'amuser tout en travaillant. Pour l'instant, je n'ai aucune envie de vendre », indique celui qui a été nommé personnalité masculine de l'année au gala des lauréats de la Chambre de commerce et d'industrie Lac-Saint-Jean-Est.

Dans cinq ans? « Je me vois encore entrepreneur, mais probablement avec d'autres projets. Peut-être dans un domaine complètement différent. J'aime apprendre, j'aime repousser mes limites. Une chose est sûre, ce ne sera pas quelque chose d'ennuyant. »