Auteur

Karine Boivin Forcier

SAGUENAY – Hydrep vient de terminer un important contrat de plus de 4 M$ pour la conception et la fabrication de remorques tireuses/dérouleuses de câbles pour les lignes à 735 kV pour Hydro-Québec Transénergie. Livrées en seulement 17 mois, les sept remorques ont représenté un défi majeur pour l’équipe de l’entreprise jonquiéroise.

« Nous devions créer cinq modèles différents et produire sept remorques. Nous avons réalisé toute la conception et la fabrication de A à Z. Le projet devait être réalisé en neuf mois, mais dans le contexte actuel, cela aurait été impossible à faire », indique Isabelle Duchesne, directrice générale adjointe d’Hydrep.

Le contrat a représenté un défi à tous les niveaux. « Pour y arriver dans ces délais serrés, il a fallu faire la conception en même temps que la fabrication. Ça a été très exigeant pour tout le monde, avec des modifications en cours de route, des ajustements nécessaires en raison de l’ajout de demandes par le client, etc. », souligne Mme Duchesne, qui a effectué la gestion du projet.

Le contexte économique mondial a aussi compliqué la tâche de l’équipe. « Ce sont 38 000 pièces qui ont été assemblées. L’approvisionnement a été un défi du début à la fin. Sachant que ce serait difficile, nous avons priorisé l’acquisition des composantes critiques dès le départ et ça s’est avéré une bonne stratégie. Par exemple, les pompes que nous avons achetées, nous les avons eues en environ 30 semaines, alors qu’aujourd’hui, ça prendrait deux ans et demi », illustre la DG adjointe.

Une force d’équipe

Au total, quelque 25 000 heures ont été effectuées sur les remorques par les 65 employés. « Il y avait environ sept personnes au cœur du projet, mais toute l’équipe a mis la main à la pâte à un moment ou à un autre. À certains moments, c’était plus difficile et des machinistes sont venus me demander ce qu’ils pouvaient faire pour aider. Tout le monde a trouvé des choses à faire », raconte Isabelle Duchesne.

Celle-ci considère d’ailleurs que les employés d’Hydrep constituent sa plus grande force. « C’est grâce à elle que nous réussissons à réaliser ces projets et à nous distinguer à l’international. Nous avons des gens de calibre, qui ont de la vision. »

Futurs développements

Les remorques livrées à Hydro-Québec sont actuellement en service. « Jusqu’à maintenant, nous avons de bons commentaires des travailleurs qui les utilisent. Ça se passe bien », précise Mme Duchesne.

À partir de ces prototypes, Hydrep pourrait fabriquer et vendre d’autres remorques. « C’est certain que l’objectif, c’est de pouvoir en commercialiser. C’est une façon de rentabiliser les investissements importants réalisés pour la conception et le développement des produits », explique la directrice générale adjointe.

Selon elle, l’entreprise jonquiéroise a déjà été contactée par des entrepreneurs qui louent des remorques de tirage de câbles en sous-traitance et qui souhaiteraient se procurer ses modèles. « Nous sommes prêts pour ça. Nous avons fait le prototype et nous avons maintenant la possibilité d’en fabriquer d’autres. »

Autre gamme

Mentionnons qu’Hydrep produit déjà, depuis 2015, de plus petites remorques de tirage de câble aérien et souterrain pour les secteurs TransÉnergie et Distribution d’Hydro-Québec. Celles-ci peuvent être utilisées pour des fils de moindre envergure, tels que ceux déployés dans les quartiers résidentiels. « Nous avons des tireuses de câbles à 70 000 livres, des dérouleuses, des freineuses-treuil. Ces équipements ont tous été conçus et fabriqués par Hydrep », conclut Isabelle Duchesne.

Une expertise reconnue mondialement

Bien que ses activités soient peu connues dans la région, l’expertise d’Hydrep est reconnue internationalement. Elle est notamment l’un des cinq producteurs de remorques de tirage de câble aérien et souterrain pour les lignes électriques dans le monde et le seul fabricant d’étriers de freinage pour les éoliennes au Canada.

« Pour les remorques, nous avons trois ou quatre compétiteurs à l’international. Nous sommes d’ailleurs les seuls à proposer ces équipements avec une conception et une fabrication canadiennes », indiquent Yvon Desjardins, fondateur et directeur général de l’entreprise, et Isabelle Duchesne, directrice générale adjointe.

Dans le domaine des systèmes hydrauliques de freinage pour les éoliennes de 1,5 MW, Hydrep se distingue également depuis la fin des années 2000. Seul concepteur et fabricant québécois de ces dispositifs, elle les vend à l’américaine GE Wind Energy, un des leaders mondiaux de la production d’éoliennes. Plus de 25 000 de ces systèmes de freinage de conception saguenéenne ont donc été installés en Amérique du Nord et du Sud et en Asie. « Il y a tout un processus pour entrer en affaires avec GE. Il faut se faire accréditer. Ça a pris presque un an et demi au départ. »

Étriers

Il y a cinq ans, l’entreprise a également ajouté à son expertise le design complet des étriers de freins qui entrent dans la fabrication de son système. Ce faisant, Hydrep est devenu le seul concepteur et fabricant de ces produits au Canada. « Auparavant, nous faisions affaire avec un fournisseur allemand pour ces pièces. Nous avons toutefois décidé de nous lancer dans la fabrication des étriers pour éliminer un intermédiaire et devenir autonomes », explique Mme Duchesne.

Hydrep a conçu des modèles d’étriers de freins pour les éoliennes de 1,5 MW, mais aussi pour celles de 3 à 5 MW. Elle produit maintenant les deux modèles. Le premier a été vendu à plus de 3 000 unités et le second, à plus de 600. Une production de 1 000 étriers par an est prévue pour les systèmes destinés aux éoliennes de 3 à 5 MW.

Investissements

Même si l’électrohydraulique est au cœur de tous les projets de la PME jonquiéroise, celle-ci souhaite se concentrer sur les créneaux éolien et des énergies renouvelables pour son développement. « Nous voulons assurer un avenir plus vert pour notre planète. Nous souhaitons travailler sur les projets qui permettent d’augmenter la production d’énergie verte », souligne Isabelle Duchesne.

L’entreprise a d’ailleurs effectué des investissements de près d’un million de dollars sur son bâtiment et ses équipements afin de hausser la capacité de production de son département éolien. Dans le but d’améliorer l’efficacité de ses opérations, elle prévoit aussi injecter 750 000 $ dans la robotisation de ses centres d’usinage, l’automatisation de l’ébavurage des pièces usinées et l’acquisition d’un logiciel ERP.

Hydrep caresse également un projet d’agrandissement, qui devrait voir le jour en 2023. Les gestionnaires œuvrent présentement à la planification du projet, dont les détails devraient être élaborés dans les prochains mois.

À cela s’ajoute l’argent engagé de façon récurrente dans la recherche et le développement. « Il y a très peu de produits chez Hydrep pour lesquels nous faisons de la fabrication de séries en grosse quantité, à part ce qui touche au secteur éolien. En général, les gens viennent vers nous pour modifier des produits ou en créer de nouveaux. C’est notre force, c’est ce qui fait qu’on se démarque », affirme la DG adjointe.

Relève

Ayant fondé l’entreprise il y a plus de 40 ans, Yvon Desjardins prépare depuis quelques années sa relève, un processus qui s’accélère et devrait se clore d’ici deux ans environ. Trois employés ont notamment intégré l’actionnariat. Une nouvelle structure est aussi en train de s’implanter avec la nomination de Mme Duchesne au poste de directrice générale adjointe et la création d’un conseil d’administration. « J’ai un MBA, donc je viens apporter un aspect complémentaire aux personnes en place, qui sont plus du côté technique. Je viens renforcer l’aspect gestion. Je forme présentement une équipe administrative. Ça prend un maillage entre la technique et la gestion afin de garantir la pérennité », explique Isabelle Duchesne.

Les employés étant au cœur de la vision d’avenir d’Hydrep, l’entreprise mise aussi beaucoup sur leur développement. Elle vient d’engager un formateur qui aura pour tâche de s’assurer que le transfert de connaissances soit bien documenté, par exemple lors du départ à la retraite de travailleurs. Spécialisée en enseignement, cette ressource va également accompagner l’équipe pour que les formations offertes soient efficaces et que les salariés en tirent le maximum.

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