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Jonathan Thibeault

Investissement de 5 à 8 M$ | Un centre multimodal de transbordement pourrait voir le jour

SAGUENAY — Un centre multimodal de transbordement par train pourrait voir le jour dans la région d’ici 2027. L’entreprise jonquiéroise Nolitrex s’est portée acquéreur des anciens entrepôts de Potvin & Bouchard/BMR dans le but d’augmenter l’offre d’entreposage, mais aussi de doter le Saguenay–Lac-Saint-Jean d’une véritable structure pour les importateurs et exportateurs.

Bien que le projet soit à ses balbutiements, Christian Ricard, le président de Nolitrex, a accepté de lever le voile sur ce projet qui nécessitera des investissements approximatifs de 5 à 8 M$ à terme. En faisant l’acquisition de l’immense terrain bordant le boulevard du Royaume, autrefois l’ancienne route 170, l’investisseur affirme déjà détenir plusieurs feux verts avant même le début d’une construction. « Le zonage du terrain auprès de la ville est déjà conforme et nous avons le rail à proximité. Le site n’est pas situé au cœur de la ville. Il y aurait peu ou pas d’impact sur le trafic local. Ce qu’il manque : l’acceptabilité par le CN en ce qui concerne la construction et la mise en opération d’une voie de desserte avec la condition de gare multimodale », explique-t-il.

Le CN doit donner son aval

Si ce projet voit le jour et obtient l’aval de l’opérateur ferroviaire, il permettra notamment aux importateurs et exportateurs de profiter d’une plus grande flexibilité et d’entrevoir la diminution de certains coûts liés à des pénalités. « Une gare intermodale pour le CN, ce que ça va faire, c’est donner l’avantage au client. Présentement, nos entreprises exportatrices paient des frais de détention dans les entrepôts du Port de Montréal en raison de délais de douanes ou parce que leurs conteneurs ne quittent pas à temps en raison d’un retard du camion ou autres raisons. Ces frais peuvent coûter très cher : de 100 à 300 dollars américains par jour », lance Christian Ricard.

Selon ce dernier, le réseau ferroviaire du Canadien National (CN) reliant Montréal à Jonquière serait déjà construit pour accueillir une augmentation d’un volume de wagons lié à l’ouverture d’un centre multimodal régional. « Le CN avait fait une étude il y a quelques années et il avait été identifié qu’il y a plusieurs milliers de conteneurs qui sortent de la région sous forme de camion. Les camions sont chargés ici, ils se dirigent à Montréal, et souvent, ils reviennent vides. Dans un contexte où l’on parle de diminution des émissions des GES et de taxe carbone, l’idée de faire une gare multimodale au Saguenay–Lac-Saint-Jean viendrait offrir l’avantage d’un transport plus écologique. Pour le CN, il n’y a aucun investissement puisque son réseau est déjà optimisé. À part les investissements de Nolitrex, le reste repose principalement par l’ajout de wagons », soutient l’homme d’affaires. précisant qu’il serait tout à fait possible de voir des wagons de deux étages sur la ligne de chemin de fer Jonquière-Montréal.

Réduire le nombre de camions lourds sur les routes

Rappelant que le train est le moyen de transport de marchandises le plus efficace, notamment en ce qui concerne le grand volume de transport possible par convoi, Christian Ricard croit que ce projet d’infrastructure pourrait permettre la réduction du nombre de camions sur les routes. « Le but est d’amener du volume qui se fait actuellement par camion vers le train. On ne se le cachera pas : les poids lourds peuvent endommager les routes. De plus, le recrutement de camionneurs prêts à faire de longues distances est de plus en plus complexe », indique M. Ricard.

Ce dernier précise au passage qu’il y aura toujours des besoins en matière de transport local par camion. « Ça pourrait faciliter le recrutement puisque les conditions sont plus intéressantes, car ils sont de retour à la maison chaque soir. Ça pourrait aussi ouvrir la porte vers l’électrification des camions. La motorisation électrique ne permet pas le transport longue distance, mais si l’on parle de transport de conteneurs, demain matin, je changerais toute ma flotte vers l’électrique », conclut-il.

Le centre multimodal pourrait marquer un tournant

SAGUENAY — Après des années de défis en matière d’entreposage et de logistique, Christian Ricard croit que les besoins régionaux pourraient être comblés au terme d’une mise en service du projet de centre multimodal de transbordement de Jonquière.

Avec l’ouverture d’un entrepôt de l’entreprise Transcol à Métabetchouan, la construction du mégaentrepôt de Zéro-2 Logistique et la superficie totale du nouveau site d’entreposage de Nolitrex, pressenti pour devenir un centre multimodal de transbordement, Christian Ricard croit que les besoins régionaux pourraient être comblés.

« Le contexte économique qui est là, combiné à des coûts très élevés, l’entreposage coûte plus cher qu’avant la pandémie. Dès que toute l’offre sera stabilisée, je ne crois pas que ça va s’agrandir avant plusieurs années. […] Ça permettra au moins d’éviter aux entreprises de chez nous de louer de l’espace à Québec ou Montréal », croit-il.

Les coûts de construction ont presque triplé

Ayant eu plusieurs projets dans les dernières années, l’homme d’affaires est bien placé pour parler du contexte actuel. « Avant la pandémie, les prix de construction oscillaient autour de 80$ du pied carré. Aujourd’hui, les bâtisses se construisent à 200$ du pied carré. Ça fait en sorte qu’un projet de 2019 aurait pu coûter autour de 2 M$ et qu’en 2024, les mêmes plans coûteraient plus de 6 M$. Au final, ça fait en sorte que les superficies locatives se louent plus cher. Est-ce que le marché est capable de prendre ces nouveaux prix-là ? », se questionne Christian Ricard

Une visite du vaste site qui a été occupé par Potvin & Bouchard pendant des décennies pourrait donner raison aux prévisions du président de Nolitrex. En effet, le site possède plusieurs locaux d’entreposage bien identifiés, en plus de profiter d’un site extérieur imposant relativement éloigné de résidences et à proximité de l’autoroute 70.

« Avec les 100 000 pieds carrés en construction à Chicoutimi, les 61 000 pieds carrés et Transcol, les 100 000 pieds carrés intérieurs de l’ancien entrepôt de Potvin & Bouchard, additionnés à une superficie extérieure de 600 000 pieds carrés sur ce même terrain, je crois que ce qui se construit et ce qui est prévu répondront amplement aux besoins du marché. »

Spécialiste du transbordement par train

Christian Ricard et son équipe ne sont pas à leur premier projet en matière de transbordement par train. En effet, la firme jonquiéroise possède des installations sur la rue de l’Énergie, un site prisé par les industries forestières et de l’aluminium. « Le seul transbordement qui se fait présentement au Saguenay–Lac-Saint-Jean, c’est du transbordement de wagon pour le bois d’œuvre et l’aluminium. Tout ce qui part en conteneur arrive à Montréal ou à Prince Rupert en Colombie-Britannique. Tout ce qui transite par le CN part de Montréal ou les alentours. On fait le pari que le projet pourrait marquer un tournant pour le marché régional », met-il en relief.

Dernièrement, l’entreprise a également remis en service une voie de desserte sur la rue Saint-Pierre, toujours à Jonquière, afin de répondre aux besoins en matière de transbordement. « Les locaux avaient déjà été loués par Gagnon-Frères. Depuis, l’endroit était abandonné. Nous avons rénové l’accès, nous avons remis les installations aux normes et le CN a réapprouvé la voie adjacente à la bâtisse », raconte-t-il, précisant que son organisation caresse d’autres projets, mais qu’ils fondent leurs espoirs sur la réalisation de leur projet de centre multimodal. « L’étape la plus cruciale sera l’acceptabilité par le CN sous la condition d’une gare intermodale. C’est la condition majeure pour la rentabilité et l’utilité d’un tel projet », conclut Christian Ricard.

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