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Marjorie Blackburn, MBA, CRHA

Le regard dubitatif, tu contemples ton reflet : « Miroir, miroir, dis-moi qui est le plus compétent entre tous ces candidats. »

Je n’ai rien contre l’autocontemplation, mais je doute fort que la réponse s’y trouve. Or, bien que la situation nous apparaisse absurde, elle est réelle et porte même un nom - c’est l’effet miroir (ou de similarité) : un biais de perception courant en recrutement. Cet habile subterfuge de notre matière grise nous amène à choisir, bien inconsciemment cela dit, les candidats qui nous ressemblent (ethnicité, religion, sexe, statut social, etc.).

C’est l’équivalent du moment où ma vie ne tenait qu’à une frite. Désorientée, en proie à un violent choc culturel, j’ai 17 ans et je déambule au centre-ville de Mexico avec comme seul guide mon Larousse de poche (merci, maman) et 3-4 miettes de courage. Déracinée, je cherche en vain un repère, un ancrage. Et c’est là que j’aperçois quelque chose de familier : un McDonald’s. Oh réconfortant « M » lumineux, c’est vers toi que j’irai!

Trêve de Mc-taphore (oui, j’ai osé), on ne peut nier que c’est facile et sécurisant de choisir le candidat-effet-miroir, mais est-ce vraiment enrichissant? En prendre conscience et identifier nos appréhensions est un excellent point de départ pour éviter le piège, et ce dès la réception du CV. Et surtout, rappelons-nous que derrière ces bouts de papier, il y a de précieux humains :

Amandine Justine Chargé Montigaud. La lecture de ce nom vous fait peur? C’est ce que de nombreux recruteurs se sont dit lorsque j’ai postulé aux offres de la région du Saguenay. Une immigrante nouvellement arrivée, française de surcroît, avec un nom imprononçable. J’ai eu plus de misère à me faire contacter par les recruteurs qu’à sortir du ventre de ma mère. Moi qui ai travaillé dans les RH le plus clair de mon temps, je me suis retrouvée dans une situation inédite : mon profil n’intéresse personne.

Et pourtant, tout autour de moi me dit le contraire. On me parle d’une pénurie de main-d'œuvre jamais atteinte auparavant et des opportunités professionnelles infinies. Alors pourquoi je ne trouve pas de travail malgré mes bagages et mon sourire ravageur?

C’est après des semaines à enchaîner les refus que j’ai compris qu’il est difficile, en tant que personne immigrante, d’inspirer la confiance des recruteurs. Et si, collectivement, on s’offrait le cadeau d’enrichir nos milieux professionnels?

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