N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : « La main-d’œuvre, une ressource inestimable » publié dans notre édition du mois d’août.

SAGUENAY – Le développement des compétences et la requalification constituent des pistes intéres-santes dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre. Toutefois, ils ne représentent pas une pilule magique, prévient Jean-Philippe Bradette, CRHA et président d’Apprentx, firme qui propose une application d’apprentissage.

« Apprendre, ça prend du temps. Changer un comportement, c’est difficile, c’est long et c’est complexe. Le perfectionnement (upskilling) et la requalification (reskilling), c’est une solution, mais ça ne peut pas arriver subitement du jour au lendemain. […] On veut aller vite, mais le cerveau humain n’apprend pas plus rapidement », rappelle l’entrepreneur. Il déplore d’ailleurs le fait que le monde du travail se mette à s’y intéresser seulement maintenant, alors qu’il aurait fallu s’en préoccuper déjà il y a 15 ans.

L’intention de développer les compétences des employés est excellente, mais il faut éviter de tomber dans la formation à outrance et perdre de vue son sens. « Nous sommes dans une ère où l’information et les stimulus arrivent de partout dans l’entreprise. Les apprenants sont en surcharge cognitive. Si l’on reçoit huit ou dix formations de façon rapprochée, c’est impossible qu’elles soient efficaces », illustre M. Bradette.

Prioriser

La compétence est une notion complexe dans laquelle interviennent toutes sortes de mécanismes internes et externes à une personne. Lorsqu’on veut développer les aptitudes d’un employé, il faut donc de cibler celles qui possèdent une grande valeur ajoutée pour l’entreprise. « On doit choisir ce qui aura véritablement un impact pour l’organisation. En matière de compétences transversales (soft-skills), les gestionnaires ont souvent de la difficulté à sélectionner celles auxquelles donner la priorité », résume le président d’Apprentx. Il estime que tant l’employeur que l’apprenant doivent savoir où ce dernier se situe et ce qu’il a à améliorer. Le sens de la formation et son impact dans le travail quotidien doivent aussi être clairs pour l’employé.

La question du transfert des connaissances acquises vers le travail revêt également une grande importance. Plusieurs articles scientifiques évaluent que seulement 20 à 25 % des notions vues en apprentissage sont transférées. « Si tu ne mets pas en pratique ce que tu as vu, dès le lendemain de la formation, tu commences à oublier. […] Si l’on veut accélérer la formation, il faut faire en sorte que l’étudiant puisse aller expérimenter rapidement dans le milieu de travail. Ça prend toutefois un coaching de qualité, un suivi, des façons de s’assurer de ce que la personne connaît réellement versus ce qu’elle pense savoir », souligne Jean-Philippe Bradette.

Requalification

Quant à la requalification, il s’agit aussi d’une avenue intéressante. Il est toutefois nécessaire de s’assurer de l’adéquation entre l’expérience de la personne et l’emploi choisi pour sa requalification. « Quand tu changes drastiquement de métier, c’est un nouvel enseignement. On repart à 0. Ça prend plusieurs années pour former un travailleur dans ce processus. La proximité avec le domaine de connaissances est très importante », conclut M. Bradette.