ALMA – Jennifer Harvey est au fait des types d’abattoirs existants. En effet, la femme d’affaires est copropriétaire avec son conjoint, Rémy Savard, d’un centre de découpage de la viande à Alma ainsi que d’une ferme de production bovine destinée au marché de la viande.
« Mon conjoint et moi possédons la ferme l’Air de bœuf à Bégin et nous élevons des bovins. Comme la plupart des éleveurs du Saguenay–Lac-Saint-Jean (SLSJ), nous devions faire abattre et faire transformer notre viande dans le coin de Québec par faute d’infrastructure dans la région pour nous desservir. Durant la pandémie, nous avons eu l’idée de vendre nos produits à la ferme. Nous avons procédé à quelques investissements, notamment à l’achat de vaches Wagyu pour augmenter la génétique et la qualité de notre troupeau. C’est à ce moment que j’ai plongé dans l’univers des abattoirs, des centres de découpe et de toute la règlementation qui encadre le secteur du traitement de la viande », indique Jennifer Harvey.
Faire bouger les choses
Le couple d’entrepreneurs réalise au début de son projet qu’il n’y a pas de centre de transformation de viande de catégorie C1 dans la région. L’appellation C1 désigne un lieu de découpe qui respecte les normes gouvernementales en matière de traçabilité et de préparation des carcasses. Seuls les centres C1 peuvent fournir les épiceries et les restaurants.
« La vérité, c’est qu’il y a des C1 au SLSJ, mais qu’ils ne sont pas ouverts à de nouveaux clients. En effet, ils ont déjà des ententes signées avec des abattoirs. Au fil de nos recherches, nous avons rencontré Myriam Larouche de l’entreprise l’Orée des champs. Mme Larouche est copropriétaire à la fois d’un élevage d’agneau et d’un centre de transformation C1, qu’elle nomme l’Orée Signature. Toutefois, lorsque nous l’avons approchée, elle préférait concentrer ses énergies sur sa ferme et arrêter les activités du centre de découpe. »
Les propriétaires de l’Air de bœuf décident alors de mettre la main à la poche et font une proposition qui est acceptée par Myriam Larouche pour l’acquisition de l’Orée Signature. « C’est un premier pas. Par l’achat de cette infrastructure, nous voulons stimuler le milieu agricole en ouvrant le centre aux producteurs. De plus, notre volume de bovins produits ne justifie pas à lui seul l’achat d’un tel bâtiment. Les éleveurs régionaux peuvent désormais faire abattre leurs bêtes dans un abattoir de catégorie A1 et faire transformer leurs carcasses chez nous. Des ententes ont déjà été prises avec l’Orée des champs, la Ferme Villoise et la Ferme d’en haut. »
Abattoir A1
En mutualisant un C1 dans la région, le couple Savard-Harvey fait un premier pas vers la régionalisation du traitement de la viande. Cependant, une partie importante du casse-tête est encore à trouver : l’abattoir. En effet, il n’existe pas au SLSJ d’endroit où les bêtes peuvent être mises à mort pour ensuite rejoindre le marché des épiceries et des restaurants. « Un Centre de transformation doit obligatoirement traiter de la viande provenant d’un abattoir de catégorie A1 ou fédéral. Ce sont des infrastructures très normées qui garantissent la traçabilité des carcasses et leur qualité. Dans ces installations, un agent du MAPAQ s’y trouve en permanence et tout ce qui y est produit y est inspecté par un vétérinaire. L’abattoir A1 le plus près de notre région se trouve à Lévis. Donc un éleveur qui souhaite vendre sa viande en épicerie et en restaurant n’a pas le choix de passer par ce bâtiment. »
Abattoir fédéral
L’abattoir fédéral diffère du A1 par le volume traité. Le bâtiment normé par le gouvernement canadien va imposer des critères pour le commerce pancanadien et international. « Certaines grandes chaines d’épiceries vont exiger des viandes provenant d’abattoirs fédéraux. Il faut savoir que ces centres sont très coûteux à opérer et sont donc réservés à la grosse production. Une entreprise comme Olymel possède ce type d’abattoir pour répondre à sa demande. »
Abattoir de proximité
C’est le type d’installation qu’on retrouve au SLSJ. Un abattoir de proximité peut traiter les animaux provenant des fermes des alentours. « Il y a cependant un bémol, la carcasse d’une bête traitée dans un abattoir de proximité ne peut pas être vendue sur le marché des épiceries et des restaurants. C’est intéressant pour un éleveur de posséder un abattoir de proximité seulement s’il souhaite vendre sa viande directement à des clients. Ses produits ne peuvent pas être vendus ailleurs que chez lui », explique la copropriétaire de l’Air de bœuf.