SAGUENAY – Propriétaire du centre de toilettage Beauté Canine & Féline depuis 2014, Annie Perron a su faire prospérer son commerce au point qu’elle est sur le point de se lancer dans une expansion. Pour elle, toutefois, sa plus grande réussite consiste plutôt dans l’intégration de personnes autistes ou ayant une déficience intellectuelle au sein de son équipe. Portrait d’une entrepreneure de cœur. 

C’est presque par hasard que Mme Perron s’est retrouvée à la tête d’un salon de toilettage. Oeuvrant à l’époque dans le domaine de la vente de voiture, elle a profité d’un lock-out pour suivre un cours de toilettage. Elle avait alors pour but de pouvoir toiletter elle-même ses deux chiens. « C’est en cherchant sur Kijiji pour acheter unclipper que je suis tombée sur l’annonce du centre à vendre. Je me suis dit qu’elle devait avoir du matériel qui pourrait m’intéresser et je suis allée la rencontrer. Environ 48 heures plus tard, je décidais d’acquérir son commerce », raconte l’entrepreneure. 

Une employée de 15 ans d’expérience est demeurée avec elle au sein du salon. De deux personnes au départ, Beauté Canine & Féline est maintenant passé à une équipe de huit salariés qui traitent une vingtaine de rendez-vous par jour en plus d’une quinzaine de visites sans rendez-vous. « Au début, quand les gens venaient pour un toilettage, je leur offrais le suivant gratuitement. Je m’intéressais à eux, à leur animal. La grande compétence d’Hélène Beaudoin, l’employée qui était restée avec moi, a également joué pour attitrer la clientèle. Elle était connue. Et bien sûr, l’intégration de nos câlineurs a fait parler de nous, même si ce n’était pas le but premier », indique Annie Perron. 

Câlineurs

Ces câlineurs sont des personnes autistes ou ayant une déficience intellectuelle qui viennent effectuer un stage au sein de l’entreprise grâce à une collaboration avec le CIUSSS du Saguenay–Lac-Saint-Jean. « Je me suis rapidement aperçue que je ne supportais pas les jappements des chiens. […] Quand il y a un chien anxieux, il excite les autres. Ça peut vite devenir chaotique. […] Il fallait que je trouve une solution. J’ai eu l’idée d’engager des gens pour prendre soin des animaux en attente pour diminuer leur anxiété. C’est ainsi que j’ai contacté le CIUSSS », précise Mme Perron. 

Selon elle, les câlineurs apportent un véritable bénéfice au niveau du bien-être animal. Ils vont promener les chiens anxieux un peu en laisse ou simplement s’asseoir à côté d’eux et les flatter pour les calmer. « Mon meilleur exemple, c’est avec un de nos anciens câlineurs, qui s’appellait John. Un jour, il y avait un chien qui jappait sans arrêt. Il n’y avait rien à faire. John est arrivé, il a posé son front sur celui du chien sans dire un mot. Le chien s’est calmé tout de suite », révèle l’entrepreneure. 

Une fierté

Annie Perron considère que l’intégration de ces jeunes travailleurs autistes ou ayant une déficience intellectuelle est l’un de ses plus beaux succès. « Je suis fière d’avoir réussi cette intégration avec nous et aussi d’avoir incité d’autres entreprises à le faire. Ils font partie de notre équipe », mentionne-t-elle. 

Actuellement, le salon de toilettage en emploie trois. L’un d’eux, Simon Paquin, est présent depuis la création des postes de câlineurs, en 2015. « Ça fait huit ans qu’il est avec nous! C’est quelque chose. Il a été remarqué par un journaliste de Radio-Canada qui est venu faire un reportage. Ça a fait boule de neige. Des cliniques vétérinaires et salons m’ont contactée pour savoir comment implanter des câlineurs dans leur commerce. »

Samuel Ouellet a intégré l’équipe depuis quelques années. Son travail lui a permis de développer de nouvelles compétences et d’apprendre à se faire confiance. Il a pu s’établir dans un appartement supervisé, puis dans un logement où il est autonome. « Toute l’équipe est allée l’aider à s’installer ! […] Au salon, il a appris à laver les animaux. Il a même eu un diplôme de la commission scolaire reconnaissant son rôle d’aide-toiletteur », souligne Mme Perron. 

Hélène Bélanger est également présente depuis plusieurs années. « C’est elle qui fait tous nos foulards. Sa santé ne lui permet plus de laver ou de sécher les chiens, mais je tiens à la garder avec nous, donc je veux lui confier de nouvelles tâches. J’ai un projet pour améliorer l’expérience client et je pense que ce sera parfait pour elle », résume la propriétaire.

Costco

Pour Annie Perron, une autre de ses réussites entrepreneuriales est d’avoir été le premier fournisseur de services à entrer chez Costco au Canada pour les cartes prépayées, en décembre 2019. Elle raconte qu’à l’époque, la multinationale n’était pas très encline à inclure une entreprise de services puisqu’elle ne pouvait pas rembourser leurs clients si le service reçu n’était pas à la hauteur de leurs attentes. 

« Le défi a été de taille. Ma porte d’entrée a été de leur parler de chiffres et de statistiques, comme le nombre de chiens par résidence, le montant annuel dépensé par propriétaire, etc. C’est finalement après ma troisième tentative que j’ai réussi à me faire entendre. J’ai gravi les échelons, ce qui n’était pas facile, puisque cela se déroulait en anglais », relate la femme d’affaires. Ses cartes ont été vendues au Costco de Chicoutimi pendant un an, puis elle a choisi de cesser cette collaboration. 

Expansion

Le salon est actuellement à l’étroit dans ses locaux occupe sur la rue Sainte-Anne à Chicoutimi. Annie Perron travaille donc sur un projet d’agrandissement. Elle vient tout juste de confirmer le bail du local adjacent à son commerce, ce qui lui permettra de doubler sa superficie. « Je pourrai ajouter des espaces pour le toilettage. Nous aimerions aussi implanter un lave-toutou pour que les clients qui le désirent puissent venir nettoyer leur animal. J’ai également un autre projet qui sera vraiment intéressant, mais je préfère ne pas en dire plus pour l’instant puisque ce n’est pas assez avancé », explique-t-elle. 

L’entrepreneure commence aussi déjà à songer à sa relève. « C’est quelque chose qui me préoccupe. Ça nécessite des sous pour reprendre une entreprise, en plus d’un intérêt et de compétences en administration. Je pense que ce sera un défi », estime-t-elle.

Ces inquiétudes ont amené Mme Perron à demander l’accompagnement d’un mentor. « Ça fait neuf ans que je roule ma bosse comme entrepreneure seule, avec certains succès, mais aussi avec beaucoup de questions. Je suis la seule personne en affaires dans mon entourage. Je pense qu’avoir un mentor va me permettre d’échanger avec lui sur mes questionnements, de trouver des pistes de solution », explique-t-elle. 

Par la suite, Annie Perron aimerait donner au suivant. « J’ai envie d’aider quelqu’un à réussir en affaires. Qui sait, ce sera peut-être mon futur repreneur », conclut-elle.