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Maxime Hébert-Lévesque

SAGUENAY – Le plus grand complexe récréatif au Canada est sur le point de voir le jour à Saguenay à la sortie 42 de l’autoroute de l’aluminium, selon son promoteur. Le projet IntenCité, initialement annoncé en 2016, aura connu plusieurs revers ainsi que de nombreuses versions avant de voir le jour. Aujourd’hui, Pascal Bouchard annonce confiant que l’ouverture des installations se concrétisera le 1er avril 2021.

L’imposant bâtiment de deux étages, d’une superficie de 58 000 pieds carrés, sera livré pour le 20 décembre de cette année. Les travaux vont de bon train puisque l’immeuble, principalement composé d’acier, a maintenant quatre murs et un toit. « Sur le chantier, il n’y a que des entreprises de la région comme Béton provincial et Pro-Sag mécanique. C’est le Groupe EPA (Éric Painchaud architecte) qui fait office concepteur des plans et d’entrepreneur général », explique Pascal Bouchard, copropriétaire d’IntenCité.

Un mini Walt Disney

Le projet de 10 M$ consiste en un gigantesque parc récréatif, c’est-à-dire un lieu réunissant sous le même toit une multitude d’activités virtuelles et physiques. Ce concept devrait attirer, selon ses propriétaires, environ 200 000 personnes par année pour un chiffre d’affaires espéré à 5 M$. En plus d’un bâtiment principal, le terrain de 2 millions de pieds carrés devrait accueillir un hôtel thématique ainsi qu’une station-service offrant des équipements d’entretien pour les propriétaires de véhicule récréatif.

« IntenCité, c’est un mélange entre le Dooly’s et le Rec Room de Toronto. Mais, je ne voulais pas que des tables de billard, je voulais plus d’un ingrédient à ma pizza. Donc, en plus du restaurant, nous offrons six terrains de Dek hockey avec une estrade pouvant accueillir 300 spectateurs pour un roulement de 120 joueurs à l’heure. Également, il y aura un stand de pratique de golf qui pourra recevoir plus d’une vingtaine de frappeurs à la fois. À l’étage, il y aura une halte-garderie, un jeu d’évasion et tout cela, sans compter les nombreuses arcades de jeux vidéo pour pratiquer du ESport et nos simulateurs de baseball, basketball et soccer. Pour résumer, c’est comme un mini Walt Disney qui pourra accueillir 550 personnes à la fois. »

Le promoteur vise une clientèle plutôt jeune, mais il assure que le centre sera pour tous les âges. Il renchérit également en précisant qu’il ne sera pas nécessaire d’être un grand sportif pour trouver son compte à IntenCité. « Bien qu’il y ait des sports, nous priorisons l’amusement plutôt que la rivalité. Au Dek hockey, par exemple, les gens seront placés dans des équipes composées de joueurs du même niveau. Nous voulons devenir l’arrêt principal des fêtes familiales, des “5 à 7” et événements corporatifs. Le permis de bar couvre l’ensemble du bâtiment, alors les gens ne seront pas restreints à consommer à un endroit précis ».

Un chemin de croix

Pascal Bouchard aura traversé plusieurs épreuves avant de voir son projet naître. En effet, 2016 aurait dû être l’année de consécration lorsque l’entrepreneur, opérant sous le nom de Groupe Goliath, avait réussi à signer un gros contrat avec la Ville de Saguenay. « L’entente était que la municipalité nous louait nos terrains de soccer intérieur pour ses quatre clubs ». Ce contrat devait rapporter à l’homme d’affaires et ses partenaires 661 000 $ par année. Toutefois, la suite des choses a été tout autre.

« L’entente avec la Ville en poche, nous étions prêts à construire. À l’époque, l’un de mes associés était un grand joueur dans la construction de complexes sportifs, c’était en quelque sorte le cerveau de l’opération. Malheureusement, il est décédé peu de temps après la signature avec la Ville. Nous nous sommes donc retrouvés du jour au lendemain sans entrepreneur général et dans l’impossibilité de respecter les échéanciers fixés avec Saguenay. Le maire de l’époque a donc annulé notre contrat et nous avons dû faire une croix sur le projet ». Bien que l’événement ait été crève-cœur, M. Bouchard n’a pas perdu espoir pour autant. « Le sport traditionnel m’a laissé en plan, alors je me suis tourné vers le ESport. C’est le futur, partout dans le monde le jeu vidéo remplit des stades. J’ai revu mon concept, j’ai trouvé des partenaires et, aujourd’hui, je n’ai jamais été aussi près de réaliser mes rêves ».

La technologie à l’avant-plan

IntenCité mettra à la disposition de sa clientèle une application mobile téléchargeable. L’outil servira, entre autres, à mesurer les performances de l’utilisateur sur les différents jeux vidéo et simulateurs virtuels. « Cela nous permettra de placer en compétition des gens du même niveau. De plus, cela augmentera l’expérience client puisque ceux-ci pourront suivre en temps réel leur amélioration et leur positionnement dans le classement des joueurs. Il n’y a pas de limite avec ce type d’outil. Peut-être qu’un jour les gens pourront payer leur consommation directement à partir de l’application ». Toujours dans cette approche technologique, les clients d’IntenCité n’auront pas à s’entretenir avec un membre du personnel afin de pratiquer leurs activités. Des tablettes seront installées sur les différentes stations de jeu et c’est à partir de celles-ci que les joueurs pourront démarrer une partie et accéder au matériel requis.

La réalisation d’une vie pour Pascal Bouchard

Tout commence, il y a 20 ans, quand l’entrepreneur achète un petit terrain de baseball tout près de son ancienne compagnie, Ongerneige. « Les gens du Dek hockey, un sport que je pratiquais, m’ont approché pour que je m’occupe de l’organisation des pratiques et des tournois. On a donc commencé à jouer, durant l’hiver, sur le terrain de baseball que je possédais. De fil en aiguille, les choses se sont développées et je me suis retrouvé avec 2800 joueurs et j’accaparais régulièrement quatre arénas », explique M. Bouchard.

L’homme d’affaires est donc venu à la conclusion que le terrain de baseball était trop petit et qu’il serait préférable d’avoir un endroit qui centraliserait les activités. « Je me suis mis à imaginer un complexe où il y aurait du Dek hockey, du golf et même du soccer au même endroit ».

Une tourbière

C’est un ami de l’entrepreneur qui lui parle pour la première fois du terrain où se situe actuellement l’IntenCité. Il s’agit d’un endroit idéal puisqu’il se trouve près d’une sortie d’autoroute. « Cela m’a pris 15 ans avant d’acquérir ce terrain. La première fois que j’ai voulu l’acheter, il appartenait au ministère des Transports du Québec et, faute de connaissances, j’ai manqué l’ouverture des enveloppes. J’ai dû attendre que le premier acheteur le revende. »

Une fois le titre de propriété en poche, Pascal Bouchard entreprend ses premiers travaux : l’aménagement de chemins à partir de béton concassé récupéré d’un pont en démolition. « J’ai appelé l’Environnement afin de savoir comment procéder. C’est à ce moment que j’ai appris que mon terrain était en fait une tourbière (milieu humide). Pour résumer, avant de commencer de quelconques travaux, j’ai dû acquérir des servitudes de conservation. Ce processus a pris cinq ans et a coûté au bas mot 350 000 $ », explique l’homme d’affaires.

InterCité n’est pas un petit projet, puisqu’il requiert un investissement de près de 10 M$. Il fallait que l’entrepreneur ait les reins solides, comme le veut l’expression populaire. « J’ai connu le succès dans le passé. Jeune, j’ai démarré l’entreprise Ongerneige, une compagnie de déneigement située à Jonquière et que j’ai possédée pendant 30 ans. Les choses ont bien fonctionné et, avant de vendre la firme, j’avais une cinquantaine d’employés, 4000 clients, 40 camions et un chiffre d’affaires de 2 M$ par année. J’ai fait du déneigement toute ma vie pour me payer ce projet ! »

Se réinventer et suivre ses rêves

Lorsque le contrat avec la ville de Saguenay et les associations de soccer ont échoué en 2016, Pascal Bouchard ne s’est pas laissé abattre. Cela lui a permis de mettre en œuvre un autre plan qu’il chérissait depuis quelque temps. « Chez Ongerneige, j’organisais dans les bureaux des tournois de jeux vidéo. Plus précisément, on jouait à F1 2009 du développeur EA. C’était tellement devenu populaire que des écuries se sont créées et j’ai dû m’équiper de 16 volants et d’un écran géant. Le niveau des joueurs avait atteint des sommets vertigineux et la compétition était devenue féroce. Les gens se présentaient une heure plus tôt pour ajuster les réglages de leur véhicule et ils coursaient, pour la plupart, avec des casques de moto sur la tête », explique tout grand sourire l’homme d’affaires. « Ces courses attiraient du monde âgé de 25 à 50 ans et de toutes les professions. J’ai réalisé tout le potentiel du jeu vidéo en observant à quel point ces compétitions étaient populaires. En 2016, lorsque j’ai subi mon revers, j’ai su immédiatement dans quelle voie me diriger ! »

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