Auteur

Karine Boivin Forcier

N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : Construction, une industrie en mutation publié dans notre édition du mois de février.

SAGUENAY – Le ministre du Travail, Jean Boulet, a déposé, le 1er février, le projet de loi 51, qui vise à moderniser l’industrie de la construction. Les mesures qu’il propose ciblent la productivité et l’efficacité dans l’organisation du travail, notamment en améliorant la mobilité, la flexibilité et l’inclusion de la main-d’oeuvre.

Selon le ministre, le projet de loi vient proposer des solutions concrètes à la pénurie de main-d’oeuvre. « La loi sur l’industrie de la construction n’a pas été révisée depuis 30 ans. Notre gouvernement saisit l’occasion, vu le contexte économique actuel, de moderniser celle-ci afin qu’elle soit adaptée aux réalités d’aujourd’hui. Notre industrie est très sollicitée. Il est essentiel d’augmenter sa productivité. C’est donc un moment opportun pour revoir des façons de faire et s’assurer que l’industrie fonctionne de façon plus souple et plus efficace », a déclaré M. Boulet dans un communiqué.

Une bonne nouvelle

La démarche a été saluée par l’Association de la construction du Québec (ACQ), qui considère qu’il s’agit d’une bonne nouvelle pour les régions. Selon le porte-parole de l’organisme, Guillaume Houle, la réforme majeure du régime de mobilité de la main-d’oeuvre sera très intéressante pour les régions. Ce changement viendrait lever une grande partie des restrictions qui limitent les possibilités pour les travailleurs de la construction d’oeuvrer sur des chantiers à l’extérieur de leur région de résidence.

« Dans un contexte où il y a beaucoup de travail dans les grands centres, ça peut créer des opportunités d’affaires pour des entreprises des régions qui emmèneraient leurs travailleurs », indique-t-il.

La possibilité de voir des travailleurs des grandes villes s’expatrier pour faire des chantiers au détriment des salariés régionaux n’inquiète pas M. Houle. « Québec et Montréal, c’est là que la pénurie de main-d’oeuvre est la plus forte et qu’il y a le plus de contrats à réaliser. Ce sera le cas pour 10 à 15 ans. Il y a 150 milliards de dollars d’investissements prévus au Plan québécois des infrastructures. [...] Dans un contexte où il y avait 10 000 à 12 000 postes vacants en 2023 et où le niveau d’activité demeure élevé dans la construction, je vois mal comment les travailleurs de Montréal pourraient s’expatrier dans d’autres régions. C’est plutôt l’inverse qu’on risque d’observer », affirme-t-il.

Flexibilité

Le porte-parole de l’ACQ estime aussi que la plus grande flexibilité dans les métiers proposée par le projet de loi permettra d’augmenter l’efficacité sur les chantiers et la gestion de la main-d’oeuvre. « Il y a 25 corps de métier dans la construction. Un travailleur ne peut actuellement pas exercer de tâches autres que celles du métier pour lequel il possède une carte de compétence. Avec le projet de loi, un salarié pourrait, dans la continuité de son travail et pour une courte durée, effectuer certaines tâches qui n’appartiennent pas à son corps de métier », explique-t-il.

Par exemple, un peintre qui constaterait qu’il reste un ou deux trous à boucher sur un mur pourrait le faire au lieu de devoir faire revenir le plâtrier qui était parti sur un autre chantier à plusieurs kilomètres. « Rappeler un travailleur pour faire une correction de 15 minutes, ce n’est pas rentable. Avec cette mesure, on entrevoit un gain en productivité pouvant aller jusqu’à 1 G$ », précise Guillaume Houle.

Autres gains

Pour M. Houle, les modifications que le ministre souhaite apporter au régime de négociation des conventions collectives seront bénéfiques pour l’industrie. En devançant la période de maraudage, cela devrait donner plus de temps aux parties pour négocier. « La création d’une table permanente sur les relations de travail à la Commission de la construction du Québec (CCQ) est aussi une très bonne nouvelle. Cela nous permettra de discuter de ces enjeux en permanence », mentionne le porte-parole de l’ACQ.

L’équipe de l’organisme poursuit par ailleurs une analyse plus approfondie du projet de loi. Elle souhaite pouvoir apporter des suggestions afin de l’améliorer lors de son étude en commission parlementaire. « Nous évaluerons les fins détails de son application. C’est sûr que nous aurons des commentaires », conclut Guillaume Houle.

Quelques mesures

Avec les mesures proposées, le gouvernement veut:

- favoriser une meilleure organisation du travail en permettant une plus grande mobilité de la main-d’œuvre sur le territoire québécois, tout en conservant une priorité d’embauche régionale;

- faciliter l’accès à l’industrie de la construction et l’inclusion des groupes représentatifs, notamment les femmes, les membres des Premières Nations, les Inuit ainsi que les personnes issues de l’immigration;

- renforcer la gouvernance, le rôle et le fonctionnement de la Commission de la construction du Québec en favorisant sa transparence et son imputabilité;

- une amélioration du fonctionnement du Carnet référence construction;

- une simplification de la certification pour les personnes diplômées du programme menant à l’exercice de l’occupation spécialisée de monteur de lignes;

- des précisions réglementaires permettant le renouvellement du certificat de compétence en cas de retrait préventif ou de congé de maternité, de paternité ou parental.

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