Auteur

Maxime Hébert-Lévesque

Voici la Une du journal du mois de février 2022

SAGUENAY – La microbrasserie saguenéenne La Voie Maltée (VM) effectue un important changement à son modèle d’affaires. Avec un investissement de 1,6 M$, le brasseur saguenéen peut augmenter de façon substantielle sa capacité de production annuelle, lui permettant de devenir un important fabricant de breuvages.

Les prochaines années ne seront pas ennuyeuses pour les gestionnaires de la VM qui viennent d’investir 1,6 M$ dans l’achat d’équipement spécialisé leur permettant d’augmenter leur capacité de production annuelle de 14 000 hectolitres à 22 500 hectolitres (2 250 000 litres). « C’est sans prétention que nous pouvons affirmer être le plus gros fabricant de bière de la région. Devant ce fait accompli, il y a un an, nous avons entamé une réflexion stratégique sur l’avenir de l’entreprise. Nous en sommes venus à la conclusion qu’avec notre réseau de distribution, notre force manufacturière et notre savoir-faire nous pouvions incorporer de nouvelles gammes de produits à notre portefeuille et ainsi échanger notre étiquette de fabricant de bière pour celui de fabricant de breuvages », explique Daniel Giguère, président-directeur général de La Voie Maltée.

Suivre les tendances

Au cours des prochains mois, la VM mettra en marché une gamme de hard Seltzer, une eau gazéifiée alcoolisée aux saveurs boréales. Il s’agit d’un produit très populaire aux États-Unis et dont la commercialisation est principalement effectuée par les grands brasseurs comme Molson-Coors.

« C’est le plus gros investissement de la VM depuis le début des opérations et il a été fait pour diversifier notre portefeuille de produits. L’information découlant de nos études de marché démontre que les “hard” Seltzer connaissent une croissance fulgurante auprès des jeunes consommateurs. L’avenir est favorable aux boissons rafraîchissantes et peu caloriques. Nous commencerons par lancer nos trois sortes de Seltzer et par la suite, nous introduirons des eaux gazeuses et même des “smoothies”. Nous avons également la sensibilité de mettre en valeur notre territoire en aromatisant nos eaux alcoolisées avec des fruits boréaux provenant du Lac-Saint-Jean », lance l’homme d’affaires.

Se diversifier pour réduire le risque

L’intention de mettre en marché des breuvages, outre la bière, remonte à l’année dernière avec l’acquisition de la cidrerie Jolie Rouge. « La COVID nous a appris plusieurs choses : ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier ! En fabriquant une variété de boissons, nous rejoignons une plus grande part de clientèle et ainsi, nous nous assurons d’avoir différentes sources de revenus. » Daniel Giguère explique également que la gestion du risque est désormais au cœur des priorités. Ses restaurants de Saguenay et Québec, qui ont écopé durant les mois de fermeture dus aux mesures sanitaires, la diversification et la croissance sont des solutions pour réinjecter de l’argent à l’interne et maintenir à flot les secteurs plus touchés.

Bête de ne pas le faire

« L’usine de Chicoutimi est raccordée à l’eau de la municipalité. Ces eaux sont tirées des rivières avoisinantes et ont la particularité d’être faibles en minéraux. Une caractéristique recherchée lorsqu’on brasse de la bière, mais également pour d’autres produits comme ceux que nous nous apprêtons à mettre en marché. Alors où d’autres doivent investir dans des systèmes d’adoucisseur d’eau, de notre côté, la production de Seltzer n’augmente pas les coûts d’opération ».

De plus, les cuves pour la carbonatation, les fermenteurs coniques et autres équipements brassicoles sont également appropriés pour la confection d’eau gazeuse, de Seltzer et autres boissons. « La fabrication de bière va se faire en parallèle de celle des Seltzer et cela n’affectera pas le calendrier de production. Au contraire, nous allons optimiser au maximum nos installations et ça permet ainsi la rétention de nos employés et l’embauche de cinq ressources supplémentaires à la salle de brasse et au laboratoire », confie l’homme d’affaires.

Plus d’un moyen pour croître

Le PDG de La Voie Maltée (VM), Daniel Giguère, soutient que son entreprise est maintenant sur son « X ». Il entend par là que la qualité des produits n’est plus compromise par l’augmentation du volume de production. Un constat qui ouvre la porte vers de nouveaux créneaux et de nouvelles innovations.

« Lorsque nous nous sommes installés dans l’usine de la rue des Laurentides à Chicoutimi, je ne pouvais pas concevoir utiliser tout l’espace plancher un jour. Aujourd’hui, c’est chose du passé puisqu’avec l’arrivée de nos deux nouvelles cuves de 25 000 litres de capacité chacune et du pasteurisateur industriel au courant des prochaines semaines, il ne restera plus un pied carré de libre », explique Daniel Giguère qui a amorcé une ronde d’investissements dans ses installations pour la fabrication de nouveaux produits et le maintien des emplois manufacturiers.

Selon l’entrepreneur, doubler sa production comme il s’apprête à faire aura un impact positif au niveau de la création de richesse. « Cela va créer de l’emploi certes, mais ce n’est pas le but premier. Nous avons inclus beaucoup de robotisation et d’automatisation. L’idée c’est de prendre notre place sur le marché des différents produits artisanaux. » En effet, les connaissances et les capacités techniques en poche, l’homme d’affaires est sûr d’offrir des Seltzer, des « Smoothies » et des eaux gazeuses de qualité artisanale et en volume commercial.

Rester axé sur sa marque

« Le but ce n’est pas de proposer un Seltzer à la lime comme l’on retrouve partout. C’est d’arriver avec un produit régional qui comporte sa saveur et son caractère unique. Grossir et s’introduire sur de nouveaux marchés ne signifie pas se dénaturer. Nous sommes des brasseurs artisanaux et nous conservons cette mentalité, peu importe le produit. Nos années de labeur nous ont permis d’avoir une certaine notoriété et une capacité de production considérable rendue possible grâce à des équipements à la fine pointe de la technologie. Notre réseau de distribution comptant plus de 1400 points de vente est bien rodé et nous sommes sûrs que nos breuvages ne dormiront pas sur les tablettes et qu’il y aura une bonne rotation. »

Les gestionnaires de la VM n’entendent pas délaisser la bière pour autant. Les nouveautés brassicoles continueront d’occuper une présence importante dans l’entreprise. « D’ailleurs, au cours des semaines à venir, une bière acidulée devrait sortir de nos cuves et nous continuerons la recherche et le développement d’autres styles au courant de l’année. »

Une stratégie de convergence

Se diversifier signifie parfois converger. Au plus fort de la crise sanitaire et, tout dernièrement, avec les dernières mesures gouvernementales, le milieu de la restauration a été durement touché. L’impact causé par les fermetures n’a pas seulement affecté les restaurants de la VM, mais le groupe au complet. « Tout est relié. Nos salles à manger à Québec et au Saguenay sont une sorte de carte d’affaires de notre marque. Les gens viennent manger, ils voient le logo et ensuite ils le reconnaissent sur nos bières sur les tablettes d’épiceries. L’inverse est vrai également, nos bières attirent les gens dans nos établissements. Les nouveaux produits auront la même fonction : faire rayonner la marque », explique Daniel Giguère.

Un équipement unique

Dans quelques semaines, la VM recevra un équipement unique dans la région : un pasteurisateur. La machine qui a nécessité à elle seule un investissement de 600 000 $ permettra une constance dans le goût, un meilleur contrôle de la qualité des breuvages ainsi que d’accroître leur durabilité.

En effet, un pasteurisateur élimine les microorganismes, comme les levures et bactéries lactiques parfois présentes dans les bières après la fermentation. Ces formes de vie peuvent modifier le goût des produits et même les rendre indigestes. « Ça ressemble à un tapis sur lequel la bière en fin de production circule à travers une série de tuyaux chauffés. La température du breuvage atteint rapidement 78 °Celsius, la chaleur requise pour la pasteurisation, et refroidie aussitôt. Ainsi le goût n’est aucunement altéré et nous nous assurons que les organismes qui peuvent être présents dans les bières, les Seltzer, les cidres et les « Smoothies » sont morts », conclut l’entrepreneur.

Commentaires