Pour Luc Simard, le président du Regroupement des communautés forestières (RCF) de la Fédération québécoise des municipalités (FQM) beaucoup d’éléments devraient être réévalués dans le fonctionnement du régime forestier actuel pour assurer l’avenir et la pérennité des communautés qui en vivent. « Quand l’industrie souffre et c’est ce qui arrive en ce moment, l’impact se fait sentir directement sur les petites communautés », lance-t-il pour débuter son allocution.
Il cite les enjeux liés au fonctionnement du Bureau de la mise en marché du bois qui doit être revu, ainsi que toute la question de la gestion de l’habitat du caribou forestier, qui fera l’objet prochainement d’une méta-analyse par le ministère de la Forêt de la Faune et des Parcs du gouvernement du Québec (MFFP). Le préfet de la MRC de Maria-Chapdelaine rappelle également que les MRC doivent aussi rendre des comptes à la population en regard de la gestion et du potentiel de la forêt de proximité.
D’ailleurs, il considère que les gestionnaires de la forêt devraient impliquer davantage les utilisateurs et parties prenantes du milieu dans les décisions. Il donne l’exemple de sa région et du succès de la Corporation de l’Activité Pêche Lac-Saint-Jean (CLAP), où les utilisateurs du plan d’eau et de ses tributaires, se sont concertés et collaborent avec le MFFP pour gérer avec succès les ressources halieutiques de ce milieu unique et fragile. Par ailleurs, sur la question des garanties d’approvisionnement (GA), l’homme considère que ceux-ci devraient venir avec l’obligation d’investir dans la recherche et l’innovation.
Luc Simard insiste aussi pour souligner que les mécanismes de la concertation et l’harmonisation des besoins des utilisateurs de la forêt par les tables de Gestion intégrée des ressources et du territoire (GIRT) manquent de souplesse. « La gestion des fonctionnaires du MFFP est tout sauf souple. Ils sont trop rigides. Il n’y a notamment aucune ouverture sur la gestion des chemins multi-ressources, qui servent l’ensemble des utilisateurs de la forêt. On constate aussi un délaissement de la voirie forestière par le ministère des Transports du Québec (MTQ). Il n’y a d’ailleurs aucune coordination entre le MFFP et le MTQ pour les chemins forestiers. »
Éclairer les décideurs depuis 15 ans
Résumé de l’allocution de M. Louis Pelletier, le Forestier en chef du Québec.
Le poste de forestier en chef du Québec été créé en 2005. Louis Pelletier estime que sa mission de déterminer les possibilités forestières, d’éclairer les décideurs et d’informer la population sur l’état de la forêt est toujours très actuelle. Celui qui occupe cette fonction depuis 2016 évoque les nombreux enjeux reliés à cette ressource stratégique pour le Québec.
Dès le début de son allocution, il rappelle que, malgré certaines perceptions, la récolte de bois au Québec ne représente que 0,8 % de la possibilité forestière totale qui se situe à 27 millions d’hectares ou 50 millions de mètres cubes par année. Toutefois, même si le potentiel est là, il est important d’être vigilant pour s’assurer d’un équilibre entre la récolte et la pérennité de la forêt, alors que de nombreuses menaces planent sur la ressource. Il cite le cas des feux de forêt qui, même s’ils ont dévasté moins de boisés au cours des dernières années, demeurent une préoccupation constante.
Bien entendu, les perturbations naturelles et les changements climatiques qui vont s’accentuer représentent un enjeu important, notamment dans le contexte de la présence plus importante d’insectes ravageurs dans les forêts du Québec. Il cite notamment la tordeuse des bourgeons de l’épinette, qui a gagné beaucoup de terrain en 2019, particulièrement au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Il identifie également l’agrile du frêne et le longicorne asiatique, qui s’attaque spécifiquement aux érables.
Un autre défi important soulevé par Louis Pelletier est lié aux limites territoriales de l’habitat du cerf de Virginie et du caribou forestier, qui devront être fixées scientifiquement, le plus rapidement possible, pour assurer la prévisibilité de la récolte. Le Forestier en chef trouve très intéressant et pertinent le concept prometteur de séquestration du dioxyde de carbone par les forêts du Québec pour stimuler l’intérêt des décideurs envers l’économie forestière.
Il estime d’ailleurs qu’on pourrait presque doubler cette captation pour la faire passer de 11 à 21 tonnes de CO2 par année en regard de la possibilité forestière actuelle. Il avance aussi qu’il faudra quantifier et comparer son impact sur les GES à celui des matériaux comme le béton ou l’acier pour confirmer ce potentiel.