SAGUENAY – Quelque deux tentatives de transfert d'entreprise sur trois échouent faute de planification et d'accompagnement par des professionnels appropriés, selon la présidente de la Chambre de la sécurité financière, Me Marie Elaine Farley. Or, les professionnels du conseil financier peuvent jouer un rôle important pour assurer la réussite des projets de relève.
Le planificateur financier ou le conseiller en services financiers ne pourra évidemment pas couvrir à lui seul tous les aspects. Toutefois, il pourra référer son client à d'autres experts au fil de ses besoins et bâtir un lien de confiance entre l'entrepreneur et ces experts. "Je vois le panificateur financier ou le conseiller comme un chef d'orchestre. Dès le départ, il va s'intéresser à tous les aspects de l'entreprise afin de s'assurer qu'ils soient couverts. Il peut s'assurer que la stratégie fiscale convient à son client, que les conventions d'actionnaires sont bien en place, prévoir ce qui se passe en cas de décès, etc.", indique Mme Farley.
Celle-ci rappelle que la relève d'une entreprise est un projet qui se planifie longtemps en amont. Or, 43 % des entreprises familiales n'ont pas de plan de succession et 30 % ne comptent que sur un plan informel, selon L'Album de familles publié en 2021 par Familles en affaires et l'Institut d'entrepreneuriat Banque Nationale. Parmi celles qui en possèdent un, plus de la moitié se contentent d'un plan informel.
" Il faut vraiment en parler tôt avec son conseiller ou son planificateur financier. Il pourra adapter ses conseils en fonction de la situation de l'entrepreneur et il peut l'accompagner durant tout le cycle de l'entreprise, pas seulement en prévision de la relève. En planifiant à long terme, on s'assure de bien prévoir les impondérables et que tout sera en place lorsque l'entrepreneur sera prêt à prendre sa retraite."
Faire face aux imprévus
Marie Elaine Farley souligne qu'il peut arriver une multitude de circonstances différentes dans la vie d'un entrepreneur. Celui-ci doit être préparé à y faire face. "Par exemple, qu'arrive-t-il en cas de décès, de maladie ou de blessure? Si le propriétaire de l'entreprise ne peut plus exercer ses fonctions pendant un temps, il faut prévoir quelqu'un qui pourra s'en charger. S'il y a une perte de revenus liée à cet événement, il faut s'assurer que le patron et l'entreprise sont protégés", illustre-t-elle.
L'après transfert n'est pas non plus à négliger, puisque l'entrepreneur aura plusieurs décisions importantes à prendre, notamment concernant l'argent de la vente. Il y aura des placements à réaliser, mais il faut aussi réviser le testament et la couverture d'assurance, en plus d'actualiser la planification de la succession.
La présidente de la CSF fait remarquer que le rôle de ses membres est justement de bien comprendre les besoins et les objectifs de vie de leurs clients. Ils sont formés pour comprendre les besoins en matière de retraite, d'assurance et de sécurité financière. Ils peuvent notamment aider les entrepreneurs à estimer le montant dont ils auront besoin pour maintenir leur style de vie ou pour réaliser les projets qui leur tiennent à coeur après la vente de l'entreprise. Ils vont aussi sélectionner les meilleurs moyens pour atteindre ses objectifs.
" Il ne faut pas avoir peur de planifier. Il faut en parler. [...] Les entrepreneurs doivent choisir un conseiller avec qui ils se sentent en confiance. Ils ont la responsabilité de bien se renseigner et de choisir quelqu'un avec qui ils sont à l'aise", affirme-t-elle.
Accompagner l'humain
Selon Maire Elaine Farley, au-delà des compétences techniques des conseillers et planificateurs financiers, ceux-ci doivent s'assurer de bien accompagner leur client au plan humain. En effet, un transfert d'entreprise implique généralement des facteurs personnels et émotifs, tant pour le cédant que le repreneur. " Les conseillers doivent développer des compétences en lien avec l'empathie et l'écoute. Ils doivent être en mesure de comprendre ce que vivent leurs clients. Ils doivent écouter et ils sont bien outillés pour cela", précise-t-elle.
La CSF offre d'ailleurs plusieurs formations continues à ses membres sur différents sujets leur permettant de mieux accompagner leurs clients. Les quelque 32 000 conseillers en sécurité financière, conseillers en assurances et rentes collectives, planificateurs financiers, représentants en épargne collective et représentants en plans de bourses d'études qu'elle représente ont ainsi l'obligation de suivre un certain nombre de formations continues par année, en plus de respecter un code de déontologie rigoureux.
Guide de référence
Préoccupée par la relève des entreprises québécoises, la CSF a également collaboré à la rédaction du guide de référence Le transfert d'entreprise de la Chaire IG Gestion de patrimoine en planification financière de la Faculté des sciences de l'administration de l'Université Laval (FSA ULaval). Celui-ci est destiné aux professionnels et spécialistes qui interagissent auprès des cédants et des repreneurs.
" Avec ce guide, les personnes qui interviennent lors d'un transfert d'entreprise auront une meilleure compréhension de leurs tâches et de leurs responsabilités. Les membres de la Chambre — et en particulier les planificateurs financiers — [...] sont bien placés pour sensibiliser leurs clients à cet aspect de la gestion de leur entreprise et pour les aider à planifier le transfert ", estime Mme Farley.